Couverture médicale: la Haute autorité de la santé attendue sur la révision de la tarification nationale de référence

Mustapha Aboumaarouf, président de la Haute autorité de la santé.

Mustapha Aboumaarouf, président de la Haute autorité de la santé.

La tarification nationale de référence, qui sert de base aux remboursements des actes médicaux, n’a pas été révisée depuis 2006, alors qu’elle doit être actualisée tous les trois ans. La Haute autorité de la santé aura comme tâche prioritaire de la mettre à jour. Un professionnel et un expert nous expliquent les enjeux de cette révision.

Le 18/11/2024 à 14h08

La révision de la Tarification nationale de référence (TNR) est l’un des dossiers prioritaires sur lesquels la Haute autorité de la santé est attendue. Le nouvel organe public, dont le rôle central est d’assurer la pérennité et la qualité du système de santé, a en fait hérité de ce dossier de l’Agence nationale de l’assurance maladie (ANAM) qu’il a absorbée.

Cette tarification, sur la base de laquelle sont calculés les droits aux remboursements des différents actes médicaux pour les assurés, n’a pas été révisée depuis 2006.

Une coordination représentant le secteur privé de la santé avait lancé un appel à l’Agence nationale de l’assurance maladie afin de relancer les discussions sur la révision de cette tarification, le 5 octobre dernier, soit peu de temps avant la nomination du président de la Haute autorité, Mustapha Aboumaarouf.

Interrogé à cet effet par Le360, Redouane Semlali, président de l’Association nationale des cliniques privées, signataire de l’appel, s’est montré optimiste. L’enjeu de cette révision est important, souligne notre interlocuteur. C’est l’un des prérequis à la réussite du chantier de généralisation de la couverture médicale.

En fait, relève-t-il, le coût des soins supporté par les assurés, qui peut atteindre 60% de l’ensemble des dépenses pour certains dossiers, est très élevé. Ce qui oblige certains citoyens à renoncer aux soins, au risque de laisser leurs maladies se compliquer. Au final, ces complications génèrent un coût bien plus élevé tant sur le plan de la santé que sur le plan économique, surtout dans le cas des maladies chroniques.

Le coût excessif des affections longue durée

Les données relatives à l’Assurance maladie obligatoire de base, rapportées par les lanceurs de cet appel, démontrent que les assurés qui souffrent d’affections longue durée, qui représentent seulement 3% de l’ensemble des assurés, consomment 52% du budget de l’AMO tandis que 30% des dépenses sont relatives aux médicaments.

En revanche, les consultations médicales pour les soins préventifs ne représentent que 4% des dépenses, alors que ces derniers «ont un rôle fondamental dans le diagnostic précoce des maladies et par conséquent dans la réduction des dépenses de soins et la prévention des complications qui peuvent survenir par la suite», soulignent-ils.

Contacté par Le360, Saâd Taoujni, expert dans le domaine de la santé et de la protection sociale, explique que l’actualisation de la TNR devait être réalisée tous les trois ans, selon l’engagement pris par l’Etat vis-à-vis des parties prenantes.

Les tarifs des prestations médicales sont, en effet, fixés par l’intermédiaire de conventions nationales entre les organismes gestionnaires de l’AMO et les professionnels de santé, sous l’égide de l’Etat.

Toutefois, lorsqu’on évoque la question, on a tendance à se focaliser presque systématiquement sur le cas des consultations et de la réanimation, dont le tarif de base est sous-estimé par rapport à ce que paie effectivement le patient. Or, bien d’autres actes médicaux sont mieux remboursés au Maroc que dans certains pays comme l’Égypte ou la Turquie.

Insuffisance des cotisations pour la CNOPS

Selon l’expert, cette révision doit également prendre en considération les équilibres financiers de la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS), qui gère l’AMO pour les fonctionnaires.

Ces équilibres sont, en fait, contrariés par l’insuffisance des cotisations à la CNOPS, dont le plafond mensuel est fixé à 400 dirhams, explique-t-il. Or, si la caisse veut continuer à remplir sa mission, ses ressources doivent être soutenues.

S’agissant de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), qui gère l’AMO pour les salariés du privé, Saâd Taoujni appelle à revoir à la hausse le taux de remboursement pour favoriser l’accroissement des adhésions au régime.

Selon l’expert, d’autres question épineuses mériteraient d’être soulevées comme le coût exorbitant de la prise en charge des affections longue durée par l’AMO, l’absence d’approche préventive, notamment de campagnes de sensibilisation ou le coût des médicaments, dont certains sont nettement plus chers que dans d’autres pays comme l’Égypte et la Turquie.

La Haute autorité de la santé doit aussi se pencher sur le renforcement de l’infrastructure hospitalière, l’équipement de ces établissements, la garantie de la qualité des soins ou la disponibilité des vaccins, conclut-il.

Par Lahcen Oudoud
Le 18/11/2024 à 14h08