Secteur bancaire: l’encours des créances en souffrance monte en flèche

Les banquiers sont confrontées à une forte progression des créances en souffrance ces derniers mois.

Les banquiers sont confrontées à une forte progression des créances en souffrance ces derniers mois. . DR

Les ménages et les entreprises ont de plus en plus de mal à rembourser leurs emprunts. Depuis le début de l’année, les créances en souffrance détenues par les établissements bancaires ont gonflé de près de 10 milliards de dirhams.

Le 30/10/2020 à 09h55

Les banques au Maroc sont confrontées à un affaiblissement de la qualité et de la rentabilité des prêts accordés, à cause des effets de la pandémie du coronavirus sur la solvabilité des ménages et des entreprises. Conséquence: les établissements bancaires font face à une montée en flèche des impayés et des créances en souffrance (CES).

Les dernières statistiques du secteur, publiées hier, jeudi 29 octobre, par Bank Al-Maghrib, confirment cette tendance. A fin septembre, le portefeuille des créances en souffrance détenu par les banques atteint 79 milliards de dirhams. C’est 1,6 milliard de plus en un mois, et 9 milliards de plus depuis le début de l’année. Sur une année glissante, les créances en souffrance ont progressé de 10 milliards de dirhams.

La hausse est de 13% depuis le début de l’année et de 14% sur un an, un rythme bien plus rapide que celui des crédits distribués qui eux n’ont augmenté dans le même temps que de 3% et 5%.

Rapporté à l’encours total des crédits bancaires de 945 milliards de dirhams, le taux de créances en souffrance du secteur bancaire ressort, à fin septembre, à 8,5%, contre seulement 7,6% au début de l’année. A ce rythme, le taux de CES pourrait aisément dépasser 10%, un niveau élevé, et inédit depuis des années. Pour Bank Al-Maghrib, ce taux devrait passer de 7,6% en 2019 à 9,9% en 2020 puis à 10,8% en 2021.

La hausse des CES concerne aussi bien les prêts aux entreprises que les ménages. Pour les premiers, l’encours des CES atteint près de 45 milliards de dirhams, en hausse de 13% sur une année glissante, tandis que pour les seconds, l’encours est supérieur à 33 milliards de dirhams, en progression de 17% sur une année glissante.

La situation ne risque pas de s’arranger de sitôt, au contraire, les perspectives pour les prochains mois n’incitent guère à l’optimisme. Les défaillances d’entreprises et les faillites devraient en effet commencer à s’accumuler à partir des prochains mois, notamment dans les secteurs les plus sinistrés comme le tourisme ou le BTP, et ce, d’autant plus que les reports des échéances de crédit consentis par les banques durant la période de confinement sont terminés.

Interrogé sur cette problématique lors du Conseil de la Banque centrale de septembre dernier, Abdellatif Jouahri, wali de BAM, avait tenu un langage plutôt rassurant: «nous suivons la situation de très près. Nous sommes actuellement à un niveau de créances en souffrance de 8,1%, et les provisions sont à un niveau acceptable. Bank Al-Maghrib fera un point détaillé sur cette question avec le Groupement professionnel des banques au Maroc (GPBM), en novembre prochain. Nous ferons alors le point sur la situation et sur les éventuelles répercussions sur les résultats des banques et leur solvabilité. Nous analyserons aussi où se situent les dégâts: est-ce au niveau des TPE? Des grandes entreprises? Des ménages?», avait-il déclaré.

Pour finir, il faut noter que cette tendance n’est pas propre au Maroc. Les secteurs bancaires à l'international font eux aussi face à la montée des impayés, suite au déclenchement de la crise sanitaire. Partout dans le monde, la pandémie, le confinement et le fait que les mesures de relance n’ont pas encore donné leurs résultats, font que la solvabilité des emprunteurs est mise à rude épreuve. Pour le moment, les banques tiennent le choc, mais jusqu’à quand?

Par Amine El Kadiri
Le 30/10/2020 à 09h55