Qatar Bashing ou Arab Bashing?

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ChroniquePas un jour ne passe sans qu’un article, une émission, un reportage ne paraisse pour salir l’image d’un pays qui, depuis le début de la Coupe du monde il y a quelques jours, affiche pourtant un sans-faute quant à l’organisation de l’évènement et à sa logistique.

Le 27/11/2022 à 13h52

Depuis le début de la Coupe du monde 2022, la campagne de diabolisation du Qatar qui sévit dans la presse occidentale prend des proportions telles qu’elle frise désormais le grotesque.

Pas un jour ne passe sans qu’un article, une émission, un reportage ne paraisse pour salir l’image d’un pays qui depuis le début de la Coupe du monde il y a quelques jours affiche pourtant un sans-faute quant à l’organisation de l’évènement et à sa logistique.

En manque de sujets, le journal Le Parisien est même allé jusqu’à «pondre» un article intitulé «Coupe du monde 2022: micro-emplois et chômage déguisé… Le Qatar, royaume de l’ennui au travail». Ainsi, débute le «reportage», «à la recherche du confort absolu, le richissime émirat offre à ses habitants une profusion de services. Ces micro-tâches créent de micro-emplois. Mais en heures creuses, des armées d’employés s’ennuient à mourir». En guise d’exemple de ces «sots métiers» destinés à conforter les riches qataris dans leur confort et leur paresse, des travailleurs chargés de remplir les sacs des clients aux caisses des supermarchés de Doha…

Vu du Maroc, on a eu une petite quinte de toux en lisant ce papier, nous qui, en terme de richesses, sommes loin de rivaliser avec les Qataris mais qui pourtant jouissons de ce service dans nos grandes surfaces et même chez l’épicier du coin. Sans parler des nounous philippines et subsahariennes qui, elles, ont fait le bonheur du journal Le Monde, qui s’est régalé en dénonçant quant à lui l’esclavagisme des riches Marocains. Que diraient ces médias s’ils en venaient à apprendre qu’on dispose même de cireurs de chaussures… en pleine rue!

Mais rassurons-nous, nous autres Marocains et Qataris blindés de maille, ou qui se la jouent sans pour autant avoir les moyens de leurs ambitions, nous ne sommes pas les seuls à disposer de ces services. Car ces métiers taxés d’ennuyeux et d’inutiles par nos confrères français existent depuis des lustres aux Etats-Unis ou encore au Canada, comme ce sont d’ailleurs empressés de le signaler les lecteurs de l’hebdomadaire. Ouf l’honneur est sauf! Si les Américains font comme nous, tout est pardonné.

Mais qu’à cela ne tienne, le but de cet article, sous couvert d’une feinte indignation, n’est pas de défendre le droit des travailleurs à travers le monde mais bien de hurler avec la meute du Qatar Bashing, en jouant grossièrement sur la corde populiste qui consiste à opposer «les richissimes» aux pauvres, qui en plus s’ennuient en travaillant. A croire qu’ils auraient mieux fait d’être au chômage et de percevoir des aides sociales.

Cet article n’est qu’un exemple parmi une multitude qui s’attèle chaque jour à ternir l’image d’un pays, très loin d’être parfait certes, mais qui pour la peine s’en tire haut la main dans la tâche qui lui a été confiée.

Parler de Qatar Bashing n’est en rien démesuré car à titre de comparaison, si l’on doit s’intéresser de prêt aux précédents pays ayant organisé une Coupe du monde, ceux-ci étaient loin d’être des modèles de perfection… Et pourtant, personne, ou presque, n’a moufté. L’Europe a décidément la mémoire courte quand il s’agit de se rappeler qu’en 1934, la deuxième Coupe du monde de l’histoire a été organisée dans l’Italie de Benito Mussolini. Un superbe cadeau fait au dictateur italien pour promouvoir le fascisme à l’international.

On ne parle pas non plus de 1978, lorsque l’Argentine a décroché l’organisation de la Coupe du monde, laquelle va alors être instrumentalisée par le dictateur en place, le général Videla. Il est en effet question de l’achat de matchs en contre partie de l’élimination d’opposants péruviens par l’Argentine.

Enfin, dernier exemple en date, la Russie en 2018. Ci et là, quelques voix se sont élevées pour critiquer le non respect des droits de l’homme en Russie mais bien vite, elles se sont tues, n’étant pas amplifiées par l’appareil médiatique. On parle pourtant d’un pays qui à cette époque a déjà annexé la Crimée… Pour la Russie, cette Coupe du monde a été un franc succès et bizarrement, à aucun moment la question des droits de la communauté LGBT n’a été évoquée. Pourtant, s’il est bien un pays où la législation est particulièrement dure sur la question des LGBT, c’est bien la Russie. Mais non, la cause de cette communauté est passée à la trappe pour la simple et bonne raison que le brassard One Love n’était pas encore né. On le laissait au chaud pour le Qatar, où les relations homosexuelles sont illégales.

Les proportions prises par ce brassard, symbole de soutien à la cause LGBT, frôlent le délire, et dire cela n’implique en rien un quelconque soutien à la criminalisation de l’homosexualité, loin s’en faut. Car pendant que la presse s’acharne à parler de ce bout de tissu, que les joueurs multiplient les gestes symboles pour protester contre l’interdiction de porter le brassard, que les fédérations de football font du militantisme pro-LGBT sur leurs réseaux sociaux, pas une équipe ne manque pourtant à l’appel! La position du Qatar sur la question homosexuelle n’est pourtant pas une nouveauté, elle n’est pas apparue comme un cheveu sur la soupe après 2010. Alors de quoi parle-t-on? Quand on s’oppose à un régime, à ses lois, à ses règles, eh bien on n’y va pas car dans le cas contraire, on l’enrichit, et on le conforte dans sa position.

Enfin, que dire des 6500 victimes mortes au Qatar depuis 2010, date d’attribution de l’organisation de la Coupe du monde au pays? Un chiffre avancé par, et uniquement par, le journal britannique The Guardian, après une enquête menée dans les consulats du Pakistan, Bengladesh, Sri Lanka, Inde et Népal au Qatar, mais qui a pourtant été repris sans aucune hésitation (ni vérification) par toute la presse.

Le fait que ce chiffre faramineux implique en majorité des morts naturelles dues aux fortes chaleurs et aux arrêts cardiaques et non à des chutes ou des effondrements de chantiers ne rentre pourtant pas en ligne de compte. Le narratif de cette histoire implique que le Qatar est le méchant d’une histoire que s’évertuent à nous vendre une presse et des politiques occidentales de plus en plus promptes à faire de l’Arab Bashing dans ce qui s’apparente désormais à une véritable chasse aux sorcières.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 27/11/2022 à 13h52