Vue du Maroc, la visite est hautement symbolique. Il s’agit du déplacement, le premier du genre d’un membre du gouvernement français, Rachida Dati, dans les provinces du Sud. Arrivée au Royaume lundi 17 février, la ministre française de la Culture s’est rendue (en premier) à Tarfaya, mais aussi et surtout à Laâyoune et Dakhla. L’occasion de visiter la forteresse historique de Casamar à Tarfaya, avant de découvrir le Musée Antoine de Saint-Exupéry et d’annoncer la mise en place prochaine d’une collection numérique d’œuvres explorant les liens entre Saint-Exupéry et le Sahara. L’occasion également de visiter la grande médiathèque de Laâyoune, d’annoncer la création d’une Alliance française dans la ville et de rencontrer de jeunes talents de breakdance. À Dakhla, Dati s’est rendue à l’antenne panafricaine de l’Institut Supérieur des métiers de l’audiovisuel et du cinéma(ISMAC) où elle a exprimé le souhait du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC-France) de soutenir le programme pédagogique de cet institut. En somme, une visite éminemment politique après l’appui exprimé par la France à la souveraineté du Maroc sur son Sahara avec un riche agenda culturel.
Du côté d’Alger, il n’en fallait pas plus pour que le régime réagisse. Officiellement et par la voie de son ministère des Affaires étrangères. Dans un communiqué rendu public ce mardi 18 février, le département d’Ahmed Attaf reprend les mêmes litanies et autres éléments de langage d’un autre âge pour affirmer que la visite d’un membre du gouvernement français au Sahara occidental traduit un «mépris insigne de la légalité internationale», remarquant la «gravité particulière» de ce déplacement. «Elle (la visite donc) est condamnable à plus d’un titre. Elle traduit un mépris insigne de la légalité internationale de la part d’un membre permanent du Conseil de sécurité». «Elle aide à la consolidation du fait accompli marocain au Sahara occidental, territoire où un processus de décolonisation reste inachevé et où l’exercice d’un droit à l’autodétermination demeure inaccompli», ajoute la même source. Et bien sûr, «malvenue», la visite «renvoie l’image détestable d’une ancienne puissance coloniale solidaire d’une nouvelle».
On découvre également que c’est le gouvernement français qui «s’isole» par rapport à l’action des Nations unies. Le régime d’Alger oublie au passage que c’est lui qui déclare forfait en refusant de prendre part au processus très onusien des tables rondes. Et fait inédit: il n’a pas pris part au mois d’octobre dernier au vote de la résolution 2756 du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental. Mais passons.
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On l’aura compris, la réaction d’Alger est pour le moins timide. A minima, ses auteurs s’abstiennent de crier vengeance. Aucune menace de représailles envers la France, comme on a pu y assister ces derniers mois, n’est proférée. Pas de conséquences désastreuses brandies. Ayant visiblement épuisé toutes ses ressources et autres leviers et désormais convaincu que la nouvelle position de la France est historique et qu’elle n’est pas près de changer, le régime d’Alger se lamente. Chemin faisant, il s’enfonce dans son déni habituel. La dynamique du plan d’autonomie qui bénéficie d’un soutien quasi unanime de la communauté internationale ne trouve toujours pas grâce à ses yeux. Mais il n’y peut rien et le communiqué de sa diplomatie à l’égard de la France vaut, finalement, résignation.
Lors de la visite de Rachida Dati, ministre française de la Culture, au Sahara.
C’est plutôt en activant ses médias que le régime d’Alger dit le fond de sa pensée et distille sa haine. Citant une obscure Association de la jeunesse sahraouie de France, Algérie Patriotique, caisse de résonance des généraux affiliés au criminel de guerre Khaled Nezzar, affirme que «ce qui ne s’obtient pas par la lutte ne s’obtiendra que par plus de lutte». La Patrie News s’attaque, lui, à la personne de Rachida Dati, qualifiée de «relais et agent» du Maroc en France, de ministre de la Culture d’un «gouvernement fantoche» dans une France qui «a perdu son poids et son aura de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU». «Elle devrait d’ailleurs en être chassée», recommande même le média. Fabuleux. Quant à TSA, il a inventé le fil à couper le beurre en précisant qu’il était «exclu que la visite de Dati au Sahara occidental rentre dans cette case des initiatives personnelles des membres du gouvernement». «Il est impensable que la ministre de la Culture fasse un tel déplacement, de surcroît dans la conjoncture que l’on sait, sans l’aval du Quai d’Orsay et de l’Élysée», écrit le site, l’air de découvrir.
On l’aura compris, le nouvel exercice favori du régime d’Alger qui va aller crescendo au fil des semaines et des mois à venir, ce sont les lamentations. Très peu persuasives de la part d’un régime inhumain qui garde embastillé l’écrivain Boualem Sansal, âgé de 80 ans et souffrant d’un cancer.

















