Baisse du taux directeur à 2,25%: les explications de Abdellatif Jouahri

Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib.

Contre toute attente, Bank Al-Maghrib a réduit son taux directeur de 25 points de base à 2,25%. Une décision que Abdellatif Jouahri, wali de la Banque centrale, explique par la conjonction d’un nombre de facteurs favorisant un nouvel assouplissement de la politique monétaire. Les détails.

Le 19/03/2025 à 16h38

Prenant de court le marché, qui tablait sur un statu quo, Bank Al-Maghrib (BAM) a décidé de réduire son taux directeur de 25 points de base, à 2,25%, lors de la première réunion trimestrielle de son conseil au titre de l’année 2025, tenue le mardi 18 mars.

«J’ai une marge au niveau de ma politique monétaire, je n’ai pas de raison de ne pas l’appliquer pour soutenir la croissance et l’emploi en faisant face notamment au chômage des jeunes essentiellement citadins», a argumenté Abdellatif Jouahri, wali de la Banque centrale, lors d’une rencontre avec la presse.

Surtout que, rappelle-t-il, le taux directeur était à 1,5% lorsque BAM a entamé le cycle de resserrement de la politique monétaire qui a donné lieu à une série d’augmentations. Il a tenu, à cet effet, à souligner que pour apporter un soutien à l’économie, la Banque centrale avait auparavant recours essentiellement à la politique accommodante qui repose sur le financement des banques, en leur fournissait les liquidités qu’elles demandent.

«Maintenant, je renforce cette politique accommodante par la réduction du taux directeur», signale-t-il, soulignant que cette orientation sera plus marquée pour les très petites entreprises (TPE) qui constituent 88% du tissu économique national. «Si le gouvernement met en place les mesures qu’il a annoncées, il est important que nous puissions accompagner cette catégorie d’entreprises», a-t-il noté, indiquant qu’une réunion a été tenue le 6 mars avec le secteur bancaire à ce sujet.

Abdellatif Jouahri a expliqué que la marge dont il dispose pour franchir le pas et opérer ce nouvel assouplissement de la politique monétaire tient à une conjonction de plusieurs conditions. La première, note-t-il, est l’évolution de l’inflation à des niveaux en ligne avec l’objectif de stabilité des prix.

Les réserves de changes culmineraient à 408 milliards en 2026

En fait, développe-t-il, l’inflation a connu une nette baisse, passant d’un pic de 6,1% en 2023 à 0,9% en 2024. Certes, elle devrait s’accélérer, mais elle resterait à un niveau modéré oscillant autour de 2% au cours des deux prochaines années, selon les projections de BAM, relève-t-il. Cette évolution de l’inflation est d’autant plus importante, souligne-t-il, qu’elle concerne aussi sa composante sous-jacente qui est ressortie à 2,2% en 2024 et évoluerait également autour de 2% à moyen terme.

La deuxième condition concerne les finances publiques. «En tant que banque centrale, nous n’avons pas de soucis au niveau de la soutenabilité budgétaire, du moins de par les données qui sont sur la table», souligne-t-il.

En fait, explique-t-il, cette soutenabilité a été assurée en 2024 et devra l’être aussi en 2025, vu que la loi de finances 2025 prévoit un déficit budgétaire moins important (3,5%) et les projections de BAM montrent une poursuite de cette tendance. Bank Al-Maghrib table, en effet, sur un allègement graduel du déficit budgétaire pour revenir de 4,1% du PIB en 2024 à 3,9% en 2025 et à 3,6% en 2026.

Ce trend a été également confirmée au niveau de la programmation budgétaire triennale 2025-2027, relève le patron de BAM ajoutant que le gouvernement va présenter la loi organique des finances qui abonde dans le même sens.

La troisième condition a trait aux réserves de changes. En fait, les avoirs officiels de réserves se renforceraient à 391,8 milliards de dirhams à fin 2025, puis à 408 milliards à fin 2026, représentant respectivement 5 mois et 5 jours et 5 mois et 11 jours d’importations de biens et services.

La croissance non agricole redécolle

Ce niveau de réserves de changes est dû, note Abdellatif Jouahri, au bon comportement des exportations, la réduction de la facture énergétique, l’amélioration continue des recettes de voyages et des transferts des MRE qui se situeraient respectivement à près de 125 milliards de dirhams et 123 milliards en 2026, ainsi que des recettes des investissements directs étrangers qui continueraient de s’améliorer, avoisinant l’équivalent de 3% du PIB en 2025 et 3,3% en 2026 (contre 2,8% en 2024).

La quatrième condition, poursuit-il, est la croissance non agricole qui commence à dépasser un taux de 4%, s’approchant ainsi des niveaux enregistrés avant la crise financière de 2008 (5% et plus). En fait, cette croissance aurait atteint 4,2% en 2024 et devrait rester autour de ce niveau à moyen terme, tirée essentiellement par l’essor de l’investissement dans les infrastructures, selon la Banque centrale.

Par Lahcen Oudoud
Le 19/03/2025 à 16h38

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