Après une année 2024 marquée par la sécheresse et la dégradation des indicateurs du marché du travail, le deuxième trimestre 2025 laisse entrevoir une légère amélioration. Selon le Haut-Commissariat au Plan (HCP), une reprise modeste de l’emploi se dessine, portée essentiellement par les zones urbaines, tandis que les campagnes restent durement affectées par la persistance de la sécheresse.
Le marché du travail a enregistré un gain net de 5.000 emplois entre le deuxième trimestre 2024 et celui de 2025. Une progression modeste mais significative, après la perte de 82.000 postes un an plus tôt. Cette évolution masque cependant de fortes disparités géographiques: 113.000 emplois ont été créés en milieu urbain, tandis que le milieu rural a perdu 107.000 postes, en raison notamment de la persistance de la sécheresse.
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Selon la note d’information publiée par le HCP, le déséquilibre s’explique largement par les conséquences prolongées de la sécheresse sur les activités agricoles. Le secteur de l’agriculture, de la forêt et de la pêche a vu son volume d’emploi chuter de 108.000 postes, soit une baisse de 4%.
Les BTP, principal moteur de création d’emplois
En dehors de l’agriculture, les autres secteurs d’activité ont contribué positivement à la dynamique de l’emploi. Ainsi, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) arrive en tête, avec 74.000 postes créés, répartis entre les zones urbaines (+45.000) et rurales (+29.000).
Les services ont enregistré une création nette de 35.000 emplois, malgré une baisse dans les campagnes (-26.000). L’industrie a connu une évolution plutôt modeste, avec 2.000 emplois supplémentaires, résultat d’une dynamique urbaine partiellement compensée par une baisse en milieu rural.
Par type d’emploi, ce sont 132.000 postes rémunérés qui ont vu le jour, alors que 126.000 emplois non rémunérés ont été perdus, en grande majorité dans les zones rurales.
Le chômage toujours préoccupant chez les jeunes et les femmes
Le nombre de chômeurs a reculé de 38.000 personnes, pour s’établir à 1.595.000 au niveau national. Le taux de chômage passe ainsi de 13,1 % à 12,8 %, porté par une baisse de 0,5 point en milieu rural (à 6,2 %) et de 0,3 point en zone urbaine (à 16,4 %).
Cependant, les inégalités persistent. Le chômage des jeunes de 15 à 24 ans est de 35,8%, malgré une légère baisse. Le chômage des diplômés reste élevé à 19%, bien qu’en repli de 0,4 point. Le chômage des femmes connaît une importante hausse, passant de 17,7% à 19,9%, alors qu’il recule de 0,9 point chez les hommes (10,8%).
Ce déséquilibre met en lumière les obstacles structurels auxquels les femmes et les jeunes diplômés font face dans leur insertion professionnelle.
Explosion du sous-emploi: un signal d’alerte
Si le chômage affiche une légère amélioration, le sous-emploi, lui, explose. Le nombre de personnes concernées est passé de 1,04 million à 1,15 million, portant le taux national de sous-emploi à 10,6% (+1 point). Ce phénomène touche plus fortement le monde rural (12,4%) que le milieu urbain (9,4%) et s’aggrave particulièrement dans certains secteurs.
Il s’agit en premier lieu du BTP où il s’est accentué de 3,3 points, atteignant un taux de 22,2%, suivi de l’industrie (+1,7 point, à 6,7%), l’agriculture (+0,5 point, à 12%) et les services (+0,4 point, à 8,1%).
Cette montée du sous-emploi reflète des emplois précaires, mal rémunérés ou inadaptés au profil des actifs. Le sous-emploi invisible, lié à l’insuffisance du revenu ou l’inadéquation entre formation et poste occupé, touche désormais 545.000 personnes.
Forte concentration régionale de l’activité
Le marché du travail reste concentré dans quelques pôles: cinq régions regroupent plus de 72% des actifs. Il s’agit de Casablanca-Settat (22,2%), Rabat-Salé-Kénitra (13,6%), Marrakech-Safi (13%), Fès-Meknès (11,8%) et Tanger-Tétouan-Al Hoceima (11,7%).
Les chiffres du HCP montrent ainsi que le marché de l’emploi au Maroc montre des signes de reprise fragiles, mais les déséquilibres structurels persistent: déséquilibre territorial, précarité croissante, sous-emploi massif, exclusion des jeunes et des femmes.
La croissance urbaine n’a pas encore suffi à compenser les effets d’une ruralité frappée par la sécheresse. Une politique plus inclusive, ciblée et territorialisée s’impose pour transformer cette reprise en dynamique durable.







