«Le Maroc renoue avec ses traditions», c’est le titre de ce reportage, qui débute à Agadir, où depuis quelques mois, un téléphérique flambant neuf permet à ses habitants de se rendre jusqu’au sommet de la Kasbah d'Agadir Oufella, sans être contraints de se livrer à un périlleux exercice d'escalade en pleine ville. Au sommet de ce monticule escarpé, le site fortifié vient tout juste d'être ouvert au public, après deux années de travaux de restauration dirigés par une architecte marocaine, Salima Naji.
«Cette citadelle a malheureusement subi le tremblement de terre de 1960. A ce moment-là, toute l’histoire a été complètement détruite», explique Salima Naji, qui a procédé à la restauration de cette citadelle dans le respect de son architecture traditionnelle et des méthodes ancestrales marocaines, respectueuses de l’environnement, et qui, aujourd'hui, se révèlent d'une étonnante modernité. L’édifice est en effet aujourd'hui pourvu de murailles restaurées, et à même de résister à un éventuel autre séisme.
«La technique de cette pierre sèche, associée au bois de chêne, fait que s’il y a un séisme, tout cela va vibrer et se repositionner», explique l'architecte, devant un mur où pierres et empiècements de bois se combinent.
Dans le chantier de la Kasbah d’Agadir, les matériaux utilisés pour sa restauration sont autant que possible locaux. Aux plafonds, du bois de laurier, et, pour les murs, des pierres assemblées avec du bois. Un choix de matériaux qui a été décidé avant la crise du Covid-19, et qui s'est s'avéré encore plus pertinent aujourd’hui, explique France 3, car selon l’architecte marocaine, «avec l’inflation de l’acier et du béton, toutes ces questions sont devenues cruciales».
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Pas de ciment, pas de béton, ni de fer… La Kasbah, restaurée, a non seulement rendu les ouvriers du chantier enthousiastes, eux qui ont été fiers de perpétuer les techniques ancestrales marocaines, et de retrouver leurs valeurs, de la droiture et de l'implication, mais aussi les touristes en visite dans le Souss, qui ont su tomber sous le charme de cet endroit, respectueux des traditions architecturales du Royaume.
Salima Naji n’en est pas à son premier chantier de restauration ou de réhabilitation. L'architecte lutte depuis de nombreuses années pour que le Maroc renoue avec ses techniques architecturales ancestrales. Et d'entraîner l’équipe de France 3 un peu plus loin dans cette région des montagnes de l'Anti-Atlas, où elle a conduit des projets de restauration similaires.
L'équipe de France 3 a ainsi pu découvrir une oasis de l'Anti-Atlas, où Salima Naji et ses ouvriers ont consacré huit ans de travail à réhabiliter un ancien souk, datant du Protectorat. Un endroit exceptionnel, où la conception et les matériaux utilisés permettent de conserver une certaine fraîcheur à l'intérieur des pièces, quand bien même la température extérieure est de plus de +45°C. Un petit miracle, que permet non une polluante climatisation, mais bien de simples briques de terre crue.
«Dans un contexte de réchauffement climatique, cette architecture oasienne peut servir de modèle», poursuit France 3, d’autant que, explique David Goeury, géographe et époux de Salima Naji, les matériaux nobles utilisés émettent peu de CO2. «Ce sont des méthodes de construction à faible intensité carbone», contrairement à celles en béton armé qui sont à très forte intensité carbone, détaille-t-il.
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Malheureusement, déplore-t-on, le béton (la brique et le ciment aussi) s'impose comme unique matériau de construction, ou presque, à travers le Maroc, jusque dans des villages enclavés. Préserver les maisons traditionnelles est un défi pour cette architecte et son équipe. Salima Naji précise aussi que la construction d’une maison selon les techniques d'autrefois coûte beaucoup moins cher. En effet, certains matériaux sont à disposition: de la terre, et d’autres, comme le plâtre, sont peu onéreux, à la différence du béton, dont le transport depuis la ville représente aussi un coût conséquent.
Enfin, autre avantage de ces constructions traditionnelles, l’utilisation du bois, qui permet ainsi de mieux entretenir les palmeraies et d’éviter des incendies, devenus plus fréquents avec le réchauffement climatique.
Un véritable atout pour le Maroc qui, depuis la COP22 à Marrakech en 2016, recommande d’utiliser les matériaux locaux pour l'ensemble des bâtiments publics, tout particulièrement dans les zones rurales, et impose par ailleurs aux constructions un plan d’efficacité énergétique.