L’économie informelle reste un défi majeur pour le Maroc. C’est ce qu’indique le quotidien Le Matin du Sahara et du Maghreb dans son édition du mercredi 17 janvier, citant une nouvelle note d’information publiée par le département des études économiques du groupe Crédit Agricole France. En 2017, la Banque mondiale avait déjà publié une étude focalisée sur le Maroc et avait alors suggéré une croissance plus inclusive.
«Six années plus tard, les suggestions de la Banque mondiale sont absolument identiques, ce qui laisse à penser que peu d’avancées ont été constatées», estiment les experts du groupe Crédit Agricole. Selon eux, si l’économie informelle peut constituer une forme d’amortisseur social en période de crise en Afrique du Nord, la réduction de l’informel devient une urgente nécessité pour le Maroc, la Tunisie et l’Égypte, compte tenu du niveau très élevé de la dette publique et du très faible taux de fiscalisation des économies. «Les économistes du groupe Crédit Agricole France s’appuient notamment sur les résultats d’une étude de la Banque mondiale qui se focalise sur ces trois pays où l’emploi informel atteint des niveaux supérieurs à ceux de la plupart des autres pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA)», lit-on.
Pour l’institution, l’informalité est très profondément ancrée dans l’économie de ces pays et n’a pas diminué depuis une dizaine d’années. La principale raison est la sous-performance du secteur privé, qui pourvoit des emplois très souvent informels, et notamment dans le secteur des PME familiales. Parmi les constats majeurs, on note que 65% de l’emploi total est fourni par des micro-entreprises de moins de dix salariés en Tunisie, 53% par des PME de moins de cinq salariés en Égypte et 90% de l’emploi informel est constaté dans les petites entreprises de moins de dix personnes au Maroc. De même, l’emploi informel s’élève à 44% de l’emploi total en Tunisie, à 62% en Égypte et à 73% au Maroc. Cela est dû en partie à l’exclusion officielle de certaines catégories d’emplois aux contributions sociales. Les causes de l’informel sont multiples, notamment la manière dont sont conçus les systèmes de protection sociale. L’institution met également en cause le cadre législatif du marché du travail qui semble inadapté. Ainsi, le niveau trop élevé du salaire minimum légal (51% du salaire minimum médian au Maroc et 79% en Tunisie et en Égypte) serait hors marché pour de nombreuses activités et entreprises et empêcherait le passage dans le secteur formel. Les procédures rigides et complexes de licenciement seraient aussi un frein à la nécessaire flexibilité du marché de l’emploi, notamment en période de crise. De plus, la réglementation du travail est peu respectée et pâtit d’un manque de contrôle. Dans les trois pays de l’étude, la réglementation fiscale est très incitative pour les petites entreprises avec de très faibles taux d’impôts sur les sociétés et des exemptions de TVA. Si le principe d’aide à la création est effectivement favorisé, ces régimes fiscaux spéciaux provoquent toutefois des blocages pour l’expansion des entreprises, l’amélioration de la productivité et la création de l’emploi. L’accès au crédit est aussi cité comme frein pour réduire l’informalité.