Le Maroc, un modèle de diversification économique en Afrique du Nord, selon la CNUCED

Exportation de voitures au port de Tanger Med.

Le Maroc se distingue en Afrique par sa capacité à réduire sa dépendance aux matières premières, selon un rapport que vient de publier la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). Grâce à une politique économique volontariste, le Royaume diversifie ses exportations au profit de l’industrie, à rebours de nombreux pays africains encore prisonniers de la rente minière et énergétique.

Le 22/07/2025 à 14h06

Le dernier rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), The State of Commodity Dependence 2025 (l’état de dépendance aux matières premières), révèle que le Maroc a réussi à réduire sa dépendance aux exportations de matières premières, contrairement à de nombreux pays africains qui restent fortement tributaires de ces ressources.

Avec seulement 26,4% de ses exportations totales liées aux produits de base en 2021-2023 (contre 35,5% en 2012-2014), le Royaume se positionne comme un exemple de diversification économique dans une région où des pays comme l’Algérie et la Libye dépendent encore à plus de 95% des hydrocarbures.

Une stratégie économique axée sur la diversification

Le Maroc a mis en place une politique volontariste pour réduire sa vulnérabilité aux fluctuations des marchés mondiaux des matières premières. Si l’agriculture reste un secteur clé (représentant 20,5% des exportations), le pays a développé d’autres secteurs d’activité économique au fil des années, notamment en renforçant l’industrie manufacturière.

Il s’agit surtout des industries de l’agroalimentaire (produits de la mer, agrumes, légumes), de l’automobile (le Maroc est devenu le premier exportateur africain vers l’Europe), de l’aéronautique et l’électronique (attirant d’importants investissements étrangers), des énergies renouvelables (avec des projets solaires et éoliens ambitieux).

Les produits de la pêche (6,2% des exportations), les légumes (5%) et les fruits (4,6%) constituent toujours des piliers majeurs, mais leur part relative diminue au profit de biens manufacturés.

Le Maroc réduit sa dépendance alimentaire

L’agriculture marocaine, bien que modernisée, reste soumise aux aléas climatiques. Les sécheresses récurrentes, comme celle de 2022-2023, ont rappelé la nécessité de renforcer l’irrigation et l’adaptation au changement climatique.

Cependant, le Maroc a réduit sa dépendance aux importations alimentaires, avec un solde net qui ne représente plus que 1,1% de ses importations totales en 2021-2023, contre 2,3% en 2012-2014.

Le secteur agricole bénéficie d’une forte demande européenne, notamment pour les tomates, agrumes et fruits rouges, mais doit faire face à une concurrence accrue (Espagne, Turquie, Égypte).

Énergie: une transition en cours, mais des importations encore nécessaires

Le Maroc a réalisé d’importantes avancées dans les énergies renouvelables et œuvre pour atteindre un taux de 52% d’électricité verte d’ici 2030. En attendant, le pays reste dépendant des importations d’énergies fossiles, qui représentent 17,4% de ses importations totales.

La hausse des prix du pétrole et du gaz depuis 2022 a pesé sur la balance commerciale, mais les projets solaires et éoliens contribuent à réduire cette dépendance.

Ainsi, le Maroc est parvenu à limiter son recours aux matières premières, mais doit poursuivre ses réformes afin de consolider sa transition vers une économie plus diversifiée et résiliente. Les progrès en cours dans les énergies renouvelables et l’industrie pourraient en faire un hub économique clé en Afrique, à condition de relever les défis climatiques.

Deux tiers des pays en développement dépendants des matières premières

De manière générale, les auteurs du rapport de la CNUCED soulignent que la forte concentration des économies sur les matières premières — classées en trois grandes catégories: énergie, exploitation minière et agriculture — représente depuis longtemps un enjeu majeur à l’échelle mondiale. Cette situation freine le développement industriel et compromet la stabilité budgétaire des pays lorsque les prix sur les marchés internationaux deviennent volatils.

«Il est alarmant de constater que la dépendance aux matières premières est répandue dans les économies structurellement faibles et vulnérables», soulignent-ils. Dans les pays en développement, deux tiers d’entre eux –95 sur 143– sont restés dépendants des matières premières en 2021 et 2023, selon la dernière édition du rapport publiée le 21 juillet 2025.

Cette forte exposition est particulièrement marquée dans les pays d’Afrique centrale et occidentale, où, dans la majorité des cas, plus de 80 % des revenus d’exportation proviennent des matières premières. Des tendances similaires sont également observées en Asie centrale et en Amérique du Sud, où l’abondance de ressources naturelles joue un rôle central dans les échanges commerciaux.

Le rapport met en garde: à défaut d’efforts accrus en matière de diversification économique et de création de valeur, les pays courent le risque de laisser inexploitées les opportunités de transformation de leur richesse en ressources naturelles en leviers de croissance durable et résiliente.

Par Lahcen Oudoud
Le 22/07/2025 à 14h06