Lors du sommet de dirigeants à Belém la semaine dernière, le président brésilien Lula a appelé à «une feuille de route» pour «surmonter la dépendance aux combustibles fossiles».
Ce soutien politique fort et inattendu a donné de l’élan aux pays qui espèrent désormais que la conférence de l’ONU s’achèvera sur une décision concernant la sortie du charbon, du pétrole et du gaz fossile, principaux responsables du réchauffement climatique, même si le sujet n’est pour l’instant pas à l’ordre du jour officiel.
«On essaie en ce moment d’élargir une coalition d’États», qui veulent que le sujet figure «dans le paquet global de négociations», indique-t-on dans la délégation française, qui travaille notamment avec le Kenya, l’Allemagne et la Colombie.
Ces pays souhaitent donc une décision négociée à la COP, par consensus des près de 200 pays réunis, ce qui aurait beaucoup plus de poids qu’une déclaration d’intention signée seulement par les nations les plus volontaires.
«Notre priorité pour les prochains jours, c’est d’élargir cette coalition, c’est aller parler à l’ensemble des pays qui considèrent qu’il faut avancer, il faut accélérer sur ce sujet», souligne cette source.
Concrètement, l’idée est de s’appuyer sur la décision arrachée à Dubaï, qui avait appelé à «opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques» — une première.
Les promoteurs de cette idée se comptent en Europe, dans les États insulaires et en Amérique latine: au minimum 50 ou 60 pays, mais ils espèrent en rallier une centaine.
Ils ne s’attendent pas à ce que tous les pays du monde puissent s’engager immédiatement sur des dates de sortie précises des énergies fossiles.
Mais ils aimeraient que les nations détaillent leurs efforts en ce sens, avec un rendez-vous précis pour faire le point, par exemple à la COP31 dans un an.
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«J’aime vraiment cette idée de feuille de route parce qu’elle pose les bases d’une transition juste et planifiée», a déclaré à Belém la ministre brésilienne de l’Environnement, Marina Silva, poids lourd du gouvernement Lula.
«Puzzle diplomatique»
La Colombie, pays très en pointe sur ce sujet, fait aussi circuler une «déclaration de Belém», consultée par l’AFP, dans laquelle les pays signataires s’engageraient à «soutenir l’appel à avancer une feuille de route pour la transition hors des énergies fossiles». Le pays veut organiser la première «conférence internationale pour la sortie des énergies fossiles» en avril 2026.
«C’est un puzzle diplomatique qui est en train de se mettre en place», observe Romain Ioualalen, de l’ONG Oil Change International.
L’enjeu est de présenter à la présidence brésilienne de la COP, tenue en principe à une certaine neutralité, un «bloc de pays» suffisamment important pour imposer ce sujet, analyse-t-il.
Mais la route est encore longue, et la plupart des pays producteurs de pétrole, Arabie saoudite en tête, ne l’entendent pas de cette oreille. Le groupe arabe s’est montré particulièrement difficile dans les négociations sur l’ensemble des sujets à Belém, ont rapporté plusieurs sources.
«La résistance principale vient du groupe arabe, en particulier l’Arabie saoudite», selon Bill Hare, directeur de Climate Analytics et observateur vétéran des COP.
De l’ordre de 70 pays seraient opposés à une nouvelle décision sur les énergies fossiles, estime un négociateur. Sans oublier les lobbystes, présents en force, à Belém, comme les compagnies pétrolières.
«C’est bien beau de parler de diminuer les énergies fossiles ou même d’en sortir quand on vit dans un pays développé comme la France», a ironisé le négociateur en chef de la Russie, Vladimir Ouskov.
«Mais des gens dans une ville comme Belém n’ont même pas accès à la nourriture ou à l’électricité», a-t-il souligné auprès de l’AFP.
Le Brésil n’est lui-même pas exempt de contradictions: le président Lula soutient ainsi un projet d’exploration pétrolière lancé récemment en mer, au large de l’Amazonie.












