Comme l’indiquent le cadre où s’est déroulée l’entrevue, les habits inchangés de la journaliste et de son interlocuteur, la «nouvelle» sortie médiatique du président algérien sur la chaîne Al Jazeera a été enregistrée avant le début du mois de ramadan, et constitue donc la suite de celle déjà diffusée le 22 mars, dans le cadre du programme «Daïf Khas» (Invité spécial).
Dans cette seconde partie de l’entrevue, diffusée le jeudi 6 avril dans la cadre d’une autre émission d’Al Jazeera, intitulée «Podcast», Abdelmadjid Tebboune revient une nouvelle fois sur le dossier du Sahara marocain.
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Le président algérien continue de faire croire que le référendum, qui a été définitivement biffé de l’agenda de l’ONU et de l’Envoyé spécial de son Secrétaire général au Sahara, serait une solution à ce conflit créé par l’Algérie. Mais Tebboune, conscient au fond de lui-même de l’impossibilité d’organiser ce référendum, a lancé un message clair aux Sahraouis de Tindouf. S’il leur a assuré dans un passé récent que l’Algérie ne les lâchera jamais, il a leur a aussi signifié qu’ils ne deviendront jamais, et en aucun cas, des citoyens algériens, en «attendant de choisir de rentrer au Royaume du Maroc ou d’aller en Mauritanie», dit-il. En d’autres termes, les Sahraouis des camps de Tindouf, qui ont eux aussi tiré depuis longtemps un trait sur le référendum, seront condamnés à rester des damnés en Algérie tant que la junte locale continuera à en faire un fonds de commerce politique contre le Maroc.
Le président algérien n’a pas manqué non plus d’afficher, lors de cette entrevue avec Al Jazeera, une colère feinte contre le Maroc qu’il a accusé de vouloir diviser le Mali et d’être le responsable de l’enlèvement de deux diplomates algériens dans le nord du Mali… en 2012.
«Nous sommes le seul pays dont des diplomates ont été enlevés au Mali, et nous savons qui est derrière cette action. Elle est l’œuvre d’un État voisin qui a créé une organisation terroriste fantomatique au Mali».
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La journaliste a eu le mérite de bien préciser aux téléspectateurs que l’État que Tebboune ne cite pas est bien évidemment le Maroc, régulièrement accusé par la junte de tous les maux de l’Algérie.
En réalité, et pour rappel, les diplomates dont parle le président algérien ont été enlevés par le Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest), une nébuleuse formée par des Arabes maliens et dont le porte-parole n’était autre qu’Adnane Abou El Walid Essahraoui, un ancien membre du Polisario, qui deviendra par la suite le chef de l’État islamique dans le grand Sahel (EIGS), avant son élimination en août 2021 par l’armée française.
D’ailleurs, tous les mouvements terroristes actifs au Mali sont ou ont été dirigés par des Algériens, qu’il s’agisse de ceux éliminés par les forces françaises, comme Abdelhamid Abou Zeid (ancien chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, Aqmi, tué en 2013) et son remplaçant Abdelmalek Droukdel, mort en juin 2020, ou ceux encore en vie comme Mokhtar Belmokhtar, ancien membre du Groupe islamique armé (GIA), machine à tuer des renseignements militaires algériens durant la décennie noire en Algérie, et l’actuel émir d’Aqmi, Abou Obeïda Youssef Al-Annabi, lui aussi ancien membre du GIA algérien.
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À part cette stérile diatribe contre le Maroc, le président algérien a encore cédé à sa mauvaise habitude de balancer de faux chiffres sur l’économie algérienne, dont il veut faire accroire qu’elle n’est plus dépendante des seuls hydrocarbures dans «l’Algérie nouvelle». Ainsi, selon lui, l’agriculture contribue désormais à plus de 34 milliards de dollars par an au PIB, alors que les exportations hors hydrocarbures ont réalisé des records ces deux dernières années. Faussement triomphaliste, il ira même jusqu’à lâcher : «Nous ne nous comparons plus aux pays du voisinage, mais à l’Europe». Avec la crise actuelle de l’oignon, sujet de préoccupation majeure des Algériens, il y a effectivement de solides raisons de ne pas se comparer au voisinage.
Présentant le revenu par habitant en Algérie (très inégalement réparti) comme l’un des plus élevés en Afrique et dans le monde arabe, il n’a cependant pas pu expliquer à la journaliste, qui soulevait ses contradictions quand il dit que «tous les clignotants sont au vert en Algérie», où les recettes pétrolières ont atteint 60 milliards de dollars, où 22 milliards de dollars ont été récupérés ou sont en cours de l’être auprès des oligarques emprisonnés, pourquoi alors il y a tant de chômage, de pauvreté et de pénuries, une hausse vertigineuse des prix, une inflation à deux chiffres, une fuite en masse des Algériens vers l’Europe et des prisons pleines à craquer de détenus politiques?
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Toute cette situation ne s’explique-t-elle pas, lui insinue la journaliste, par le fait que «l’Algérie nouvelle» soit dirigée par une gérontocratie? Pour le président algérien, ceux qui dénoncent la sénilité du régime algérien tentent, avec l’aide des «khabardjias» (indicateurs) locaux ou établis à l’étranger, de soulever la jeunesse algérienne contre le pouvoir en place. Maladroitement, il a même défendu cette gérontocratie en citant en exemple l’âge de Joe Biden, aux États-Unis. L’administration américaine appréciera.