Inondations historiques au Pakistan, canicules à répétition en Europe, ouragans, incendies, sécheresses... Le combat pour le climat est une «question de vie ou de mort, pour notre sécurité aujourd'hui et pour notre survie demain», insistait récemment le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.
Alors que la 27e conférence de l'ONU sur le climat (COP27), qui commence ce dimanche pour deux semaines, «doit poser les fondations pour une action climatique plus rapide et plus courageuse, maintenant et pendant cette décennie qui décidera si le combat pour le climat est gagné ou perdu», a-t-il mis en garde.
Les émissions de gaz à effet de serre doivent en effet baisser de 45% d'ici 2030 pour avoir une chance de limiter le réchauffement à 1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle, objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris.
Mais les engagements actuels des Etats signataires, s'ils étaient enfin respectés, entraîneraient une hausse de 5 à 10%, mettant le monde sur une trajectoire au mieux de 2,4°C d'ici la fin du siècle. Loin de respecter l'objectif principal de l'accord de Paris de moins de 2°C par rapport à l'époque où les humains ont commencé à brûler à grande échelle les énergies fossiles (charbon, pétrole ou gaz) responsables du réchauffement.
«Périlleux»Avec les politiques menées actuellement, c'est un catastrophique +2,8°C qui se profile. «Pitoyablement pas à la hauteur», a fustigé Antonio Guterres, qui déplore que le climat ait été relégué au second plan par l'épidémie de Covid, la guerre en Ukraine, les crises économique, énergétique et alimentaire.
«Il y a eu des moments périlleux auparavant», comme la sortie des Etats-Unis de l'accord de Paris sous la présidence de Donald Trump, note Alden Meyer, du centre de réflexion E3G. Mais «je n'ai jamais rien vu de tel», ajoute l'observateur de longue date des négociations sur le climat, décrivant une «tempête parfaite».
Dans ce contexte, malgré les engagements pris à la COP26, seuls une vingtaine de pays ont relevé leurs objectifs, et l'ONU ne voit «aucune piste crédible» pour tenir l'objectif de 1,5°C.
Après l'ouverture formelle de la COP27 ce dimanche, plus de 120 chefs d'Etat et de gouvernement sont attendus lundi et mardi pour un sommet censé donner une impulsion à ces deux semaines de négociations.
Sans le président chinois Xi Jinping ni l'Américain Joe Biden, qui passera rapidement à la COP le 11 novembre. Alors que la coopération est cruciale entre les deux principaux émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre aux relations tendues, ils pourraient toutefois se rencontrer à Bali la semaine suivante en marge du G20.
Un G20 responsable de 80% des émissions mondiales mais dont les membres les plus riches sont accusés de ne pas assumer leurs responsabilités en matière d'ambition et d'aide aux pays en développement.
Le ressentiment des pays les plus pauvres, pas responsables du réchauffement mais en première ligne de ses impacts, sera d'ailleurs au cœur de la COP27.
Greenwashing
La promesse des pays du Nord de porter à 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 leur aide aux pays du Sud pour réduire leurs émissions et se préparer aux impacts n'est toujours pas tenue. Et le Sud réclame désormais un financement supplémentaire dédié aux «pertes et dommages» déjà subis.
Mais les pays développés sont très réticents, et n'ont accepté l'an dernier que la création d'un «dialogue» sur la question, prévu jusqu'en 2024. Ils devraient toutefois concéder que le sujet soit officiellement à l'ordre du jour à Charm el-Cheikh.
«Tout le monde s'accorde à dire qu'il faut un moyen d'y remédier. La difficulté est dans les détails», a souligné Wael Aboulmagd, représentant spécial de la présidence égyptienne de la COP27.
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«On jugera du succès ou de l'échec de la COP27 sur un accord sur cette facilité de financement des pertes et dommages», a prévenu Munir Akram, ambassadeur du Pakistan à l'ONU et président du G77+Chine, qui représente plus de 130 pays émergents et pauvres.
Accord ou non sur un mécanisme spécial pour financer les «pertes et dommages» ou sur un nouvel objectif pour prendre la suite des 100 milliards à partir de 2025, les besoins de financement se comptent en «milliards de milliards», lance à l'AFP Michai Robertson, négociateur pour l'Alliance des petits Etats insulaires (Aosis), jugeant que ce sera impossible sans le secteur privé.
Les engagements du secteur privé seront aussi sous les projecteurs avec la publication du rapport du groupe d'experts de l'ONU chargé d'élaborer des normes pour évaluer les objectifs de neutralité carbone des entreprises, villes, régions ou investisseurs.
Parce que «notre monde ne peut plus se permettre de greenwashing, de faux-semblants et de retardataires», a souligné Antonio Guterres.