Malgré des mises en garde internationales, encore redoublées ce jeudi, et des tractations en arrière-plan pour un accord de trêve, Israël persiste dans son projet d’offensive à grande échelle à Rafah, ville dans l’extrême sud de la bande de Gaza, où se réfugient près d’un million et demi de Palestiniens. Mercredi, sur son compte Telegram, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a évoqué «une action puissante à Rafah et ce, après avoir permis à la population civile de quitter les zones de combat».
Les bombardements israéliens se concentrent depuis plusieurs semaines sur le sud de la bande de Gaza, assiégée et dévastée, en particulier à Rafah, adossée à la frontière avec l’Égypte, et dans la ville de Khan Younès, où des milliers de déplacés ont trouvé abri dans l’hôpital Nasser, encerclé et attaqué par l’armée israélienne, faisant au moins un mort et plusieurs blessées. Au cours de la nuit, les frappes israéliennes ont tué 107 personnes, en majorité des femmes et des enfants, selon le bilan donné ce jeudi par le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas.
Environ 1,4 million de personnes, selon l’ONU, soit plus de la moitié de la population de Gaza, dont beaucoup déplacées à plusieurs reprises par la guerre, s’entassent à Rafah, transformée en un gigantesque campement. Plongée dans une crise humanitaire majeure, sans approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments, en électricité et en carburant, la population vit dans l’angoisse de l’offensive israélienne annoncée depuis plusieurs jours.
Une opération «catastrophique» à Rafah
Après les Etats-Unis, principal allié d’Israël, qui disent s’opposer à une offensive sur Rafah sans «garanties» pour la sécurité des civils, l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande ont mis en garde jeudi le gouvernement Netanyahu en garde contre une opération «catastrophique» à Rafah. «Il n’y a tout simplement nulle part où aller» pour les quelque 1,5 million de Palestiniens bloqués à la frontière, soulignent ces trois pays du Commonwealth, exhortant le Premier ministre israélien à «ne pas s’engager dans cette voie».
«Mon mari et mon fils Mohammad sont partis hier (mercredi) avec des milliers de personnes mais je ne sais pas ce qu’ils sont devenus, nous avons perdu le contact», a témoigné auprès de l’AFP une déplacée à l’hôpital Nasser, Jamila Zidane, 43 ans, de Khouzaa, une localité située plus à l’est.
«Nous avons peur», confie-t-elle, restée dans l’établissement avec ses six filles par crainte de ce qui les attend à l’extérieur. «Depuis plusieurs jours, nous n’avons plus de nourriture et nous buvons de l’eau souillée», ajoute-t-elle.
Négociations en vue d’une trêve
Les négociations en vue d’une trêve incluant de nouvelles libérations d’otages du Hamas et de Palestiniens détenus par Israël se poursuivent néanmoins en parallèle au Caire, sous médiation du Qatar et de l’Égypte.
Après une réunion mardi au Caire à laquelle participaient le chef du Mossad, les services secrets israéliens, David Barnea, le directeur de la CIA, William Burns, le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani, et des responsables égyptiens, ces tractations devaient se poursuivre jusqu’à vendredi. Une délégation du Hamas, selon une source du mouvement palestinien, était attendue mercredi au Caire pour rencontrer des responsables qataris et égyptiens.
Le Premier ministre israélien a évoqué dans un communiqué «des exigences délirantes du Hamas» qui bloqueraient les négociations, sans autre précision.
Israël a par ailleurs lancé mercredi des frappes dans le sud du Liban qui a tué onze personnes, selon des sources libanaises, faisant de nouveau craindre une contagion régionale de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien. Le chef d’état-major israélien, Herzi Halevi, en visite dans le nord du pays, a menacé d’une «campagne très offensive» au Liban, après quatre mois d’échanges de tirs entre l’armée israélienne et le Hezbollah libanais.
Eleven people, including six children, were killed by Israeli strikes on villages across southern Lebanon on Wednesday, according to reports.
— Al Jazeera English (@AJEnglish) February 15, 2024
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L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël pilonne sans relâche le petit territoire palestinien, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué près de 28.576 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait plus de 70.000 blessés, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.
En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 400 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le 7 octobre, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Rafah est en outre le principal point d’entrée de l’aide humanitaire depuis l’Égypte, largement insuffisante pour répondre aux besoins d’une population menacée en plein hiver par la famine et les épidémies. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a une nouvelle fois dénoncé mercredi la situation des hôpitaux de Gaza, «complètement submergés, débordés et insuffisamment approvisionnés». Le personnel doit procéder à des amputations, faute de moyens pour soigner les patients, a témoigné de Gaza le représentant local de l’OMS, Rik Peeperkorn.