19 personnalités algériennes s'adressent à Bouteflika pour sauver l'Algérie de la dérive

Abdelaziz Bouteflika et son médecin Jacques Monségu. 

Abdelaziz Bouteflika et son médecin Jacques Monségu.  . DR

Pas moins de dix-neuf personnalités algériennes ont demandé à rencontrer le président Abdelaziz Bouteflika, sans que ce dernier, sorti des écrans radars depuis un fâcheux AVC diagnostiqué en 2013, n'accède à leur demande. Objectif: sauver l’Algérie du naufrage.

Le 07/11/2015 à 20h44

On se met à douter sérieusement des facultés intellectuelles du président Abdelaziz Bouteflika, après que ce dernier a perdu, depuis 2013, toutes ses capacités motrices ou presque. «Je connais très bien le président et je doute que certaines décisions soient de sa propre initiative», a certifié Khalida Toumi, qui a fait partie du gouvernement de 2002 à 2014, lors d’une conférence de presse tenue vendredi 6 novembre à Alger, pour dévoiler la teneur d’une lettre adressée à Bouteflika par dix-neuf personnalités algériennes mais restée sans lendemain. 

L'ex-ministre Khalida Toumi, la sénatrice et célèbre combattante de l'indépendance Zohra Drif-Bitat, la députée trotskyste Louisa Hanoune, l'écrivain Rachid Boudjedra et d'autres partisans du chef de l'Etat avaient en effet demandé à rencontrer Bouteflika, sans que cette demande ne soit satisfaite. Dans cette lettre, rendue publique hier vendredi, les signataires affirment vouloir attirer l’attention du président de la république algérienne sur «la dégradation du climat général dans notre pays».

Le silence de chapelle avec lequel cette demande d’audience a été accueillie conforte ainsi les doutes quant à la capacité de Bouteflika à assumer ses responsabilités de chef d’Etat, dont les activités publiques ont pratiquement cessé depuis 2013. Aucun déplacement, fut-ce à l'intérieur de l'Algérie. Bouteflika, 78 ans, a été victime d’un AVC qui a affaibli sa mobilité et sa faculté d’élocution. Ses activités publiques sont devenues très rares et il n’apparaît à l’écran que quand il reçoit des invités étrangers.

Qui décide pour l'Algérie?«Nous voulons avoir le cœur net. Nous voulons savoir s’il sait ou s’il ne sait pas. S’il est au courant, c’est une chose. S’il ne l’est pas, c’en est une autre», a insisté le SG du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, cosignataire de la lettre-alerte adressée au président Bouteflika.

«Ce n’est pas un tribunal et on ne veut pas se substituer au pouvoir législatif. Des décisions ont été prises. On veut savoir si le Président est au courant ou pas. Nous ne cherchons pas des postes au gouvernement», a précisé la militante trotskyste, qui veut savoir «qui décide actuellement pour l’Algérie» abandonnée aux mains du select club présidentiel, avec à sa tête le frère du président Saïd Bouteflika officiant en tant que conseiller auprès d’un président-fantôme.

C’est lui qu’on accuse d’ailleurs avec le chef d’état-major de l’armée Gaïd Salah d’être derrière la «purge» opérée depuis juillet dernier au sein du Département du renseignement et de la sécurité (DRS, renseignement algérien), entre autres institutions clefs en Algérie. Face à ce jeu de marionnettes, les signataires de la lettre ne comptent pas baisser les bras. Un ultimatum a ainsi été donné à Bouteflika. «Nous n’attendrons pas des mois mais des jours», a averti Louisa Hanoune, en tirant la sonnette d’alarme sur le naufrage annoncé de l’Algérie.

SOS Algérie!"Nous estimons qu'il est de notre devoir de patriotes algériens d'attirer votre attention sur la dégradation du climat général dans notre pays", affirment les signataires de la lettre dans laquelle ils demandent une audience au chef de l'Etat.

Le diagnostic est sans appel : "Le renoncement à la souveraineté nationale (...) par notamment l'abandon du droit de préemption de l'Etat, la déliquescence des institutions de l'Etat, la grave dégradation de la situation économique et sociale, l'abandon des cadres algériens livrés à l'arbitraire et aux sanctions partiales" sont des "signes notoires" de la dégradation du climat général dans le pays.Et ce n’est pas tout. L'Algérie, qui a perdu environ 50% de ses revenus pétroliers à cause de la chute des prix du brut depuis 2014, est contrainte de prendre sans tarder des mesures d'austérité budgétaire pour réduire le coût énorme des transferts sociaux qui permettent au pouvoir d'acheter la paix sociale. Paix sociale mise en danger aussi par la vacance institutionnelle, due à la paralysie d’un président réduit à poser en photo avec ses invités étrangers, échanger des lettres de circonstance ou à peine des bribes de phrases avec, entre autres, un certain Mohamed Abdelaziz, qui n’est plus que l’ombre de lui-même. Et dire que les médias algériens annoncent régulièrement des communications téléphoniques entre le président algérien et le patron du Polisario. C'est à croire que l'Algérie peut couler sans que son président ne bouge le petit doigt. Mais dès qu'il s'agit de contrer les intérêts du Maroc, il trouve toujours les ressources nécessaires pour dire qu'il est aux avant-postes.

Par Ziad Alami
Le 07/11/2015 à 20h44