L’Agence France Presse cache mal son plaisir. «Le parquet a requis l'irrecevabilité des citations directes, déposées [par le Maroc, Ndlr] contre Le Monde, Radio France, France Media Monde, Mediapart, L'Humanité, Forbidden Stories et Amnesty international», rapporte l’AFP dans une dépêche datée du 26 janvier. Et de poser cette question: «le Maroc, accusé d'avoir eu recours au logiciel d'espionnage Pegasus, peut-il poursuivre en diffamation en France?».
L’AFP précise que la procureure a rappelé que «la Cour de cassation a déjà beaucoup répondu» à la question posée, qu’il existe une «jurisprudence constante»: «un Etat, qu'il soit français ou étranger ne peut poursuivre en diffamation». Voici pour le décor de ce qui ressemble à un procès plié d’avance et qui n’aura jamais lieu.
Le parquet français, qui est sous l’autorité du ministère de la Justice, donc du gouvernement français, estime qu’il existe un blanc-seing attribué aux médias pour attaquer, diffamer, servir des allégations sans preuves contre un Etat, tout en étant sûrs de ne pas être inquiétés par la Justice. Au nom de la sacro-sainte liberté d’expression.
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Un petit rappel de la genèse de cette affaire est très instructif des multiples défaillances et zones d’ombre qui la caractérisent. En juillet 2021, un consortium de 17 médias de renom, à l’origine de la publication de ce qui entend être un scandale planétaire, nous apprend qu’une quarantaine de pays ont acquis un fameux logiciel espion, Pegasus, fabriqué par l’entreprise israélienne NSO. Pourtant, seulement onze pays, dont le Maroc, sont cités. Aucune interrogation sur l’identité des 29 autres pays.
Plusieurs mois plus tard, on apprendra que la Hongrie, bête noire des mondialistes européens, n’est pas le seul pays de l’UE à avoir acquis Pegasus. La plus grande puissance de l’UE, l’Allemagne, s’en sert. Mais pour le consortium de médias qui s’est emparé du dossier, il ne peut y avoir de démocratisation dans l’accès à des technologies de pointe entre des pays développés et des pays émergents.
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Les médias français, dont le quotidien Le Monde, focalisent particulièrement leur intérêt contre les services de renseignements marocains, soupçonnés d’avoir diligenté une opération d’espionnage de masse: plus de 10.000 personnes. Selon les médias français, le téléphone portable du président Emmanuel Macron et même celui du roi Mohammed VI ont été ciblés par les services marocains. A aucun moment, ni les médias français, ni le laboratoire d’Amnesty international et encore moins l’organisation Forbbiden stories du très interlope Laurent Richard n’apportent les preuves de leurs accusations.
Le Maroc a pourtant catégoriquement démenti les allégations du consortium Forbbiden stories. Il a aussi déposé des plaintes, demandant la citation des médias français et ceux d'autres pays pour diffamation devant leurs juridictions respectives. Non pas pour mener une action d'intimidation à l'égard de ces médias ou pour porter atteinte à la liberté d'expression, qui est une liberté que le Maroc protège également à l'instar de tous les pays démocratiques, mais pour laver son honneur. Le Royaume a agi pour défendre ses droits et sa réputation, ainsi que celles de ses administrations sécuritaires qui agissent dans le cadre d’un Etat de droit. Porter atteinte en toute impunité à la réputation d’un Etat a des conséquences qu’on peut mesurer aussi bien sous l’angle des préjudices moraux que matériels. Les Etats, personnes morales de droit public, ont aussi une réputation à défendre. Cette défense, le parquet, qui agit sous l’autorité de l’Etat français, l’interdit donc au Maroc.
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Ce procès aurait pu être passionnant, parce qu’il aurait pu permettre de comprendre comment le patron de Fobbiden Stories, Laurent Richard, a construit son histoire à faire dormir debout, en obtenant une liste de numéros qui ciblent des pays émergents et passent sous silence les puissances occidentales. On aurait aussi pu voir les avocats du Maroc acculer cette organisation et les médias qui ont accusé le Royaume à fournir les preuves –dont ils ne disposent pas– de leurs accusations.
Me Olivier Baratelli, l’avocat mandaté par le Royaume pour l’affaire Pegasus, avait dès le mois d’août 2021 affirmé à la chaîne française d’information en continu CNews, qu'Amnesty International et Forbidden Stories étaient incapables produire des preuves. Il a dénoncé une «situation ubuesque» et une «supercherie».
En réaction à l’irrecevabilité de la plainte marocaine par le parquet français, Me Bartelli a dénoncé dans une interview avec le site Atlas info une manœuvre visant à «éviter le débat et le fond du dossier». Et pour arriver à cette fin, «on utilise des artifices de procédures, des moyens d’irrecevabilité pour faire un écran de fumée et éviter le débat de fond», précise Me Bartelli.
La législation française de 1881, qui participe d’une vision individualiste dominante au XIXe siècle, ne permettrait donc pas à un Etat, personne morale de droit public, d’accéder équitablement à la justice pour se défendre des atteintes diffamatoires à sa réputation. Cette vieille législation ne fait pas l’unanimité au sein même de l’UE. Nombre de pays d’Europe centrale et orientale, membres de l’UE, ne partagent pas cette conception de la liberté d’expression, qui est instrumentalisée parfois pour salir des Etats jaloux de leur souveraineté.