Le discours d’ouverture du Parlement n’est pas un discours comme les autres. Il s’inscrit dans la tradition constitutionnelle du Royaume, un rituel d’État codifié et solennel, où le roi Mohammed VI, fidèle à sa vision de long terme, fixe les grandes orientations du pays sans jamais se laisser dicter le tempo par des éléments conjoncturels. Ceux qui attendaient des annonces spectaculaires, voire une «bombe politique», confondent gouvernance d’État et agitation médiatique. Car le Roi n’agit jamais dans la précipitation. Il agit dans le temps long, celui des transformations profondes et durables. Et le discours royal de ce vendredi 10 octobre 2025, loin des emballements de réseaux ou de rumeurs, s’inscrit précisément dans cette lignée.
L’ouverture du Parlement est un moment inscrit dans la Constitution. Le discours du Souverain à cette occasion n’a jamais vocation à faire des effets d’annonce. Il fixe le cap, rappelle les devoirs et met en perspective l’action publique. Dès les premières lignes, le Roi a tenu à le rappeler. «C’est l’occasion de vous assurer du prix que Nous attachons à votre travail, qu’il soit d’ordre législatif ou qu’il se rapporte au contrôle de l’action gouvernementale et à l’évaluation des politiques publiques». Une manière d’encadrer le mandat parlementaire dans sa dernière ligne droite puisqu’arrivant à sa dernière année: servir, légiférer et rendre des comptes. Le temps est à l’action et à l’accélération des chantiers entamées. Le bilan suivra.
Pas d’antinomie entre les grands chantiers et les réformes sociales
Le cœur du discours royal réside dans un message de cohérence et d’équilibre. Le Roi balaie l’idée selon laquelle le développement économique et les priorités sociales s’opposeraient.
«Il ne devrait y avoir ni antinomie ni rivalité entre les grands projets nationaux et les programmes sociaux, tant que le but recherché est de développer le pays et d’améliorer les conditions de vie des citoyens», lit-on. Cette phrase, lourde de sens, résume une philosophie de gouvernance: le Maroc émergent et le Maroc solidaire ne sont pas deux entités distinctes. Le progrès, pour être réel, doit être partagé.
À l’écoute de son peuple, le Roi scrute le pays réel, l’arrière-pays en quelque sorte, et en capte les signaux faibles. Mais il reste le garant de la stabilité et de la cohérence de l’État. Croire que le Roi gouvernerait sous la pression d’appels conjoncturels, parfois lancés dans le vacarme numérique, relève d’une profonde méconnaissance de la monarchie marocaine et de sa tradition d’action.
Des enjeux qui dépassent la limite de l’action gouvernementale et parlementaire
La justice sociale et territoriale est au cœur de cette action et le Roi l’a encore montré en la plaçant au centre de son propos. Il en veut pour dernière illustration son dernier discours du Trône, dans lequel il a appelé à accélérer la marche du Maroc émergent et à lancer une nouvelle génération de programmes de développement territorial. «Ainsi que vous le savez, il s’agit d’enjeux majeurs qui débordent la limite temporelle de l’action gouvernementale et parlementaire», précise le Souverain. Et que l’on se rassure: «Notre pays se fraye un chemin sûr vers une plus grande justice sociale et territoriale». «Nous nous attachons aussi à ce que les fruits de la croissance profitent à tous, à ce que les enfants du Maroc uni jouissent à égalité des droits politiques, économiques et sociaux et de bien d’autres», insiste le Roi.
Le Roi rappelle à ce titre que, «le diptyque ‘justice sociale et lutte contre les inégalités territoriales’ est loin d’être un slogan creux ou une priorité conjoncturelle dont l’importance pourrait décliner au gré des circonstances. Nous le considérons plutôt comme une orientation stratégique qui requiert l’engagement de tous les acteurs, ainsi qu’un enjeu crucial qui doit imprégner les différentes politiques de développement».
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Le message est limpide: la transformation du Maroc est déjà en cours, elle se poursuit avec méthode, sans emballement, mais avec une exigence constante de résultat.
Réformer les mentalités et les pratiques
Au-delà des projets et programmes, c’est le logiciel du développement que le Roi appelle à réformer. La monarchie veut changer les mentalités et les pratiques. «La transformation majeure que Nous entendons opérer en matière de développement territorial requiert un changement significatif des mentalités et des méthodes de travail, ainsi qu’un véritable enracinement de la culture du résultat», affirme le Souverain. Ce n’est pas un vœu mais une exigence. Et «cette démarche doit reposer sur la collecte de données de terrain précises et l’utilisation des technologies numériques». Ce passage est capital: il dessine une nouvelle ère où la performance, la responsabilité et la proximité doivent guider l’action publique.
Du développement des zones montagneuses à la valorisation du littoral, en passant par la consolidation des centres ruraux émergents, le discours trace les contours d’un Maroc à destin commun. Le vision royale est celle d’un pays où chaque territoire devient acteur de sa propre croissance, mais solidaire avec les autres, où les fruits de la prospérité ne se concentrent pas dans les métropoles, mais irriguent les montagnes, les oasis et les zones rurales. «Le développement territorial harmonieux ne saurait être réalisé sans une complémentarité et une solidarité effective entre les différentes zones et les diverses régions», lit-on encore. C’est la continuité d’une pensée royale qui dépasse le mandat d’un gouvernement ou d’un Parlement. Le Roi ne parle pas pour une législature: il parle pour une génération et au-delà.
Ce discours d’ouverture du Parlement aura donc été celui de la constance évolutive. Une constance dans la vision, dans la méthode et dans le rapport au temps.
À l’heure où certains appellent, avec légèreté, à «tout dissoudre», le Souverain rappelle que la solidité du Maroc repose sur la stabilité de ses institutions et le respect de la Constitution. Le Roi écoute son peuple, mais ne cède pas à l’instantanéité des réseaux sociaux. Il entend les aspirations sociales, mais ne décide pas sous les dictats d’un serveur. Il agit avec lucidité, dans le temps long, en architecte du Maroc d’aujourd’hui et de demain.






