Référence incontournable dans l’univers du design et de l’artisanat marocain depuis 25 ans, Villa Design by Itqane a récemment accueilli au sein de son équipe le célèbre designer multidisciplinaire, Mahdi Naim, nommé directeur artistique et responsable recherche & développement.
L’entreprise, qui a relevé le challenge d’industrialiser le patrimoine culturel marocain, franchit ainsi un pas de plus dans son travail de valorisation du potentiel artisanal marocain. En effet, depuis un quart de siècle, le groupe s’est attelé à positionner l’artisanat comme un secteur stratégique du développement de l’Afrique, tout en redonnant ses lettres de noblesse au métier d’artisan, en accompagnant la mise en exergue du savoir-faire marocain, du Made in Morocco.
Au service de cette approche, la combinaison de trois éléments majeurs: le numérique, le conventionnel et le Hand Made. À la clé, des solutions innovantes en matière d’ameublement et de décoration, à destination de l’hôtellerie, du résidentiel, du tertiaire et de l’évènementiel, avec un produit de qualité à forte charge culturelle.
Une offre clé en main et intégrée, avec pour étendard le Hand Made marocain
D’une entreprise spécialisée dans la menuiserie de bois née en 1999, Itqane a évolué vers une marque: Villa Design by Itqane. Un projet visionnaire et novateur à plus d’un titre, qui entend valoriser l’artisanat marocain de différentes façons, et surtout l’exporter à grande échelle. Pour ce faire, Kamal Mekouar, fondateur du groupe, a vu les choses en grand au terme d’une réflexion de près de cinq années. C’est patiemment que celui-ci a bâti un géant de l’industrie marocaine, installé dans un parc industriel de 14.000 m², doté d’un bureau d’étude et qui intègre en son sein non moins de trente-trois métiers. Cerise sur le gâteau, une «matériauthèque» de 8500 références qui opère comme un véritable laboratoire, un centre de recherche et de développement étendu sur 1500 m², avec pour vocation de répondre à tous les besoins des différents segments d’activité cités plus haut.
L’intégration au sein d’une même structure de ces trente-trois métiers est une nouveauté d’une importance capitale à bien des égards. Du point de vue du prescripteur, qui naguère devait s’adapter au savoir-faire de l’entreprise pour créer son projet, passer par plusieurs sous-traitants pour réaliser un projet hôtelier par exemple, celui-ci peut aujourd’hui s’adresser à une structure intégrée, globale, réunie au sein du même espace. Du numérique, au conventionnel en passant par le Hand Made, «nous sommes en mesure de réaliser un projet dans les meilleurs délais avec un budget optimisé en nous appuyant sur tous les atouts nécessaires pour cela», explique pour Le360 Kamal Mekouar.
Lire aussi : Artisanat: la notoriété du «Morocco Handmade» cartonne
Cœur battant de ces savoir-faire intégrés, les métiers ancestraux Hand Made typiquement marocains. Pour Kamal Mekouar, il n’y a pas l’ombre d’un doute quant à la valeur ajoutée de l’artisanat marocain à un projet, «on le voit dans les hôtels de renom, le Hand Made valorise l’espace hôtelier et apporte une valeur ajoutée, permettant à un projet d’avoir une âme, et par ailleurs, sans jamais se démoder».
L’artisanat marocain à l’heure de l’innovation
«C’est un partage de valeurs, de visions, d’estime de l’artisan marocain qui nous a rassemblés», explique pour Le360 Mahdi Naim au sujet de sa collaboration avec Kamal Mekouar. «Nous restons des artisans dans l’âme», poursuit le designer, fier de valoriser dans le cadre de ses nouvelles fonctions les savoir-faire artisanaux représentés au sein du groupe, et de pouvoir «donner une nouvelle image de cet artisanat» à travers le monde.
Car si «le monde entier aime l’artisanat marocain», assure Mahdi Naim, encore faut-il l’inscrire dans le présent et la nouveauté. «Notre challenge est de démontrer la capacité de notre patrimoine artisanal à proposer de la nouveauté, à rentrer dans le débat public international sur des questions comme celles de l’inclusion, l’écologie… », perçoit le designer.
Dans un marché où foisonnent des produits, éléments décoratifs, meubles qui se succèdent et se ressemblent beaucoup, l’autre challenge de Villa Design by Itqane est d’installer «une marque qui se distingue par son originalité, sa connexion au passé tout en restant dans le présent, et tout en offrant cette richesse du patrimoine marocain et oriental», explique Mahdi Naim, dont la mission au sein de Villa Design by Itqane est de superviser le développement de nouvelles collections et de projets d’ameublement et de décoration de luxe.
Lire aussi : Comment l’Académie des Arts Traditionnels réinvente les métiers de l’artisanat
Les produits édités sous la bannière Villa Design by Itqane seront donc «innovants» et «contrairement aux produits industriels, seront chargés en motifs et formes à connotation arabo-mauresque», explique Mahdi Naim. Pour mener à bien cette idée, l’ambition de ce nouveau duo a déjà pris forme avec la mise en place d’une maison d’édition «qui développera des collections deux fois par an», et s’imposera comme «un label marocain spécialisé dans l’édition de meubles et de design à connotation mauresque ou africaine».
