Même avec son impressionnante série d’échecs et de déconfitures, la junte au pouvoir en Algérie n’en démordra pas s’agissant de sa haine viscérale envers le Maroc et de sa stratégie de nuisance programmée dans le dossier du Sahara. C’est le Middle East Institute (MEI), le plus ancien –fondé en 1946– et le plus influent think tank américain dédié au Moyen-Orient et à l’Afrique du Nord, qui l’affirme. Dans une récente étude signée par l’analyste Francisco Serrano sous le titre «La rivalité régionale entre le Maroc et l’Algérie est sur le point de prendre de l’ampleur», le centre de recherche indique que l’Algérie s’apprête (encore!) à monter en puissance dans sa «guerre» contre le Royaume et ses intérêts. Ceux qui tablaient sur un changement de tactique en tenant compte des nouvelles réalités sur le terrain seront déçus. En tentant d’apporter du neuf, la junte puisera dans l’ancien –consubstantiel à la haine du Maroc et des Marocains. La plus jolie femme du monde ne peut donner que ce qu’elle a, dit le proverbe. Et le régime algérien n’a que la marocophobie à donner.
En cela, la junte se sent pousser des ailes. «Pendant des années, le régime algérien a été entravé par des faiblesses intérieures et a eu une influence limitée à l’étranger. Mais récemment, Alger a vu sa position interne et externe s’améliorer. Après avoir enduré une vague de manifestations populaires à l’échelle nationale entre 2019 et 2021, le régime autocratique dirigé par l’armée a réussi à freiner la dissidence, en recourant à la répression et en tirant parti des restrictions liées au Covid-19», rappelle l’analyse.
Le Conseil de sécurité comme nouveau terrain
L’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 a encore accentué la folie des grandeurs du régime algérien en faisant grimper les prix du gaz et en plaçant l’Algérie comme un pis-aller pour les pays européens cherchant à réduire leur dépendance de Moscou. «L’augmentation des revenus énergétiques a aidé les autorités algériennes à apaiser le mécontentement intérieur en augmentant les dépenses sociales» et a fissuré davantage le miroir cassé donnant une impression illusoire d’importance diplomatique et stratégique de l’Algérie.
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Une impression qui sera aggravée en 2024-2025, quand le voisin de l’est occupera un siège temporaire au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. «Cela lui donnera probablement de nouveaux mécanismes et du poids pour tenter de repositionner le débat sur le statut du Sahara occidental dans l’agenda diplomatique», lit-on.
Alger espère également faire pression pour, excusez du peu, une réforme du Conseil de sécurité, afin d’accroître le poids des États africains au sein de cet organe. «Cela lui permettra d’inciter plus facilement d’autres pays à adhérer à sa vision d’un règlement par l’autodétermination», écrit Francisco Serrano. L’erreur serait d’y croire et de donner suite à ce qui va être du grand spectacle, tout juste bon à satisfaire l’ego hypertrophié d’un régime en grand mal de légitimité dans le concert des nations.
Le management par la peur
Pour l’Algérie, la question du Sahara sera également une épreuve de force. En 2022, le pays a alloué 9,1 milliards de dollars à ses forces armées (contre 5 milliards de dollars pour le Maroc). Pour 2023, comptez 22 milliards de dollars et autant pour 2024. Et devinez contre qui ces budgets mirobolants sont mobilisés: le Maroc. Avec, en prime, «des exercices militaires coûteux le long de la frontière» avec le Royaume. Le tout, en méconnaissance totale de la réalité des guerres aujourd’hui, dans lesquelles un drone au prix coûtant peut faire bien plus de dégâts que le plus robuste des chars d’assaut.
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Reste que l’Algérie pourra également marquer une montée en puissance en matière de tensions. Celles-ci ont de nouveau éclaté le 28 octobre dernier, lorsque de multiples explosions ont eu lieu dans la ville d’Es-Semara. «Les explosions, qui seraient le résultat d’une attaque d’artillerie des forces du Polisario, ont tué une personne et en ont blessé trois autres», note le document. Et «à chaque instant, l’Algérie tentera de contrer la stratégie du Maroc». Une escalade sera inévitable si de nouveaux incidents entraînent des morts. Même si une guerre ouverte de l’Algérie contre le Maroc, qui sera aussi dévastatrice qu’impopulaire, est exclue par le think tank. Pour autant, «les tensions régionales continueront de s’intensifier, alimentant les escarmouches entre les forces marocaines et le Front Polisario». Et même de faible intensité, la reprise des hostilités «retardera encore davantage la recherche d’une solution durable», déduit l’auteur de l’analyse.
Une stratégie vouée à l’échec, le Maroc dans son Sahara
Le Maroc ne reste pas les mains croisées. Rabat a fait de la reconnaissance internationale de sa souveraineté territoriale son principal objectif diplomatique. «Les autorités marocaines ont réussi à accroître leur contrôle sur le terrain et obtenir un soutien international supplémentaire», notamment à l’option d’autonomie du Sahara sous souveraineté marocaine.
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«Grâce à la diplomatie et à son influence économique croissante en Afrique subsaharienne, Rabat a réussi à obtenir du soutien pour ses ambitions de souveraineté. Plus de 20 pays, essentiellement d’Afrique et du Moyen-Orient, ont établi ces dernières années des consulats dans la partie du territoire contesté sous contrôle marocain. Un énorme coup de pouce a également été donné par la reconnaissance par l’administration Trump de la souveraineté marocaine fin 2020… Cela devrait attirer le soutien d’autres pays puissants, notamment en Europe», résume l’analyse.
Sur le terrain, la caravane passe. Les projets de développement au sud se multiplient à la faveur d’une stratégie plaçant le Sahara au cœur des partenariats économiques entre le Maroc et toute l’Afrique de l’Ouest, avec l’Atlantique pour voie royale. Et pour se défendre, le Maroc privilégie la qualité à l’artillerie. le MEI cite en cela les nombreuses opérations où les Forces armées royales se sont distinguées, notamment à travers les drones.
Une chose est certaine, «il sera difficile pour l’Algérie de bouleverser le statu quo que le Maroc a établi sur le terrain», souligne le document. Même si l’Algérie tentera d’influencer l’opinion internationale, sa capacité d’agir et de changer le cours de l’Histoire est «peu probable». «Rabat jouit d’un contrôle militaire et politique sur la majorité du territoire et a obtenu un soutien diplomatique international. L’Algérie disposera de peu de mécanismes pour éroder ces avantages à l’avenir», achève l’analyse.