De l'étonnement à la polémique, la nomination des nouveaux membres de l'Autorité nationale de régulation de l'électricité (ANRE) vire carrément au scandale politique. Ces nominations continuent de faire débat au sein même de certains partis politiques qui accusent le chef du gouvernement et les présidents des deux Chambres du Parlement de faire prévaloir la logique partisane, écrit le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans une longue analyste consacrée au sujet dans son édition du lundi 17 août.
Indéfendables pour certains, ces nominations sont, pour d'autres, tout à fait légitimes. C'est ainsi que, affirme le ministre d'Etat et dirigeant du PJD Mustapha Ramid, cité par le quotidien, l'appartenance politique des citoyens, que ce soit à la majorité ou à l'opposition, ne devrait pas constituer un critère de nomination ou de renvoi de responsables publics. Le chef du gouvernement a, de son côté, insisté sur le fait que les nominations auxquelles il a procédé, au sein de la même instance, «sont conformes aux procédures légales».
Le chef de l'Exécutif, auquel il est reproché d’avoir nommé trois personnalités à l’ANRE sans s'en être concerté avec les membres de la majorité et en faisant fi du pluralisme partisan et politique, a laissé entendre qu'il avait agit en conformité avec la loi 48-15 instaurant l’ANRE. Cette loi, relative à la régulation du secteur de l'électricité, a, en effet, donné le doit au chef du gouvernement de nommer trois membres de l’ANRE sans en référer à une quelconque instance professionnelle ou département ministériel. La seule condition exigée, c’est la compétence des candidats.
Malgré ces éclaircissements présentés par le chef du gouvernement, la question de la nomination des neuf membres de l’ANRE, qui a été actée il y a quelques jours, continue de susciter la polémique. A ce propos, souligne le professeur de sciences politiques Omar Cherkaoui, cité par Al Ahdath Al Maghribia, la nomination de plus de la moitié des membres de l’ANRE parmi les membres des bureaux politiques du PAM, de l’USFP et du PJD constitue «un scandale moral et politique à tous les niveaux». Ce genre d'attitude, estime-t-il, est de nature à altérer la confiance des citoyens en les institutions, aggraver l’abstention électorale et accentuer le sentiment selon lequel les politiciens seraient des «parasites qui se nourriraient des richesses du pays».
Pour ce professeur universitaire, les nominations proposées par les présidents des deux Chambres du Parlement qui ont permis à trois membres de l’USFP et trois autres du PAM de siéger à l’ANRE, ne peuvent être qualifiées autrement que de «catastrophe». Cela dit, la responsabilité du PJD est également avérée dans cette affaire. Ainsi, poursuit le politologue, c'est sous le gouvernement conduit par le PJD que le projet de loi portant création de l’ANRE a été élaboré. Et l’empreinte du parti y est manifeste. C'était en 2015, sous le gouvernement Benkirane, et le texte a été élaboré, présenté et défendu par le ministre de l’Energie d’alors, Abdelkader Amara, membre du secrétariat général du PJD.
La loi 48-16 a été promulguée l'année suivante, dûment contresignée par Abdelilah Benkirane. Trois ans plus tard, en novembre 2019, Saâd-Eddine El Otmani signe un décret fixant les indemnités, jugées gonflées, des membres de l’ANRE. Le 10 août dernier, il promulgue un autre décret portant nomination des membres de cette instance de régulation du secteur de l'électricité. Laquelle nomination a été à l'origine d'une polémique qui ne cesse d'enfler à cause des membres nommés sur proposition des présidents des Chambres parlementaires. Polémique à laquelle les partis de l'opposition ont grandement contribué. Au point que le PAM est allé, par exemple, jusqu’à sommer ses membres, proposés par le président de la deuxième Chambre, de présenter leur démission sous peine de sanctions.