Portrait: Edouard Philippe, un premier ministre joker pour Emmanuel Macron?

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Revue de presseKiosque360. Un seul jour après son investiture comme 8e président de la Ve République française, Emmanuel Macron a choisi le député-maire du Havre, issu de «Les Républicains» (LR), Edouard Philippe, comme Premier ministre. Un illustre inconnu? Pas si sûr, même s’il s’agit d’un novice à Matignon.

Le 15/05/2017 à 21h37

C’est Laurent Fabius, le plus jeune premier ministre de la Ve République française sous François Mitterrand, aujourd’hui président du Conseil constitutionnel, qui, comme le veut la tradition, prononçait, ce dimanche 14 août, le discours d’investiture du plus jeune président de la république gaullienne, Emmanuel Macron. Sauf que Fabius, mécontent peut-être de la déroute des partis traditionnels, dont le Parti socialiste auquel il appartient, a rappelé à Macron qu’il avait été élu à l’issue d’un processus électoral «chamboule-tout». Un mot qui a failli faire pouffer de rire Macron, malgré le moment solennel, et qu’il semble avoir bien apprécié.

En effet, c’est sous cet angle du "chamboule-tout" que le site Mediapart a sorti, lundi, un portrait d’Edouard Philippe, nouveau locataire de Matignon, quelques instants seulement après sa nomination.

Diplômé de l’ENA et de Sciences Po comme la majeure partie de la classe politique française, Edouard Philippe, 46 ans, est entré en politique à l’âge de 30 ans. En 2001, il devient adjoint du maire du Havre, avant de prendre sa place en 2010, puis 2014, tout en étant élu député LR en 2012, sous une coloration politique «spéciale», qui a pesé dans la balance au moment de son choix.

C’est connu, en France, ou bien on est le fils putatif d’un ancien président de la république, ou on est celui d’un ancien premier ministre: gaulliste, giscardien, mitterrandiste, chiraquien, sarkozyste, voire rocardien, balladurien, jospinien… Selon Mediapart, Edouard Philippe, lui, a été d’abord un rocardien, c’est-à-dire un social-démocrate, qui a fini par virer à droite à cause du «sectarisme des Fabiusiens», trop socialistes, se justifie-t-il. Depuis 2002, il est un Juppéiste pur jus, du nom de l’ancien premier ministre et maire de Bordeaux, pour ne citer que ses postes les plus emblématiques.

Or, Alain Juppé n’est autre que le candidat aux dernières primaires LR, où il a été battu par François Fillon. De sa campagne, Macron a retenu la théorie de «l’omelette dont on coupe les bords». Les bords étant «les deux extrêmes, de droite comme de gauche, qui n’ont rien compris au monde», disait Juppé lors de son duel avec François Fillon. C’est justement pour son juppéisme qu’Edouard Philippe, dont la nomination à Matignon circulait depuis quelques jours, a eu les faveurs de Macron.

Electron libre au sein des LR et auparavant de l’UMP, dont il est l’un des fondateurs en 2002, où il a failli donner des coups de poings à Nicolas Sarkozy qu’il hait à mort, Edouard Philippe a toujours choisi les médias pour y exprimer ses idées «frondeuses» à travers de longues tribunes. Que ce soit sur l’homosexualité où il défend le droit d’un couple d’hommes à avoir la garde et élever un enfant, façon d’expliquer son abstention sur la loi du «Mariage pour tous», ou pour la loi sur le Renseignement qu’il refuse de voter, car «liberticide» alors qu’elle prétend défendre la liberté. Gâteau sur la cerise, il prône, dans un article paru dans les colonnes du quotidien parisien Libération, en février dernier, «la nécessité d’une VIe République»!

Autant dire que si le Juppéiste Edouard Phillipe a pris le train macroniste en marche, Macron a frappé un grand coup en le hissant à Matignon. Car, comme la gauche est déjà exsangue, il tente ainsi de diviser la droite pour mieux… gagner les prochaines législatives, et passer un quinquennat sans cohabitation, ni autre anicroche. Bien joué? Réponse en juin prochain.

Par Mohammed Ould Boah
Le 15/05/2017 à 21h37