La relation entre le Maroc et les deux pays de la péninsule ibérique, l’Espagne et le Portugal, remonte à des siècles. Et le devenir de cette relation ne cesse de se confirmer. Récemment, la portée stratégique de cette histoire commune a connu un de ses moments forts, lors de la remise au Souverain marocain, le 14 Mars 2023 à Kigali, au Rwanda, du Prix de l’Excellence de la Confédération Africaine de Football pour l’année 2022 («CAF President’s Outstanding Achievement Award-2022»).
Ainsi naquit ce que j’appelle «l’esprit de Kigali», qui signifie un destin commun, une vision d’interaction vertueuse et un respect mutuel des intérêts géostratégiques des trois pays. C’est dans ce cadre qu’il faut traiter les questions de territoires partagés, de souverainetés entrecroisées et d’espaces vitaux interdépendants. À la place des visions nationalistes étroites, il peut y avoir une continuation de situations d’intercommunalité et de développements communs qui favorisent les intérêts qui se croisent, les desseins qui se complètent, le tout pour le bien-être des peuples et la sauvegarde de la dignité des nations.
Dans son discours à l’occasion de la remise de ce prix, le Souverain parle d’une « confiance inébranlable en Notre continent africain, en ses jeunes et en ses capacités ». Dans ce même discours, il rappelle ce qu’il avait dit lors du 29ème sommet de l’UA, à savoir que «l’avenir de l’Afrique passe par sa jeunesse» et que seule «une politique volontariste orientée vers la jeunesse canalisera l’énergie pour le développement».
Encore faut-il mette en place «les conditions propices» à l’expression du génie de cette jeunesse et à la promotion de sa créativité. Et d’ajouter qu’au-delà «du sport, le football est le fruit d’une construction sur la durée».
Si on fait «du football un levier de réussite et de développement humain durable» à l’aide une vision d’avenir, «un engagement de longue haleine, une gouvernance efficiente et transparente et un investissement dans les infrastructures autant que dans le capital humain», les nations africaines peuvent insuffler les «valeurs de persévérance, d’abnégation et de dépassement de soi» (comme l’ont démontré les joueurs marocains au Qatar) qui sont les fondements des nations donnant libre vent à leurs talents et à leur sens de créativité, d’innovation et d’entrepreunariat.
La candidature commune du Maroc, de l’Espagne et du Portugal pour l’organisation de la Coupe du monde de 2030 s’inscrit dans cette vision et cette volonté de voir la jeunesse africaine exprimer son talent dans le football et au-delà du football, au lieu de prendre les chemins de la migration illégale, des «pateras» et de la mort presque certaine au large des mers atlantique et méditerranéenne. Un rêve ibéro-africain de transformer la Méditerranée en espace de vie, de vitalité, de destin commun et de jeunes fiers de leur talent et de leur sens de la créativité.
«Sans précédent dans l’histoire du football, cette candidature commune sera celle de la jonction : entre l’Afrique et l’Europe, entre le nord et le sud de la Méditerranée, et entre les mondes africain, arabe et euro-méditerranéen ». Chaque mot dans cette phrase du souverain marocain pèse extrêmement lourd. Il appelle cette vision commune un «rassemblement autour du meilleur de part et d’autre, et la démonstration d’une alliance de génie, de créativité, d’expérience et de moyens». Une confiance inébranlable dans le destin commun de l’Afrique et de l’Europe, de la péninsule ibérique d’une part, du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest d’autre part. C’est le triomphe de la solidarité, du partage, de la créativité et des intérêts communs sur les visées nationalistes étroites et les calculs géostratégiques limités.
Avec le football, les génies ibérique et africain se mêlent et s’entrecroisent pour faire valoir ce qui unit l’Europe et l’Afrique plutôt que ce qui les sépare: la continuité et le destin commun, une jeunesse capable de se donner corps et âme à la créativité, au fair-play, aux valeurs de l’abnégation et de l’interculturalité essentielles pour surmonter les défis du développement, de la durabilité et de l’interdépendance des différents espaces en termes d’énergie, de capital humain et d’investissement.
L’esprit de Kigali est le fondement d’une trajectoire de destins qui se dessinent à l’horizon comme sources d’espoirs pour une jeunesse africaine et européenne voulant donner le meilleur de soi, dans le football at au-delà du football, et contribuer à bâtir des espaces partagés de progrès, d’innovation et de prospérité. Un vrai voisinage qui s’inscrit dans les valeurs du commun, du respect mutuel et de la sauvegarde des intérêts des uns et des autres.