Gaza: le Hamas dénonce un carnage de civils après les frappes israéliennes et annonce l’arrêt des négociations pour un cessez-le-feu (responsable)

Des personnes déplacées fuient les parties orientales de Deir el-Balah vers le centre-ville du centre de la bande de Gaza le 8 juin 2024, dans le contexte du conflit en cours dans le territoire palestinien entre Israël et le Hamas. AFP or licensors

Israël a indiqué samedi avoir visé deux hauts dirigeants du Hamas, dont son chef militaire, lors d’une frappe sur le sud de la bande de Gaza, où le mouvement islamiste palestinien fait état de 90 morts dans un camp de déplacés, poussant le Hamas a annoncer l’arrêt des négociations pour un cessez-le-feu.

Le 14/07/2024 à 07h43

Un haut responsable du Hamas a fait part à l’AFP dimanche de la décision du mouvement d’arrêter les négociations en vue d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, dénonçant le «manque de sérieux» et les «massacres» israéliens.

Dans le même temps, un autre haut responsable du mouvement islamiste palestinien a indiqué à l’AFP que le chef de sa branche armée, Mohammed Deif, visé par une frappe israélienne samedi, était en vie.

«Le chef du bureau politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a informé, lors d’une série d’appels, les médiateurs et des intervenants régionaux de la décision du Hamas d’arrêter les négociations en raison du manque de sérieux de l’occupation (Israël, NDLR), de la politique de procrastination et d’obstruction et des massacres contre des civils non armés», a indiqué le premier haut responsable du mouvement à l’AFP, sous le couvert de l’anonymat.

Il a invoqué les «massacres brutaux» dans le camp de déplacés d’Al-Mawasi de Khan Younès (sud) et du camp de réfugiés d’Al-Shati à Gaza-ville samedi.

Les deux dirigeants visés par les tirs israéliens sont Mohammed Deif et Rafa Salama, respectivement chef de la branche armée et commandant à Khan Younès du Hamas, présentés par l’armée israélienne comme «deux cerveaux du massacre du 7 octobre», date de l’attaque sans précédent menée par le mouvement islamiste en Israël, qui a déclenché la guerre à Gaza.

«Il n’y a pas de certitude qu’ils aient été éliminés l’un et l’autre», a ensuite affirmé le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. «Ces dernières semaines, nous avons identifié des failles claires au sein du Hamas (...) L’opération d’aujourd’hui y contribue aussi, qu’importe l’issue qu’elle aura», a-t-il ajouté.

Selon le Hamas, l’aviation israélienne a bombardé le camp de déplacés d’al-Mawasi, secteur désigné par Israël comme «zone humanitaire», faisant 90 morts «dont la moitié étaient des femmes et des enfants» et 300 blessés, révisant à la hausse un précédent bilan d’au moins 71 morts.

L’armée israélienne a, elle, assuré que «la frappe a été menée dans une zone clôturée gérée par le Hamas où, selon nos informations, seuls des terroristes du Hamas étaient présents, et aucun civil», estimant que «la plupart des victimes étaient des terroristes».

Le mouvement islamiste a estimé que les déclarations israéliennes visaient «à masquer l’ampleur de l’effroyable massacre».

L’insaisissable Mohammed Deif avait annoncé dans un enregistrement diffusé par le Hamas, le matin du 7 octobre, le début de l’opération «Déluge d’Al-Aqsa». Avant la frappe de samedi, il avait échappé au moins à six tentatives d’élimination connues.

«L’élimination des chefs du Hamas permet d’avancer vers la réussite de tous nos objectifs», a encore affirmé Netanyahu. «Cela envoie un message de dissuasion à tous les intermédiaires de l’Iran et à l’Iran lui-même».

Aucun endroit sûr

Dans le camp d’al-Mawasi situé près de Khan Younès, la frappe israélienne, parmi les plus meurtrières depuis le début de la guerre, a laissé un cratère poussiéreux, des débris, des tentes aplaties et des déplacés qui ratissent les décombres à la recherche des victimes.

«Il y a eu un tir de drone, puis trois missiles», raconte Mahmoud Abou Akar. «Il y a des gens qui ont perdu des jambes ou des bras partout, c’est une scène inconcevable», décrit, en pleurs, Mahmoud Chahine à l’AFP.

Selon l’Unrwa, agence onusienne pour les réfugiés palestiniens, environ 1,5 million de personnes se trouvent dans le secteur d’al-Mawasi, à Khan Younès et plus au sud à Rafah.

«L’affirmation selon laquelle les habitants de Gaza peuvent se déplacer vers des zones “sûres” ou “humanitaires” est fausse», a réagi sur X le chef de l’Unrwa, Philippe Lazzarini. À Gaza «aucun endroit n’est sûr. Personne n’est en sécurité», a-t-il souligné.

«25 toilettes pour 14.000 personnes»

La guerre a éclaté le 7 octobre après l’attaque sans précédent du Hamas infiltré depuis Gaza dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort de 1.195 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Sur 251 personnes alors enlevées, 116 sont toujours retenues à Gaza dont 42 sont mortes, selon l’armée.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas, au pouvoir depuis 2007 dans la bande de Gaza, et lancé une offensive qui a fait jusqu’à présent 38.443 morts, en majorité des civils, d’après des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, dirigé par le Hamas.

L’armée israélienne poursuit aussi ses opérations dans la ville de Gaza (nord), où plus d’une centaine de corps ont été découverts jeudi et vendredi dans des secteurs où de violents combats avaient fait rage, selon la Défense civile.

La Défense civile palestinienne a fait état de 20 morts samedi dans une frappe sur le camp de réfugiés d’al-Shati, à l’ouest de Gaza-ville.

L’armée israélienne n’a pas commenté ces informations dans l’immédiat.

La situation humanitaire est épouvantable dans le territoire palestinien assiégé: dans une école de Deir el-Balah, 14.000 Gazaouis déplacés partagent 25 toilettes, a dénoncé samedi l’Unrwa.

«Tendance positive»

Sur le plan diplomatique, les efforts pour une trêve sous l’égide du Qatar, de l’Égypte et des États-Unis, continuent.

Le président américain Joe Biden a affirmé vendredi que le «cadre» du plan de cessez-le-feu qu’il avait dévoilé le 31 mai avait été «accepté par Israël et le Hamas». «Il y a encore des lacunes à combler», mais «la tendance est positive», a-t-il déclaré.

Des milliers d’Israéliens ont à nouveau manifesté samedi soir à Tel-Aviv et Jérusalem, près des bureaux de Benjamin Netanyahu, pour exiger qu’une trêve soit conclue afin d’obtenir la libération des otages.

Mais beaucoup s’inquiètent de l’impact de la frappe visant le chef militaire du Hamas et soupçonnent le Premier ministre de «saboter» les négociations en cours.

«On est à un pas d’un accord, et maintenant ça pourrait nous éclater au visage», s’inquiète Einav Zangauker, dont le fils est otage du Hamas depuis le 7 octobre. «Si Mohammed Deif a été éliminé pendant que la proposition est sur la table, et que Netanyahu ne dit pas qu’il veut accepter l’accord (...) cela signifie qu’il laisse tomber Matan (son fils, NDLR) et les autres otages», ajoute-t-elle.

Sur un autre front, à la frontière israélo-libanaise, le Hezbollah libanais a dit avoir lancé des roquettes sur le nord d’Israël -blessant quatre soldats selon l’armée israélienne- après une frappe israélienne qui, selon une source sécuritaire, a tué deux civils dans le sud du Liban.

Par Le360 (avec AFP)
Le 14/07/2024 à 07h43