Cette usine, la première de TSMC au Japon, «va améliorer la résilience de l’approvisionnement en puces pour le Japon et pour le monde», a souligné le le fondateur du groupe taïwanais, Morris Chang, au cours de la cérémonie d’inauguration de l’usine à Kikuyo, sur l’île méridionale de Kyushu. «Cela provoquera également une renaissance de la fabrication de semi-conducteurs au Japon», a déclaré M. Chang, qui apparaît rarement en public.
Le géant taïwanais, qui compte Apple et Nvidia parmi ses clients, contrôle plus de la moitié de la production mondiale de puces, utilisées dans tous les domaines, des smartphones aux voitures connectées en passant par les missiles et l’intelligence artificielle (IA).
Mais les clients de TSMC, ainsi que les gouvernements, préoccupés par l’approvisionnement en puces vitales pour leur économie et leur défense, ont incité l’entreprise à fabriquer davantage de puces en dehors de l’île autonome. TSMC a commencé à diversifier davantage ses capacités industrielles, sur fond de montée des craintes d’une invasion de Taïwan par la Chine, qui considère l’île comme une province chinoise dont elle doit reprendre le contrôle.
Subventions de 40%
La méga-usine de Kikuyo, d’un coût équivalent à 8 milliards d’euros, a été subventionnée à plus de 40% par le Japon. C’est l’un des piliers de l’ambitieux plan du Japon de revitaliser son industrie des semi- conducteurs.
L’usine «va aussi consolider la relation politique entre Taïwan et le Japon, à un moment où Taïwan cherche à s’assurer qu’il a des alliés puissants pouvant l’aider à résister à la pression chinoise», explique Chris Miller, professeur à l’université Tufts près de Boston (États-Unis) et auteur en 2022 de «Chip War», un livre sur la compétition dans les puces électroniques que se livrent désormais l’Asie, les États-Unis et l’Europe.
Le Premier ministre Fumio Kishida a déclaré lors de la cérémonie d’ouverture que le Japon était «désormais positionné comme un point d’ancrage important dans la stratégie mondiale de TSMC». Le gouvernement nippon prévoit d’investir jusqu’à 4.000 milliards de yens (environ 25 milliards d’euros) sur trois ans, dans le but de tripler les ventes de puces «made in Japan» d’ici 2030, à plus de 15.000 milliards de yens (plus de 90 milliards d’euros au cours actuel) par an.
La «Silicon Island» nippone
En février, TSMC a confirmé qu’il allait construire une deuxième méga-usine dans le département de Kumamoto, là aussi avec un important soutien financier de Tokyo et d’entreprises privées japonaises comme Sony et Toyota. TSMC songe aussi à construire une troisième, voire une quatrième usine géante au Japon à plus long terme, selon la presse.
Le groupe est aussi en train de bâtir un gigantesque site de production en Arizona (sud-ouest des États-Unis), un chantier qui a pris du retard, et en prévoit un autre en Allemagne, son premier en Europe. Mais le Japon a l’avantage d’être géographiquement proche de Taïwan, d’avoir une grande expérience dans la production de semi-conducteurs et d’être efficace: l’usine de TSMC a été achevée en seulement 22 mois.
L’île de Kyushu est surnommée «Silicon Island» depuis les années 1960, comme elle concentre plus d’un tiers des entreprises de semi-conducteurs au Japon. Mais comme pour d’autres secteurs d’activité, le pays craint de manquer de main-d’œuvre pour redévelopper sa filière des semi-conducteurs, en raison de son déclin démographique prononcé.