Gaza: vers un cinquième mois de guerre, Blinken au Moyen-Orient

Une photo prise à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, montre de la fumée s'élevant au-dessus des bâtiments de Khan Younès, suite à des bombardements israéliens, le 5 février 2024. AFP or licensors

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken poursuit ce mardi sa tournée au Moyen- Orient pour tenter d’imposer une trêve dans la guerre entre Israël et le Hamas, qui s’apprête à entrer dans son cinquième mois.

Le 06/02/2024 à 07h55

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, qui a entamé lundi en Arabie saoudite une cinquième tournée régionale depuis le début de la guerre à Gaza, fait route ce mardi matin vers l’Égypte puis gagnera en fin de journée le Qatar, deux pays médiateurs aux côtés de Washington, avant de se rendre en Israël et en Cisjordanie occupée.

Avant lui, le nouveau ministre français des Affaires étrangères Stéphane Séjourné s’est entretenu lundi avec des responsables israéliens et palestiniens dans l’espoir de favoriser une trêve, voire «un règlement politique global, avec deux États vivant en paix côte à côte».

En marge de ces tractations diplomatiques, les raids israéliens se poursuivent à Gaza, où le ministère de la Santé du Hamas a fait état de 99 morts entre lundi soir et mardi matin, et de frappes aériennes et de tirs d’artillerie dans la ville de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, épicentre des combats depuis plusieurs semaines.

«Allons-nous mourir?»

Au cours des 24 dernières heures, des frappes ont aussi visé Rafah, à l’extrême sud du territoire, une ville qui comptait 270.000 habitants avant la guerre, mais où s’entassent à présent, dans des conditions désespérées plus de 1,3 million de personnes ayant fui les combats, selon l’ONU. La ville surpeuplée, située à la frontière avec l’Egypte, est le prochain objectif de l’armée israélienne.

«Aucun endroit n’est sûr, aucun endroit du tout, où allons-nous aller? Que ferons-nous? Allons-nous mourir? Si nous sommes censés vivre, où irons-nous ?», soupire à Rafah, Mohamad Kozaat, déplacé par les combats au nord mais dont six proches, dont sa fille, ont été blessés dans les raids israéliens au sud.

«Nous étions assis ici, avec les enfants, et tout à coup nous avons entendu le bruit des bombardements. Tout le toit est tombé sur nous (...) j’ai commencé à chercher mes enfants, mes frères et sœurs et mes neveux. Je ne voyais aucun d’entre eux, la poussière nous couvrait les yeux, j’ai découvert que ma fille était blessée», a-t-il ajouté.

L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.

En représailles, Israël pilonne sans relâche le petit territoire palestinien, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué 27.478 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait plus de 70.000 blessés selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.

En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 400 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le 7 octobre, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.

La trêve et au-delà

Fin novembre, une première trêve avait permis une pause d’une semaine dans les combats, l’entrée supplémentaire d’aide, les libérations d’une centaine d’otages, sur les quelque 250 à Gaza, et de prisonniers palestiniens, exclusivement des femmes et des adolescents.

Au cours de sa nouvelle tournée dans la région, M. Blinken soutient le projet des médiateurs qataris, américains et égyptiens élaboré à Paris fin janvier et qui doit encore être approuvé par le Hamas et Israël.

Selon une source du Hamas, la proposition prévoit une trêve de six semaines durant laquelle Israël devra libérer de 200 à 300 prisonniers palestiniens, en échange de 35 à 40 otages détenus à Gaza, et 200 à 300 camions d’aide pourront entrer chaque jour dans le territoire.

Or, le Hamas exige un cessez-le-feu total. Israël de son côté continue d’affirmer qu’il ne mettra fin définitivement à son offensive qu’une fois le mouvement palestinien éliminé et les otages libérés. «Le Hamas a des exigences que nous n’accepterons pas», a déclaré lundi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

Deux litres d’eau par jour

En Israël, M. Blinken doit également insister sur l’urgence de laisser entrer l’aide dans la bande de Gaza, plongée dans une crise humanitaire majeure après quatre mois de siège total, sans approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments, en électricité et en carburant. Les aides, dont l’entrée est bloquée depuis des jours par des civils israéliens, passent au compte-gouttes.

Cette crise est particulièrement aiguë dans la ville de Rafah, où s’entasse désormais la moitié de la population de Gaza rejointe chaque jour par des milliers d’autres personnes fuyant les bombardements israéliens. Selon l’ONU, les nouveaux arrivés à Rafah ne disposent plus que de 1,5 à 2 litres d’eau chacun par jour pour boire, cuisiner et se laver, et les cas de diarrhée chronique chez les enfants montent en flèche.

Ajoutant à la détresse, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) a vu des pays donateurs, dont les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France et la Suède, suspendre leur financement après des accusations d’Israël selon lesquelles 12 de ses 30.000 employés auraient été impliqués dans l’attaque du 7 octobre.

D’autres pays ont cependant refusé de suspendre leur financement de l’agence, notamment l’Espagne, qui a annoncé le triplement de sa contribution et qui a annoncé lundi le déblocage d’une aide d’urgence. «L’Espagne va débloquer une enveloppe urgente de 3,5 millions d’euros pour que l’Unrwa puisse maintenir ses activités à court terme», a indiqué le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares.

Propagation régionale du conflit

Le conflit à Gaza s’est aussi propagé dans la région. Les États-Unis ont mené la semaine dernière des frappes contre des sites en Syrie et trois en Irak, visant des groupes armés pro-iraniens, selon Washington, et ayant fait plus de 45 morts.

Lors d’une réunion lundi du Conseil de sécurité de l’ONU sur ces frappes, la secrétaire générale adjointe pour les Affaires politiques Rosemary DiCarlo à appeler les Etats à «coopérer activement» pour «empêcher une nouvelle escalade».

Mais dans la nuit, la société de sécurité Ambrey a fait état d’un tir de drone ayant légèrement endommagé un cargo britannique en mer Rouge. Et Washington a annoncé des frappes contre les rebelles Houthis qui ciblent depuis des semaines le trafic maritime dans cette voie stratégique en solidarité avec Gaza.

Par Le360 (avec AFP)
Le 06/02/2024 à 07h55