Dans la bande de Gaza, l’armée israélienne a poursuivi dans la nuit de mercredi à jeudi ses raids aériens, notamment à Khan Younès (sud) et Deir al-Balah (centre), où le ministère de la Santé du Hamas a fait état de dizaines de morts.
L’agence palestinienne Wafa a également fait état d’opérations militaires israéliennes dans divers secteurs de la Cisjordanie occupée depuis le mercredi, qui se sont soldées par plusieurs morts et une large vague d’arrestations.
Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken s’est embarqué ce jeudi pour une nouvelle tournée au Moyen-Orient dans l’espoir d’éviter une expansion de la guerre à Gaza. Aucun pays n’a «intérêt à une escalade», a déclaré Matthew Miller, le porte-parole de la diplomatie américaine critiquée dans la région pour son soutien sans faille à Israël depuis le début des frappes sur Gaza.
Les craintes de voir la guerre Israël-Hamas embraser tout le Moyen-Orient se sont encore accrues depuis une frappe, attribuée à Israël, qui a tué le numéro 2 du Hamas, Saleh al-Arouri, dans la banlieue sud de Beyrouth, et une double explosion qui a fait 95 morts mercredi en Iran, près de la tombe du général Qassem Soleimani, ex-architecte des opérations iraniennes au Moyen-Orient.
À Washington, un responsable a indiqué que la frappe contre Saleh al-Arouri était «israélienne» tandis que le département d’État a jugé «absurde» l’idée que les États-Unis ou Israël soient liés aux explosions en Iran.
Le guide suprême de la Révolution islamique, l’ayatollah Ali Khamenei, a promis «une réponse sévère». Et le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a mis en garde Israël contre une nouvelle escalade après la mort de Saleh al-Arouri, qui doit être inhumé jeudi dans le camp palestinien de Chatila, à Beyrouth. «Pour le moment, nous combattons sur le front de façon calculée (...) mais si l’ennemi pense lancer une guerre contre le Liban, nous combattrons sans limites, sans restrictions et sans frontières (...) Nous ne craignons pas la guerre», a déclaré Hassan Nasrallah.
Alerte «maximale»
En Israël, le chef d’état-major de l’armée Herzi Halevi a indiqué que ses troupes étaient en état d’alerte à la frontière avec le Liban (nord), théâtre quasi-quotidien d’échanges de tirs depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas. «Nous sommes à un niveau très élevé de préparation dans le nord (...) Je crois que notre préparation est à son niveau maximal», a-t-il dit, en évoquant «des opportunités» pour «créer un changement significatif» dans la région.
Le déplacement «volontaire» des Palestiniens de Gaza est récemment revenu dans les déclarations des responsables gouvernementaux israéliens. D’après Times of Israel, le gouvernement israélien discuterait en secret avec la république démocratique du Congo au sujet de l’acceptation de milliers de migrants Palestiniens de Gaza. «Le Congo sera désireux d’accueillir des migrants et nous sommes en pourparlers avec d’autres pays», a déclaré au média une source du cabinet de sécurité israélien.
Toujours d’après Times of Israel, un tel plan a d’ores et déjà remporté l’adhésion des partis d’extrême-droite de la coalition au pouvoir, Hatizonout HaDatit et Otzma Yehudit, dirigés respectivement par Bezalel Smotrich, ministre des Finances, et Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale. Mardi, le département d’État américain a interpellé Smotrich et Ben Gvir pour leur déclarations sur le déplacement forcé des Gazaouis, dénonçant une rhétorique «incendiaire et irresponsable».
Un haut responsable israélien a toutefois démenti cette information. «Certains en Israël pensent que les habitants de Gaza sont prêts à émigrer volontairement», a-t-il déclaré lors d’une réunion d’information avec des journalistes israéliens, sous le couvert de l’anonymat. «À mon avis, il s’agit d’une illusion sans fondement. Aucun pays n’absorbera 2 millions de personnes, ni 1 million, ni 100.000, ni 5.000. Je ne sais pas d’où vient cette idée», a-t-il commenté.
L’attaque menée en Israël par le Hamas le 7 octobre a fait environ 1.140 morts, pour la plupart des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes. Des commandos avaient aussi pris en otage environ 250 personnes, dont plus de 100 avaient été libérés fin novembre lors d’une trêve d’une semaine.
En représailles, Israël pilonne sans relâche depuis 3 mois la bande de Gaza, soumise à un siège total, bloquant tout approvisionnement en eau, en nourriture, en électricité, en médicaments et en carburant. Les bombardements et les opérations terrestres de l’armée israélienne y ont tué 22.313 personnes, en grande majorité des civils, principalement des femmes et des enfants, auxquelles s’ajoutent des milliers d’autres ensevelies sous les décombres, d’après le ministère de la Santé du Hamas. En Cisjordanie occupée, où le Hamas n’est pas représenté, plus de 320 Palestiniens ont été tués par les soldats ou les colons israéliens depuis le 7 octobre.
Les tensions se multiplient aussi en Syrie et en Irak, où l’armée américaine a mené plusieurs frappes aériennes, mais également en mer Rouge, où les rebelles Houthis du Yémen mènent des attaques pour freiner le trafic maritime en soutien à Gaza.
D’ailleurs, 18 compagnies de transport maritime contournent désormais le continent africain pour éviter la mer Rouge, a indiqué mercredi l’Organisation maritime internationale (OMI), alors qu’une coalition menée par les États-Unis exhorte les Houthis à cesser «immédiatement leurs attaques» sans quoi ils en assumeront les «conséquences».
Le boulanger des affamés
Outre les frappes aériennes et les combats au sol, les Palestiniens de Gaza sont confrontés à de graves pénuries de nourriture, d’eau, de carburant et de médicaments alors que l’aide humanitaire entre au compte-gouttes malgré une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, restée pratiquement sans effet.
«Gaza: trois longs mois d’une guerre brutale: déplacements de population massifs, morts et blessés en masse, destructions massives», a dénoncé sur X (ex-Twitter) Philippe Lazzarini, patron de l’agence d’aide aux réfugiés palestiniens de l’ONU (Unrwa).
Hazem al-Najjer Abou Ahmed, un boulanger, a créé des biscuits pour «soulager» les enfants de son village d’al-Musaddar (centre), explique-t-il à l’AFP. «La plupart des boulangeries ont été bombardées (...), les prix de toutes les denrées restent élevés et il manque de tout. Nous avons donc eu cette idée avec nos voisins pour soulager notre population et nos enfants».