Tout a commencé avec une simple vidéo mise en ligne en septembre par de jeunes internautes montrant des marques de dinosaures sur la côte de Taghazout. Ces images ont rapidement attiré l’attention de Moussa Masrour, professeur retraité de paléontologie et de biostratigraphie, responsable scientifique du Musée de géologie et d’histoire d’Anza.
Aussitôt, il décide de se rendre sur place avec des membres de l’Association marocaine pour l’orientation et la recherche scientifique (AMORS) afin de vérifier l’information. Sur le terrain, la surprise est immédiate. Ce sont bien des empreintes de dinosaures théropodes, parfaitement visibles dans la roche. Au moins trois traces distinctes, formant une piste, ont été identifiées.
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«Ce sont des jeunes qui ont repéré ces empreintes et les ont partagées en ligne. Quand j’ai vu leur publication, je me suis rendu sur place avec des membres de l’AMORS pour vérifier. Une fois sur le terrain, nous avons constaté qu’il s’agissait bien d’empreintes de dinosaures. Ce fut une très belle surprise», se remémore-t-il.
Moussa Masrour nous explique que cette découverte récente confirme des observations déjà faites dans la région. Les roches de Taghazout sont du même âge géologique que celles d’Anza, où des empreintes avaient été découvertes avant 2014. Elles remontent à une période située entre 84 et 85 millions d’années (Santonien). Des études scientifiques plus approfondies seront prochainement menées pour affiner leur datation et évaluer leur importance.
«À cette époque, il n’y avait pas encore de montagnes. La chaîne de l’Atlas n’existait pas. Le littoral correspondait alors à une vaste plage sur laquelle des dinosaures ont marché et laissé ces traces», rappelle-t-il.
Cette trouvaille vient s’ajouter à celles réalisées dans d’autres sites du sud marocain. «Le nombre croissant de sites fossilifères confirme la richesse paléontologique de la région d’Agadir et son importance scientifique», commente Moussa Masrour.
La découverte est à peine confirmée que l’équipe pense déjà à la préserver. Les empreintes sont fragiles puisque le vent, la pluie, mais aussi le vandalisme peuvent les endommager. Pour éviter cette disparition silencieuse, la priorité est on ne peut plus claire: faire un moulage.
Le moulage, une réponse à la fragilité des empreintes
Selon cet expert en paléontologie, le moulage est une technique essentielle pour conserver la mémoire des empreintes sans les déplacer ni les altérer. Il consiste à reproduire fidèlement la forme d’un objet ou d’une empreinte naturelle grâce à un matériau souple, généralement du silicone ou une résine spéciale.
Ce matériau est appliqué directement sur la surface à reproduire. Il épouse chaque relief, chaque creux et chaque détail de la trace originale. Une fois solidifié, il forme un moule parfaitement identique à l’empreinte de départ. À partir de ce moule, il est ensuite possible de réaliser une copie en plâtre, en résine ou en d’autres matériaux. «Cette méthode est largement utilisée dans les domaines de la paléontologie, de l’archéologie et des sciences naturelles», fait savoir Moussa Masrour.
Des empreintes de dinosaures découvertes à Taghazout.
L’un des intérêts majeurs du moulage est la préservation des éléments d’origine. Les empreintes de dinosaures, par exemple, sont souvent exposées aux intempéries et aux risques de dégradation. Un moulage permet de conserver une copie exacte qui restera disponible même si la trace originale disparaît sous l’effet de l’érosion, des changements climatiques ou d’un acte de vandalisme. C’est une forme de sauvegarde scientifique, insiste notre interlocuteur.
Le moulage a aussi une valeur scientifique importante. Grâce à la copie obtenue, les chercheurs peuvent étudier la trace dans des laboratoires éloignés du site d’origine sans avoir à déplacer ou risquer d’endommager l’original. Les détails de la morphologie sont conservés avec une grande précision, ce qui permet d’effectuer des analyses comparatives, des mesures et des reconstitutions.
De plus, les copies peuvent être exposées dans les musées, les écoles ou les centres culturels, permettant au grand public d’accéder à des pièces rares sans compromettre leur conservation. «L’idée est de conserver une copie dans le musée d’Anza afin que le public puisse la voir, mais aussi d’en faire des tirages pour les écoles. Cela permet aux élèves de découvrir ces traces de dinosaures de près et de comprendre la richesse géologique de leur région», conclut-il.

















