Les pluies et les climats permettent de mettre en évidence au moins cinq Afriques: les Afriques des déserts, les Afriques des savanes, les Afriques des forêts, les Afriques des hautes terres et les Afriques tempérées. Chacun de ces grands ensembles est divisé en une infinité de sous-ensembles régionaux. La vie des hommes en société s'est organisée en fonction de ces multiples données naturelles. Là est l'explication de l'extrême diversité des organisations sociales africaines.
Sur 9 000 kilomètres du Nord au Sud, c'est-à-dire de la Méditerranée au cap de Bonne-Espérance, et sur 6 500 kilomètres d'Ouest en Est, soit de Dakar à Djibouti, les pluies, qui n'ont guère d’homogénéité, conditionnent les végétations. En simplifiant à l'extrême, il est possible de distinguer six grandes zones caractérisées par six grands régimes des pluies:
1- Entre 0 et 100 mm d'eau par an, nous sommes en présence de milieux désertiques sur lesquels le peuplement est impossible ou résiduel.
2- Entre 100 et 300 mm d'eau par an, le milieu est celui de la steppe subdésertique avec des activités pastorales reposant sur la transhumance. L'agriculture y est possible, mais avec une irrigation.
3- Entre 300 et 600 mm d'eau par an, la zone individualisée est celle des savanes herbeuses propices à l'élevage. Les pâturages sont relativement abondants, mais les pluies trop faibles pour permettre la pousse d'une végétation dense qui favoriserait la mouche tsé-tsé. Sauf accident climatique, cette zone permet une agriculture sans irrigation.
4- Entre 600 et 1 500 mm, nous sommes en présence des savanes arbustives. Ici, les agriculteurs n'ont en principe pas à redouter d'accident pluviométrique et c'est pourquoi nous sommes en présence de la grande zone agricole africaine. L'élevage y est encore largement possible, sauf vers la zone pré-forestière où vit la mouche tsé-tsé.
5- Au-dessus de 1 500 mm d'eau apparaît la grande forêt équatoriale. Largement dégradée sur ses périphéries, elle a fortement reculé depuis 2000 ans sous l’action des défricheurs.
6- Aux deux extrémités nord et sud du continent, le système des saisons avec été et hiver et pluies d’automne et de printemps permet la définition d’un climat méditerranéen avec la végétation qui lui est associée.
Les immenses changements climatiques du passé –le propre du climat étant de changer–, débouchèrent sur une succession d’épisodes secs et humides à l’intérieur desquels se fit la mise en place des populations africaines. Leurs manifestations et leurs conséquences ne furent pas les mêmes en Afrique du Nord, en Afrique de l’Ouest, en Afrique orientale et australe.
Dans la vallée du Nil, les variations du débit du fleuve expliquent le «miracle» égyptien. En Afrique de l'Ouest où, de +- 300 à +-1100 après JC, les pluies furent abondantes, de grands empires apparurent. Ensuite, durant quatre siècles, la sécheresse fut de retour et le Sahel entra dans une phase de lent endormissement. Puis, entre +- 1500 et 1600 de l’ère chrétienne, avec le retour des précipitations, le lac Tchad atteignit son plus haut niveau historique et les migrations des Peul éleveurs mirent en place les leviers historiques qui firent sentir leurs effets dans les deux siècles suivants.
A partir du début du XVIIe siècle la région entra à nouveau dans une période de dure aridité entraînant des crises alimentaires et politiques doublées d’invasions de criquets. L’heure fut alors à la rétractation et les Etats qui apparurent furent tous ethno-centrés. Puis, à partir de la fin du XVIIIe siècle, un retour relatif des pluies permit une nouvelle expansion sahélienne illustrée par les grands jihads des éleveurs peul et la constitution de vastes entités.
L'histoire des savanes situées au sud de la grande forêt congolaise jusqu'au Limpopo fut, elle aussi, conditionnée par les grandes phases d'humidité ou au contraire de sécheresse dans lesquelles s'inscrivent les séquences historiques des empires qui s'y succédèrent. Quant à l'Afrique australe, tout son passé fut conditionné par les variations de l'isohyète des 380 mm de pluie qui marque la limite entre les régions agricoles et les zones de transhumance pastorale.
Aujourd'hui, l'Afrique connaît l'accélération d'un épisode global de sécheresse. Ponctué de courtes rémissions périodiques, il a été identifié sur la longue durée puisqu’il débuta vers 1500 avant JC dans la région équatoriale forestière et un demi-siècle plus tard au nord de l'équateur.