Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, faisait pourtant grand cas de ce projet de loi, malgré les fortes oppositions qu’il rencontrait. Il n’a finalement pas réussi à le faire aboutir.
Au Parlement, à cause du contexte actuel marqué par une série de poursuites engagées contre plusieurs parlementaires, les conseillers de la seconde Chambre viennent de décider de suspendre l’examen du projet de loi sur les peines alternatives, alors que celui-ci avait déjà été adopté par les députés de la première Chambre.
Assabah, dans son édition de ce mercredi 7 février 2024, indique que la Commission de la Justice et de la législation de la Chambre des conseillers a suspendu ce projet de loi, suite à une décision prise par les présidents des groupes parlementaires.
Ceux-ci craignent, en effet, que l’adoption de ce texte, qui prévoit un «rachat» des peines de prison dans certains cas, ne soit interprétée comme une sorte de «porte de sortie» offerte aux parlementaires, actuellement poursuivis par la justice dans différentes affaires.
Cette décision intervient alors que ce projet de loi faisait déjà l’objet de critiques virulentes, certains considérant qu’il bénéficiera surtout aux riches, à même de s’acquitter d’importantes sommes pour éviter de subir une peine de prison.
D’autres parlementaires dénoncent le fait que ce projet de loi, aux répercussions pourtant considérables, a été élaboré dans des bureaux, et n’émane pas de la société marocaine.
Pourtant, le ministre de la Justice n’a eu de cesse de défendre son projet de loi, un texte qui, selon ses propres termes, est le «projet législatif le plus important», à même de donner «une nouvelle dynamique à la justice pénale».
Selon Assabah, pour Abdellatif Ouahbi, ce texte qui vise à protéger les droits et les libertés permet aussi de mieux lutter contre la criminalité et d’accompagner la modernisation des systèmes pénaux. En somme, il s’agit là d’une «révolution législative».
Devant les membres de la commission de la Justice de la Chambre des représentants, le ministre de la Justice a précisé que le projet de loi sur les peines alternatives était un enjeu majeur pour son département. C’est la raison pour laquelle il a été aussi attentivement étudié, afin d’être promulgué le plus rapidement possible.
Abdellatif Ouahbi a aussi expliqué que le fait d’adopter des peines dites «alternatives» pour des personnes condamnées à des peines légères permet de «renforcer le rôle de l’administration de la justice» dans la réinsertion des personnes condamnées, mais aussi d’améliorer leurs conditions d’emprisonnement dans les centres pénitentiaires et de réduire les coûts liés à leur gestion.
Tous ces arguments semblent aujourd’hui être relégués au second plan, avec l’actuelle série de scandales impliquant des parlementaires, des leaders de partis politiques et des hommes d’affaires, tous poursuivis devant la justice et encourant des peines de prison.
Les peines prévues par la législation actuelle pourraient trouver une alternative, au vu des articles prévus dans ce projet de loi, désormais reporté. Mai si celui-ci venait à être adopté, ces personnes actuellement aux prises avec la justice pourraient bien être les premières à bénéficier de «peines alternatives».
C’est cet argument qui a sans doute convaincu les Conseillers de la seconde chambre de ne pas lui donner suite pour le moment, afin d’éviter tout éventuel scandale politico-judiciaire.