Radars fixes: les cinq dysfonctionnements relevés par la Cour des comptes

De nouveaux radars installés à Casablanca.

Installation d'un radar fixe (photo d'illustration).. DR

Dans son rapport annuel au titre de l’année 2021, la Cour des comptes a consacré un passage à la performance et rentabilité du système de constatation des infractions par les radars fixes. Voici les remarques relevées.

Le 07/03/2023 à 19h04

La Cour des comptes s’est intéressée, dans son rapport annuel au titre de l’année 2021, au système de constatation des infractions par les radars fixes, lequel a été déployé en réponse au nombre élevé des accidents de la circulation qui causent près de 3.500 décès et font 12.000 blessés graves chaque année, soit une moyenne de 10 décès et 33 blessés graves par jour.

Stratégie nationale «non mise à jour»

L’institution dirigée par Zineb El Adaoui a émis plusieurs remarques concernant ce système. Concernant le cadre stratégique et organisationnel y afférent, la Cour des comptes relève que la Stratégie nationale de la sécurité routière 2017-2026 n’a pas été mis à jour à la lumière des objectifs du nouveau Plan mondial de la sécurité routière (2021-2030), notamment en rapport avec le transport multimodal, l’aménagement du territoire et les politiques qui imposent de réduire la vitesse.

Un rôle non renforcé des comités de sécurité routière

Deuxième remarque: le rôle des comités de sécurité routière n’est pas suffisamment renforcé, ce qui a impacté les efforts de coordination et de concertation nécessaires, notamment en matière de suivi des opérations d’installation des radars, de détermination des tronçons dangereux (ou points noirs), du choix des emplacements des radars, d’établissement des plans régionaux de sécurité routière, de proposition des voies d’amélioration et d’établissement des rapports de fonctionnement du système de gestion des infractions, souligne le rapport.

Les experts de la Cour des comptes recommandent ainsi au ministère du Transport et de la logistique et à l’Agence nationale de sécurité routière (NARSA) de mettre à jour la stratégie nationale de la sécurité routière en cohérence avec le Plan mondial de la sécurité routière, de renforcer le rôle des comités chargés de la sécurité routière et de mettre à niveau, en coordination avec les partenaires concernés, le système de traitement automatisé des infractions, en vue d’en assurer l’intégration et d’appréhender l’intégralité du processus de traitement des infractions.

Les problèmes d’installation

La troisième remarque concerne l’acquisition et l’installation des radars fixes. La Cour des comptes souligne, à cet égard, qu’après l’écoulement de trois années à partir de la date d’approbation des marchés objet d’acquisition et d’installation de 552 radars fixes, la part des radars installés n’a pas dépassé 12%, contre 29% des radars qui sont en cours d’installation et 59% non encore installés. Aussi, ces marchés n’abordent pas de manière exhaustive les emplacements d’installation des radars, notamment, au niveau des agglomérations, ce qui a engendré des contraintes techniques et administratives liées à l’obtention des autorisations administratives et au raccordement aux réseaux électriques et à internet.

Ainsi, la Cour des comptes recommande à la NARSA d’accélérer le rythme d’installation des radars fixes achetés et d’améliorer le système de prévision et de planification des besoins en équipements par des radars fixes, à travers l’identification des sites d’implantation des radars avant le lancement des appels d’offres pour leur acquisition.

Efficacité du système de traitement des infractions

La quatrième remarque porte sur l’efficacité du système de traitement et de verbalisation des infractions. Selon ce rapport, il s’est avéré que le résultat de ce traitement a révélé un nombre d’infractions acceptées qui a atteint 8,52 millions, contre 6,69 millions infractions rejetées, soit un taux de rejet de 39%. En outre, souligne le rapport, il y a lieu de signaler que des difficultés ont été soulevées en matière d’identification des matricules des véhicules et de leurs propriétaires.

La Cour des comptes a fait remarquer, dans le même sens, que les infractions constatées à l’encontre des véhicules immatriculés à l’étranger font l’objet de verbalisation, mais sans procéder à leur notification aux contrevenants concernés, à cause des problèmes d’identification des propriétaires de ces véhicules. De même, note le rapport, la NARSA ne dispose pas d’une plateforme commune avec la SNTL, permettant d’identifier les véhicules administratifs objet des infractions.

Problème d’exécution des jugements

Un autre dysfonctionnement est relatif à l’exécution des jugements. Selon la Cour des comptes, les tribunaux reçoivent des PV d’infractions dont les délais de prescription sont atteints ou presque, ce qui entraîne le classement de leurs dossiers. Dans ce sens, le taux des PV classés par les procureurs du Roi a atteint 62%, soit l’équivalent de 3,4 millions de PV classés sur un total de 5,47 millions de PV transmis aux parquets durant la période 2015-2021.

La Cour des comptes recommande ainsi aux ministères de la Justice et du Transport et à la NARSA de veiller à l’amélioration de la performance du système de traitement automatisé des infractions, à travers, notamment la mise à niveau des radars pour réduire le taux de rejets des infractions, et d’explorer d’autres pistes alternatives, telles que les SMS et les e-mails, pour améliorer le taux de notification des avis d’infraction.

L’organe constitutionnel recommande aussi de mettre en place un mécanisme de veille, en coordination entre la NARSA et le ministère de la Justice, visant à maîtriser les délais réglementaires de prescription et l’opération de transmission des PV d’infractions aux tribunaux compétents.

Par Younes Saoury
Le 07/03/2023 à 19h04