Partis politiques et technocrates: des amours tumultueuses

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Revue de presseKiosque360. Entre technocrates et politiques aux affaires, c’est un débat éternel. Au fil des années, la participation des technocrates au gouvernement est devenue une coutume politique. Même les partis dits «nationalistes» leur ont ouvert leurs portes à un moment ou un autre. Aujourd’hui, une déclaration du wali de Bank Al Maghrib rouvre le débat.

Le 02/07/2021 à 21h44

Les rapports, les points de convergence et les antagonismes entre politiques et technocrates ont toujours fait débat, depuis les premiers jours de l’indépendance. Aujourd’hui encore, et au bout de plusieurs décennies de pratique politique et de tradition partisane, le sujet est toujours d’actualité. Et ce sont les récents propos du wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, sur les partis politiques, à quelques semaines des élections, qui remettent ce débat au goût du jour.

Pourtant, relève le quotidien Al Massae qui consacre un dossier à ce sujet dans son édition du week-end des 3 et 4 juillet, la présence des technocrates sur la scène politique est devenue une «coutume politique». Dans les gouvernements, dans les institutions de l’Etat, dans les établissements publics et même dans les partis politiques, elle est chose courante. Ces élites doivent leur présence et leur position à leurs compétences et leur savoir-faire mais rarement à leur proximité du pouvoir. Ce sont leurs capacités de gestion qui en font des profils recherchés à chaque fois qu’il s’agit de mener des chantiers de développement économique importants, même si cela paraît, parfois, se faire au détriment du parachèvement du processus démocratique et de la construction de l’Etat de droit.

Le plus souvent, écrit le quotidien, ces élites, particulièrement celles appelées à prendre en charge certains départements ministériels clés, manquent de formation politique et par-delà, de légitimité politique. C’est pour cela qu’ils rejoignent certaines formations politiques plus ouvertes pour sinon faire, du moins parfaire, leur formation dans le domaine. Certains partis connus ont ainsi joué le rôle de réceptacle, voire d’école politique, pour ces élites dont l’Etat a besoin pour mener des chantiers économiques et sociaux. C’est ainsi, souligne le quotidien, que le Maroc a pu gérer, grâce à ces technocrates, certaines étapes très sensibles et néanmoins difficiles de son Histoire.

Partant de là, le quotidien conclut que les rapports entre les technocrates et la politique sont des rapports d’échange, d’influence mutuelle et d’interconnexion permanente. Le politique a toujours été lié au technocrate et ce dernier a été constamment soumis à l’influence du premier, soit au sein du parti ou dans les institutions. La scène partisane a été marquée par ces interactions depuis le début des années 70 et même avant. C’est un parti de technocrates fondé par feu Maâti Bouabid qui a mené le gouvernement durant l’une des crises économiques majeures qu'a connu le Maroc moderne, affirme Al Massae. Quelques années plus tôt, Ahmed Osmane s’est appuyé sur des parlementaires sans appartenance politique pour fonder le RNI. Au début du règne de feu Hassan II, et pour contrer l’hégémonie de l’Istiqlal, le FDIC a été constitué également avec des technocrates.

Plus récemment, alors que les formations dites «nationalistes» se vidaient progressivement de leurs cadres militants pour des raisons que tout le monde connaît, ces partis ont ouvert leurs portes aux technocrates et aux élites électorales pour maintenir leurs positions sur l’échiquier politique et sur la carte parlementaire. Tous les partis sans exception ont mené leur «politique d’ouverture», souligne le quotidien, ce qui a eu pour conséquence d’aggraver le phénomène de transhumance des élus.

Aujourd’hui, relève le professeur de sciences politiques et de droit constitutionnel, Mohamed El Ghali, cité par Al Massae, le plus important, c’est de faire en sorte que la responsabilité de la gestion des affaires publiques soit confiée aux plus compétents et aux personnalités qui pourront participer activement au développement de leur pays. Et c’est aux partis politiques, c’est là leur rôle, d’encadrer, de former et d’accompagner et de présenter des personnes capables de mieux gérer les affaires publiques. C’est de cela qu’il s’agit et non d’un débat politique étriqué sur le rôle du politique et du technocrate.

De toutes les manières, souligne cet universitaire, les technocrates représentent une composante fondamentale de la classe dirigeante dans tous les pays du monde. On fait le plus souvent appel à eux quand la gestion d’un secteur ou d’un domaine donné exige un grand degré de neutralité pour le mettre à l’abri des calculs politiques et partisans. Dans ce cas, le technocrate est le seul à même de garantir une certaine neutralité et une indépendance nécessaire pour la gestion de certains départements ou secteurs économiques. Un peu partout dans le monde, le recours aux technocrates intervient également comme seule option pour éviter un clash entre partis politiques et épargner au pays une crise politique et institutionnelle. Mais cela ne signifie en aucun cas une crise de partis ou une absence de confiance en ces derniers.

Par Amyne Asmlal
Le 02/07/2021 à 21h44