Cette manifestation a eu lieu dans le berceau du mouvement anti-régime Hirak, pour le 2e anniversaire du soulèvement populaire., au moment où le président Abdemadjid Tebboune est sous pression pour juguler la crise politique qui secoue le pays depuis février 2019.
C'est donc à Kherrata, à 300 km à l'est d'Alger, qu'une mobilisation spontanée avait réuni le 16 février 2019 des milliers d'Algériens opposés au cinquième mandat présidentiel de Abdelaziz Bouteflika, rendu impotent par un AVC.
Une semaine plus tard, le 22 février, la contestation avait gagné Alger, puis le reste du pays, donnant naissance à un mouvement (Hirak) populaire inédit, réclamant "le démantèlement du système" en place depuis l'indépendance de l'Algérie en 1962.
Brandissant des drapeaux algériens et amazighs (berbères), les manifestants ont scandé des slogans connus du Hirak: "Pour l'indépendance de l'Algérie", "(le président) Tebboune est arrivé par la fraude, placé par les militaires" ou encore "Les généraux à la poubelle".
Dès lundi soir, des hirakistes avaient convergé de plusieurs wilayas (préfectures) d'Algérie pour prendre part à ce rassemblement.
Dans la continuité des marches du Hirak, suspendues depuis près d'un an en raison de la crise sanitaire, ils réclament "un Etat civil", "la liberté de la justice", "la liberté d'expression et de presse" et la libération des détenus d'opinion, d'après les banderoles affichées dans la ville.
D'anciens détenus d'opinion ont pris part au défilé comme le journaliste Abdelkrim Zeghilèche ou les jeunes Walid Kechida et Mohamed Tadjadit.
"L'heure de la sortie a sonné pour ce système corrompu. Nous espérons la construction d'une Algérie nouvelle: des droits humains, des libertés et de l'Etat de droit", a déclaré Karim Tabbou.
Les manifestations publiques restent interdites en Algérie en raison de la pandémie de Covid-19.
Si de nombreux internautes se sont félicités de la reprise du mouvement, d'autres ont critiqué le non-respect des mesures sanitaires, dont le port du masque de protection, peu visible chez les protestataires.
Les marches du Hirak sont à l'arrêt depuis mars 2020 mais à l'approche de l'anniversaire du soulèvement, les mobilisations sporadiques se sont multipliées, notamment en Kabylie (nord-est), et avec, la crispation du régime.
Cet anniversaire survient dans un climat de crispation du régime, confronté à une multicrise politique, sanitaire et socio-économique.
De retour d'Allemagne, où il a été soigné pendant trois mois du coronavirus puis de complications post-Covid, Abdelmadjid Tebboune se trouve à la tête d'un pays en crise, avec des institutions bloquées et une économie à bout de souffle.
Aux appels à la démocratie s'ajoutent désormais des revendications socioéconomiques -des étudiants par exemple-, dans un pays à l'économie peu diversifiée, tributaire des cours du marché pétrolier, qui voit fondre ses réserves de change.
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Reprenant ses activités après sa longue absence à l'étranger, le président a mené ce week-end des consultations avec plusieurs partis politiques, y compris de l'opposition, en vue de scrutins locaux et législatif anticipés d'ici la fin de l'année.
Tandis que la nouvelle loi électorale doit être présentée au Parlement, Abdemadjid Tebboune s'apprêterait à procéder à un remaniement du gouvernement, ayant publiquement exprimé son insatisfaction devant l'action de l'équipe du Premier ministre Abdelaziz Djerad.
Le chef d'Etat est également attendu sur la "question mémorielle" entre l'Algérie et la France, ancienne puissance coloniale, après la remise en janvier du rapport de l'historien français Benjamin Stora au président Emmanuel Macron.
Arrivé au pouvoir le 12 décembre 2019 avec la volonté d'incarner "la nouvelle Algérie", mais mal élu, Abdelmadjid Tebboune est régulièrement interpellé par les défenseurs des droits humains qui dénoncent une répression systématique à l'encontre des opposants, des médias indépendants et des blogueurs.
Lors de son investiture, il avait souhaité tendre la main au "Hirak authentique béni", l'expression consacrée par le régime à un mouvement dont les thuriféraires jugent les revendications désormais satisfaites, qualifiant aujourd'hui ses partisans de "magma contre-révolutionnaire".