Quelques semaines après le début d'un second round du dialogue social entre les représentants du gouvernement et les principales centrales syndicales, et devant le statu quo visiblement en cours, un syndicat, l'UMT, a décidé d'agir. «L’UMT a soumis un mémorandum au ministre du Budget», Fouzi Lekjaa, annonce Miloudi Moukharik, contacté par Le360. Un document dans lequel la doyenne des centrales syndicales du pays «préconise une révision des tranches et une baisse de l’impôt de 38 à 36%», détaille son secrétaire général, qui précise qu'il s'agit «d’une vraie réforme de l’impôt sur le revenu (IR), qui répondra aux attentes des travailleurs et aux recommandations des Assises de la fiscalité».
Au premier round du dialogue social, les représentants gouvernementaux et les syndicalistes avaient sans doute prématurément crié victoire, mais Miloudi Moukharik temporise, car selon lui, la «proposition du gouvernement [est] en-deçà des aspirations des syndicats et celles des fonctionnaires et employés du secteur privé», explique-t-il, interrogé par Le360.
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En effet, l’UMT, tout comme les autres centrales syndicales qui ont pris part à ce round du dialogue social, ont rejeté les propositions de Fouzi Lekjaa, ministre délégué auprès de la ministre de l’Economie et des finances, chargé du Budget, lesquelles «n’auront aucun impact sur le niveau de vie des travailleurs», assure Miloudi Moukharik.
Voici quatre ans, les 3 et 4 mai 2019, lors d'Assises consacrées à ces discussions, à Skhirat, une recommandation avait été retenue: celle du réaménagement du barème de l’IR, au fur et à mesure de l’élargissement d’assiette de cet impôt, ainsi que l’amélioration de la part de l’IR professionnel afin soutenir les travailleurs aux revenus modestes, ainsi que ceux des classes moyennes.
Il convient de préciser que 60% des salariés ne sont pas assujettis à l’IR. Par conséquent, une révision de cet impôt à la baisse n’aura donc pas de répercussions sur les salaires de cette catégorie socio-professionnelle. Mais dans le document remis par l'UMT, que dirige Miloudi Moukharik, à Fouzi Lekjaa, figure cette revendication: un relèvement du plafond des charges professionnelles exonérées d’impôt de 10 points, au lieu des 5 points proposés par le ministre du Budget (soit un relèvement de 20 à 30%).
Autre point revendicatif, non moins important: l'UMT réclame aussi une augmentation générale des salaires: «nous avons estimé cette augmentation à 800 dirhams nets, soit 1.000 dirhams bruts pour l’ensemble des fonctionnaires et salariés du secteur privé», explique Miloudi Moukharik, qui précise que cette revalorisation est toutefois «négociable».
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Premier feed-back du ministre en charge du Budget: plutôt «positif». Selon Miloudi Moukharik, «Fouzi Lekjaa a pris acte de notre requête concernant l’augmentation générale des salaires. Le ministère de l’Economie et des finances examinera notre demande en vue de statuer sur les modalités ainsi que la valeur de cette augmentation».
Mais pour que ce dossier aboutisse, le gouvernement devra «changer d’approche», insiste le syndicaliste. «L’approche comptable est dépassée, car elle ne permettra pas de faire aboutir les négociations. L’Exécutif doit adopter une approche sociale pour rendre justice aux catégories les plus impactées par les impôts, que ce soit l’impôt direct que la TVA», plaide-t-il.
«Notre ultime objectif est d’améliorer les conditions de vie des salariés aussi bien dans le public que dans le privé», déclare aussi Miloudi Moukharik, qui réitère la position du syndicat qu'il dirige: «flexible», et «ouvert[e] aux négociations avec le gouvernement».
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Plusieurs scénarios sont décrits dans le document de l'UMT que détient à présent Fouzi Lekjaa, mais Miloudi Moukharik préfère ne pas les révéler pour le moment. Le ministre «nous a promis de soumettre ces scénarios au directeur des Impôts pour nous fournir des simulations», confie le secrétaire général de l’UMT.
Les centrales syndicales les plus représentatives avaient en effet, rappelons-le encore, initialement rejeté la proposition du ministre en charge du Budget, qui s'était contenté de proposer une simple réduction de l’IR au lieu d’une augmentation générale des salaires. Une source de «blocage» pour les syndicats, en direction desquels Fouzi Lekjaa a promis de revenir, avec une nouvelle proposition. Mais pour l'heure, aucune date n’a encore été fixée pour une prochaine réunion, explique le secrétaire général de l’UMT.