Dans la foulée, Kamal Mekouar annonce ainsi l’ouverture prochaine d’une galerie Mahdi Naim by Villa Design au sein de la structure. «Tous les produits pensés, conçus, réalisés par Mahdi Naim et l’équipe Villa Design by Itqane seront présentés dans cette galerie et mis à la disposition du marché national et international», explique-t-il, fier de n’avoir «rien à envier aux grandes enseignes internationales qui ont atteint un niveau de prestige». Dans le viseur du duo, le marché de l’export, mais précise-t-on «de façon très rigoureuse et structurée».
Principal challenge et non des moindres de ce nouveau projet: transformer l’artisanat marocain en une source de richesse durable, en combinant les techniques traditionnelles avec des approches modernes et innovantes.
De l’artisanat au design, du mystique au rationnel
Mais où s’arrête l’artisanat et où commence le design? Ce savoir-faire ancestral ne risque-t-il pas d’être altéré en épousant les codes d’un design venu d’ailleurs? Pour répondre à la question, Mahdi Naim, cet ingénieur, architecte, designer mais aussi chercheur en design, parle de «néoartisanat».
À ses yeux, les différences sont de taille entre l’artisanat marocain et le design occidental. «En tant que Marocain, je suis un designer cosmopolite, qui est à l’aise dans les valeurs de la mondialisation. J’essaie de créer un dialogue. Il y a des choses qui se font de manière inconsciente au Maroc, il y a des choses qui répondent à une intentionnalité consciente en Europe et moi j’essaie de jouer ce rapport d’équilibriste entre les deux univers culturels et le rapport entre les deux intentions collectives», explique celui qui entend incarner le changement tout en restant fidèle à son identité créative.
«En tant que designer marocain, j’ai essayé d’incarner et de respecter une certaine éthique», poursuit-il. «Mon regard sur l’artisanat marocain était le regard d’un technologue, d’une sorte d’archéologue aussi. J’avais l’intuition que chercher à intégrer le design dans l’artisanat n’était pas quelque chose d’aisé. Par la force des choses, je me suis plongé dans l’artisanat pour comprendre et aller au-delà de cette argumentation que je considère un peu bateau», se souvient-il. Mahdi Naim parvient à un constat: «Essayer de faire cohabiter un design rationnel avec un artisanat, intuitif et émotionnel, me paraissait un peu ardu.» Le designer le sait aujourd’hui, et l’affirme haut et fort: «l’artisanat marocain a son propre design» et «chercher à faire cohabiter l’artisanat avec le design occidental, reviendrait à nier son propre design».
Pour Mahdi Naim, la chose est essentielle: «il faut réexplorer cet artisanat à travers son propre design», plutôt que de chercher ailleurs, dans un design occidental. Car alors que ce design dit «rationnel» se définit par l’esthétique et l’ergonomie, soit la recherche du confort et du bien-être du corps, l’artisanat marocain, lui, «pratique un design que je qualifie de mystique en ce qu’il cherche à apporter un regard sur l’ergonomie de l’âme», analyse Mahdi Naim, qui met en garde contre le fait de «traiter notre artisanat avec un système de représentation qui n’est pas le sien».
L’industrie pour préserver le patrimoine artisanal
Ainsi, l’industrialisation de l’artisanat marocain qui s’opère sous la bannière de Villa Design by Itqane respecte certains codes, en vue de ne pas dénaturer l’essence d’un savoir-faire ancestral. «Il très important aujourd’hui si on veut réactiver notre artisanat et surtout l’innovation dans notre artisanat, de comprendre sa réalité, son message, son alchimie, sa sémiologie… », insiste le designer.
Lire aussi : La diplomatie du cadeau
Pour Kamal Mekouar, il n’y a pas l’ombre d’un doute, l’industrialisation de l’artisanat permettra sa préservation. D’ailleurs, nous explique-t-il, «nous avons mis en place un centre de formation pour la sauvegarde de notre patrimoine artisanal et des techniques pour le reproduire sans risque de vieillissement des générations».
Mahdi Naïm partage la même vision: «Grâce à la technologie industrielle, on observe un retour de l’artisanat 3.0, soit l’artisanat numérique. C’est une relecture des vertus de l’artisanat en le combinant avec l’expérience industrielle, dans une tentative de transformer tout ça en quelque chose de plus vertueux, qui préserve le vivant et la condition humaine.» Des principes chers à nos ancêtres, qui en pratiquant leur art à travers les siècles, vivaient en harmonie avec leur environnement, avec la nature, dans un élan de l’âme vers le mystique. In fine, c’est dans cet artisanat si connecté à la nature que l’industrie trouve les réponses aux enjeux environnementaux d’aujourd’hui.
Mais pour se faire, encore faut-il «arriver à libérer l’artisanat de la tradition», observe le designer disruptif qui ne considère pas la chose comme étant sacrilège. Après tout, on peut puiser dans la mémoire collective tout en étant respectueux de l’évolution, admiratif du travail de créativité et d’innovation de nos ancêtres. Alors Mahdi Naim s’interroge: pourquoi, aujourd’hui, ne pas observer la même dynamique et préserver l’âme de l’artisanat tout en ouvrant la porte aux transitions, aux changements?
«Cela ne peut que le faire revivre, l’intégrer dans le temps présent, le ici et maintenant, au lieu qu’il soit un véhicule rétroactif qui nous renvoie à un passé. Il deviendrait moteur dans la construction d’un Maroc à l’aise dans le moment présent. Un Maroc qui va pouvoir contribuer à ce patrimoine humain contemporain proactif, qui sera acteur du changement.»
La finalité est là, qui pointe à l’horizon… «Exporter le savoir-vivre marocain, avec une marque marocaine prête à interagir avec les besoins contemporains», assure Mahdi Naim.