Mais que peut bien faire un ambassadeur au Vatican, ce minuscule Etat-église qui, sur les plan économiques, commerciaux, voire politiques, n’a pratiquement rien à échanger avec les autres Etats du monde? Les principes de tolérance et de coexistence entre civilisations, cultures et réligions, répond Rajae Mekkaoui, ambassadrice du Maroc au Vatican, dans une interview accordée au quotidien Al Massae et publiée dans son édition du mardi 7 janvier.
Rajae Mekkaoui, universitaire spécialisée en droit pénal et sciences de la religion, n’est plus à présenter. Elle est non seulement la première femme à avoir donné, en 2003, une conférence devant le souverain lors des causeries religieuses du Ramadan, mais elle est surtout la première femme musulmane et arabe à être nommée ambassadrice auprès du Saint-siège.
Cette forte symbolique de son choix pour ce poste sensible et son acceptation par le Vatican, Rajae Mekkaoui l’explique par l'immense et profond respect que sa sainteté le pape François, né Bergoglio Jorge Mario, voue à Amir Al Mouminine, le roi Mohammed VI. Un respect matérialisé par sa dernière visite au Maroc, au cours de laquelle il a donné des signaux forts sur les relations qui lient deux détenteurs des pouvoirs spirituels, chrétien et musulman.
D’une part, le pape François a élevé l’archevêque de Rabat, Cristóbal Lopez Romero, au rang de cardinal, une promotion qui l’habilite à faire partie de l’élite qui élit le pape, tout en lui rappelant, d’autre part, que le rôle de l’église au Maroc n’est pas de christianiser les Marocains, mais de veiller à la coexistence exemplaire qui a toujours prévalu entre chrétiens et musulmans en terre d’islam. Et Rajae Mekkaoui de rappeler que l’inverse aurait été vrai pour les musulmans en terre de la chrétienté s'il n'y avait ces partis populistes, racistes, xénophobes de l’extrême droite européenne qui, pour des raisons électoralistes, ont fait de l’islamophobie leur fonds de commerce.
Ainsi, elle estime que, dans un monde marqué par les conflits armés, les violences ethnico-religieuses et les périls écologiques, la sagesse et les bonnes initiatives sont les bienvenues. C’est dans ce sens que se déploie régulièrement la diplomatie spirituelle que mènent en concomitance le roi Amir Al Mouminine (Al-Qods, développement de l’Afrique, tentatives de conciliations entre voisins arabes dans le Golfe…) et le pape François à travers ses voyages, ses homélies dominicales et son Urbi et orbi annuel.