Depuis l’interdiction du dernier long-métrage de Nabil Ayouch, «Much Loved», le thème de la prostitution au Maroc fait couler beaucoup d’encre. Hier, le magazine américain Newsweek a publié un reportage sur le plus vieux métier du monde en suivant le quotidien de trois prostituées marocaines: deux à Tanger et une à Rabat, et en recueillant quelques chiffres clés.
On y apprend que les villes de Rabat, Agadir, Tanger et Fès à elles seules abritent quelque 19.000 femmes qui vivent d’amours tarifées. La moitié d’entre elles est divorcée ou séparée, et environ la moitié a des enfants à charge, révèle le magazine qui se base sur une étude réalisée par le gouvernement marocain et rendue publique en mai dernier.
Autre révélation cette fois-ci sur le salaire. Selon Azzouz Ettoussi, président de la section de Rabat de l'Organisation Panafricaine de Lutte Contre le Sida (OPALS), les prostituées de luxe qui partent à l’affût de portefeuilles bien garnis dans les bars et boîtes de nuit empochent de 300 à 2.000 dirhams par soirée. Les autres, celles qui fréquentent les cafés et les lieux publics, agissent en général de manière indépendante et sans aucun intermédiaire. Elles gagnent environ 200 dirhams par jour, toujours d’après Azzouz Ettoussi.
Mais cette somme paraît dérisoire lorsque l’on sait que la prostituée n’en bénéficie pas toujours pour elle seule. En effet, l’article souligne que la plupart des prostituées marocaines subviennent aux besoins d’au moins une autre personne dans leur entourage, que ce soit leurs enfants, leurs parents ou un proche.
"L'Etat préfère la prostitution à la pauvreté", déclare pour sa part Abdessamad Dialmy, un chercheur spécialisé sur la sexualité et l'identité de l'Université Mohammed V à Rabat. Selon lui, le gouvernement marocain ferme les yeux sur la prostitution parce qu'elle permet de diminuer le chômage. " La loi est là, mais elle n’est pas toujours totalement appliquée", poursuit-il.