Ils multiplient les stratagèmes pour piéger l’acheteur. Eux, ce sont les intermédiaires, les fameux «chenakka». Ils s’incrustent entre l’éleveur-vendeur et le citoyen acheteur, se faisant leur beurre sur leur dos. Surtout sur celui du deuxième.
Les réseaux sociaux et les médias aidant, l’idée que les moutons seront nettement plus chers que les années précédentes, fait son chemin, au grand plaisir des chenakka. La réalité des prix sur le marché, la position quasi-unanime des éleveurs et des engraisseurs pour relever le niveau des prix ont facilité la tâche de ces intermédiaires, écrit le quotidien Assabah dans sa livraison du week-end des 8 et 9 juin.
La première chose qui interpelle l’acheteur, une fois qu’il aura franchi l’entrée du marché aux moutons, ce sont ces attroupements, ici et là, de personnes de tout âge autour de vendeurs éparpillés avec une demi-douzaine de moutons chacun, renchérissant l’un sur l’autre pour être l’heureux acquéreur de l’une de ces bêtes.
En réalité, précise le quotidien, c’est une scène dont le seul but est d’arnaquer le vrai acheteur, et toutes ces personnes ne sont que des comparses. Ce genre de scène est très fréquente. Il suffit aux initiés de faire un peu plus attention aux gestes et regards de ces personnes pour se rendre compte qu’il s’agit d’un piège.
Avec ce genre de manège, le prix du mouton peut atteindre les 7.000 dirhams, souligne le quotidien. A 4.000 dirhams, on n’est plus sûr de pouvoir trouver de quoi honorer le rituel sacré de l’Aïd. Pour profiter le plus possible de la détresse, et parfois de la crédulité des citoyens, le vendeur et l’intermédiaire soignent bien la mise en scène, s’habillant tous les deux comme des éleveurs de condition modeste venus de la campagne pour vendre ses bêtes et en tirer de quoi subvenir aux besoins de leurs familles pour une partie de l’année.
Parmi les autres astuces adoptées par les intermédiaires, une entente concertée sur des prix très élevés. A chaque fois qu’une cible est repérée, leurs complices se présentent et se font passer pour des acheteurs potentiels. Ils négocient serrés pour obtenir un prix moindre, tout en vantant les qualités de la bête, l’acheteur réel est encouragé, montre plus d’intérêt et dès qu’ils sentent qu’il est prêt, l’un des faux acheteurs se désiste, lui conseillant de ne pas rater l’occasion.
Dans l’acte final de la mise en scène, l’acheteur ainsi grugé se fait entendre la fameuse phrase magique : «Je le voulais pour moi, mais Dieu l’a voulu pour vous. Allez, vous avez pu obtenir ce qu’il y a de mieux sur le marché». Et pour refermer définitivement le piège sur lui, un autre faux acheteur arrive et fait mine de s’intéresser à la même bête.