Si j’avais mon mot à dire à propos de la révision de la Moudawana, je n’irais pas par quatre chemins. L’égalité des droits entre l’homme et la femme est à inscrire en premier. Par égalité, j’entends une justice équivalente, quel que soit le sexe du citoyen. À partir de là, les choses deviennent simples.
La polygamie, qui n’est pas vraiment interdite, le sera de manière claire et sans ambiguïté.
La répudiation, qui n’existe plus selon la Moudawana actuelle, devrait de nouveau être rappelée et les modalités du divorce et de ses conséquences précisées.
Divorce à égalité. Pension alimentaire sera donnée au conjoint qui gagne le moins.
Quant à l’héritage, le problème est difficile à régler. Mais, rien n’empêche un père de donner de son vivant les biens qu’il possède et qu’il fasse le partage à parts égales entre les filles et les garçons.
Le problème surgit quand le défunt n’a rien prévu ou s’il meurt subitement. À ce moment-là, c’est aux frères de bien se conduire et ne pas priver leurs sœurs d’un héritage à parts égales. Aucune raison ne peut justifier aujourd’hui que la femme qui travaille autant que l’homme, sinon plus dans les campagnes, soit privée de la moitié de ce qui lui reviendrait dans une société qui fait de la justice une valeur essentielle.
Pour cela, il faudrait que les mentalités changent. Certaines personnes, musulmanes convaincues, pas fanatiques, de tendance aussi bien de gauche que de droite, refusent de ne pas appliquer la loi qui donne à la femme une demi-part.
C’est là que le législateur pourrait intervenir et démontrer que certains versets ont une valeur universelle et éternelle, d’autres sont circonstanciels et devraient s’adapter à l’évolution de la société.
Les théologiens éclairés (il y en a) pourraient intervenir dans l’esprit de l’Ijtihad en donnant une nouvelle interprétation du texte coranique.
Le reste de la Moudawana devrait insister sur le droit à l’éducation, le respect des valeurs morales et civilisationnelles, le respect et la reconnaissance de l’individu, base de toute démocratie.
Le débat à propos du Code du statut personnel pourrait être l’occasion pour clarifier un certain nombre de sujets qu’on évite d’aborder en général.
L’égalité des droits serait la base de départ. L’un de ces sujets concerne le corps de la femme. Une femme a le droit de disposer de son corps comme bon lui semble. Il n’y a qu’elle pour décider, par exemple, d’interrompre une grossesse qui pose problème à tous les niveaux (suite à un viol, suite à une maladie ou découverte d’une malformation, etc).
La loi devrait être de son côté et lui donner les moyens de ne pas s’encombrer d’une naissance non désirée et surtout hors du cadre légal du mariage. Si par ailleurs la médecine découvre une malformation du foetus, elle aura le droit d’interrompre cette grossesse malheureuse.
Pourquoi les Tunisiens ont réussi à inscrire dans leur constitution «la liberté de conscience» et pas nous ? Au moment où le pays allait légaliser l’égalité en matière d’héritage, un nouveau président, autoritaire et agent entre les mains de l’Algérie, Kaïs Saied, a interdit tout débat sur se sujet. Mais le pays est prêt à un tel changement de sa constitution. Et l’actuel président, impopulaire s’en ira tôt ou tard.
Le Maroc aspire de plus en plus à une modernité basée sur les valeurs universelles. Il est temps de faire taire ceux qui veulent un Maroc où la femme aurait toujours moins de droits que l’homme, tout en sachant pertinemment que tout ce qui se fait dans le sens du progrès social, nous le devons à des femmes, des battantes, décidées à accéder à un Maroc plus juste et plus ouvert.