Guerguerat: récit du calvaire vécu par les transporteurs marocains

Le360

50 à 100 camions marocains traversent quotidiennement le tronçon séparant le poste frontière marocain de Guerguerat et celui du nord de la Mauritanie. Et ce, en dépit du harcèlement et des provocations des milices armées du Polisario. Récit d'une traversée à très haut risque.

Le 03/03/2017 à 16h06

La situation demeure tendue dans la région de Guerguerat, malgré le retrait marocain, dimanche 26 février, de cette zone démilitarisée en vertu de l'accord de cessez-le-feu signé le 6 octobre 1991. Pourtant, les transporteurs marocains continuent vaille que vaille à emprunter quotidiennement la route goudronnée par le génie civil marocain (sur 2.4 km), ainsi que le corridor de 1.3 km au milieu de "Kandahar". Ils affirment ne pas être prêts à renoncer à leur gagne-pain, quand bien même leur vie serait en danger.

"En traversant le dernier poste frontière de mon pays, à l'extrême sud marocain, à destination du premier poste frontalier dans le nord de la Mauritanie, je ne peux pas ne pas ressentir la peur d'être liquidé", confesse à le360 un transporteur marocain qui vient de rentrer de Mauritanie, ce vendredi 3 mars, via le fameux corridor dit de "Kandahar". Peur et ressentiment continuent de tenailler ce père de famille marocain qui a souhaité ne pas être cité. Ressentiment envers les éléments armés du Polisario, qui l'ont intercepté ce vendredi même à son retour de la Mauritanie. "A mi-chemin entre le poste frontière mauritanien et celui de Guerguerat au Sahara marocain, un élément du Polisario m'a fait signe de m'arrêter. Il a fait le tour du camion avant finalement de me laisser passer", relate notre interlocuteur, sur un ton de dépit.

Mais si ce transporteur a pu passer le "check-point" de fortune installé par les milices armées du Polisario, flanquées de deux pick-up de type Toyota, ce n'est pas le cas de tous. Pas plus tard que mercredi 1er mars, un camionneur qui voulait se rendre en Mauritanie a été contraint par les éléments du Polisario de retourner au poste frontière marocain de Guerguerat", raconte notre interlocuteur. Raison invoquée par les éléments du Polisario: un drapeau du royaume du Maroc était peint sur son véhicule! La victime de cet acte provocateur s'est résolu à rebrousser chemin, plutôt que d'obéir aux injonctions de ses intercepteurs qui conditionnaient son passage à l'effacement du drapeau de son pays.

Ce type d'agissements indûs n'est pas sans causer de dégâts, quand on sait que les cargaisons des transporteurs sont constituées de poissons, de légumes et de fruits. Il est vrai que les camions sont munis de compartiments réfrigérés. Néanmoins chaque voyage annulé se solde par des pertes conséquentes pour les commerçants marocains qui alimentent toute l'Afrique subsaharienne, en fruits, en légumes et en toutes sortes de produits de première nécessité tels que le sucre, le lait, l'huile, précise notre source. D'autant que les prix des produits marocains sont de loin inférieurs à ceux pratiqués sur les marchés de Nouakchott (Mauritanie), Bamako (Mali), Niamey (Niger), Dakar (Sénégal), ou plus loin encore à Abidjan, en Côte d'Ivoire.

On peut donc parler d'une demande énorme à laquelle le Marocain satisfait chaque jour, et que met en évidence ce trafic commercial prospère qui a lieu sur le tronçon terrestre névralgique de "Kandahar".

Il en ressort également que le Maroc n'est pas le seul à être touché par les agissements inadmissibles de la part des milices armées du Polisario. Nombre de pays d'Afrique subsaharienne sont aussi concernés. Le tout nouveau secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a d'ailleurs pris la mesure de la gravité de ces agissements irresponsables en affirmant, samedi 25 février, que "le trafic commercial régulier ne doit pas être entravé".

Un appel tombé dans l'oreille d'un sourd, puisque le Polisario, obéissant aux instructions de son tuteur algérien, ne veut toujours pas retirer ses éléments armés de la région de Guerguerat, défiant ainsi la volonté du SG de l'ONU et de tous les grands pays qui ont salué le retrait du Maroc de cette région, entre autres les Etats-Unis, la France, l'Espagne et l'Allemagne.

Le roi Mohammed VI a été on ne peut plus clair en appelant, vendredi 24 février, le SG de l'ONU à intervenir pour mettre un terme aux incursions armées du Polisario dans la région de Guerguerat au Sahara marocain, et sauver le cessez-le-feu aujourd'hui mis en danger par le Polisario, qui agit conformément aux ordres d'Alger.

Interrogé par le360 sur la cadence du trafic actuel, le transporteru marocain a indiqué que les jours de pointe sont les jeudis, vendredis et lundis. "L'activité ne baisse que le weekend", a-t-il encore indiqué, en expliquant que cela était conditionné aux procédures douanières en vigueur au poste frontière de Guerguerat.

Autre interlocuteur, même ton indigné. Un transitaire marocain contacté par le360 dénonce les agissements provocateurs des milices du Polisario faisant le pied de grue dans la localité de "Kandahar". Une situation qui, selon la même source, a amené plusieurs transporteurs marocains à observer, pas plus tard que lundi 26 février, un sit-in dans la zone tampon, à 200 mètres du poste frontière de Guerguerat. La goutte qui a fait déborder le vase: une vitre brisée à cause d'un jet de pierres de la part d'un élément armé du Polisario. Le plaignant, qui n'a heureusement pas été touché, a dû toutefois faire face à des intimidations pour avoir simplement affiché le drapeau de son pays sur la carrosserie de son véhicule.

Une tension savamment orchestrée par la partie adverse cherchant en vain à provoquer une riposte militaire du Maroc, dans l'espoir de passer pour une "victime d'agression" aux yeux de l'opinion publique internationale. Mais cette manoeuvre a été mise en échec par le Maroc, à travers le retrait de la région de Guerguerat. La pression est aujourd'hui du côté d'Alger et du Polisario, plus que jamais isolés sur la scène internationale. 

Par Ziad Alami
Le 03/03/2017 à 16h06