Un été au Maroc #4: les vestiges portugais de "l’Algarve d’au-delà de la mer"

La citerne portugaise à El Jadida.

La citerne portugaise à El Jadida. . DR

Le Portugal a occupé une partie du Maroc du 14 août 1415, date qui correspond à la prise de Ceuta par Jean Ier, au 11 mars 1769. Plusieurs villes du Royaume conservent des vestiges de ces 354 ans d’occupation. Voici les plus célèbres, méritant le détour.

Le 27/06/2020 à 12h29

Bien que les dernières générations soient plus au fait de l’histoire du Maroc sous occupation française et espagnole, le Maroc possède aussi une riche histoire avec le Portugal. Le Royaume était d’ailleurs considéré par les Lusitaniens comme l’Algarve d’au-delà de la mer, en référence à cette région du sud du Portugal qui borde l’Atlantique et dont le nom provient de l’arabe, Al Gharb. Sous l’appellation des Algarves, on désignait alors toute la côte africaine et l’ensemble de l’Empire portugais qui s’étendait jusqu’à Macao.

Dans ce vaste empire, le Maroc était considéré comme le deuxième Algarve car faisant face au Royaume d’Algarve "d’en deçà des mers", autrement dit en territoire européen et en raison de sa forte attache tant économique que militaire au Portugal.

Témoins de cette épopée historique, de nombreux remparts et des constructions militaires encore visibles et plus ou moins bien conservés dans plusieurs villes de la côte atlantique marocaine à l’instar de Ksar Seghir, Asilah, Azemmour, El Jadida, Safi, mais aussi Ceuta,, Agadir, Souira Kedima, Essaouira...

Ksar El SeghirAujourd’hui encore, des vestiges de ce qui fut la Couraça sont encore visibles à Ksar El Seghir, Alcàcer Ceguer, ville occupée par les Portugais de 1458 à 1550. La Couraça est le monument le plus connu de ce que fut la citadelle portugaise, et était en fait un chemin reliant l’espace urbain à l’espace maritime.

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Erigée en 1502, la Couraça se détachait du donjon et s’étendait en direction de la mer sur une centaine de mètres. Petit corridor maçonné et protégé, celui-ci se terminait sur la plage par un petit bastion.

Place forte portugaise, Ksar el Seghir possède également un site archéologique, témoin de cette époque et des nombreuses invasions de la ville, ouvert au grand public. Sur ce site, on peut aujourd’hui admirer les restes des remparts de la ville et notamment les traces au sol des deux églises présentes à l’époque: l’église paroissiale sainte Marie de la Miséricorde et l’église saint Sébastien. Le château Couraça peut quant à lui être parcouru dans sa totalité.

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AsilahA voir absolument, la Tour de Menagem ou Tour El Kamra, une tour à fonction militaire érigée en 1508, restée longtemps en très mauvais état et restaurée depuis peu, où on célébrait l’investiture du souverain et les actes de souveraineté. Son nom "El Kamra", dérivé du portugais "camara", désigne ainsi la salle où s’exerce la souveraineté.

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La fonction de cette tour était aussi de protéger la porte de la mer, Borj El Bahr, qui permettait de relier la ville au port. Elle est entourée aujourd’hui des vestiges du mur qui séparait la ville de la forteresse portugaise, consolidée et valorisée depuis.

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A Asilah ou Arzila, occupée par les Portugais de 1471 à 1589, on peut toujours admirer les remparts de la ville historique, réalisés dès l’arrivée des Portugais.

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Toujours présente également, la porte de la ville, Porta da Vila pour les Portugais, aujourd’hui nommée Bab Al Homar.

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AzemmourD’Azamor la portugaise, il ne reste que peu de traces malgré une occupation courant de 1471 à 1541. On peut toutefois imaginer ce que fut le palais du gouverneur, monument presque complètement détruit et restauré en 2006 sans pour autant ressembler à l’édifice original.Bien visibles encore, les remparts de la ville et les proto-bastions, conçus par les frères Arruda dès 1513.

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Ces deux ingénieurs militaires chargés d’améliorer les défenses de la citadelle ont choisi de consolider les remparts locaux principalement faits de terre en les renforçant avec des escarpes en pierre et en briques.

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El JadidaL’ancienne Mazagan, ville fortifiée classée au patrimoine mondial de l’UNESCO est sans conteste la cité portugaise la mieux conservée au Maroc. Construite au XVIe siècle par les marins portugais, cette ville qui fut leur dernière cité au Maroc avant leur départ au Brésil en 1769, abrite encore bien des vestiges.A commencer par quatre bastions que l’on peut admirer en empruntant le chemin de ronde qui offre par un ailleurs un magnifique panorama.

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Enfin, la citerne du château portugais édifiée en 1514 vaut le détour pour son incroyable architecture souterraine.

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Conçue d’abord pour servir de salle d’armes, elle a ensuite été transformée en citerne qui permettait de conserver l’eau en état de siège. Avec ses 6 nefs et 25 colonnes, son puits de lumière au centre, l’atmosphère mystique qui s’en dégage lui a valu de séduire des cinéastes tel qu’Orson Welles qui y tourna plusieurs scènes d’Othello.

SafiDe la cathédrale de Safi, il ne reste qu’une partie du transept pour témoigner encore de la présence de cet édifice construit en 1519 et dédié à Sainte Catherine. Son style gothique est unique au Maroc et en Afrique.

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A admirer également, en bord de mer, le château de la mer, les remparts nord et sud et le chemin de ronde qui menait directement au château.

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Ce grand château médiéval surplombe la baie de Safi et en assurait dès 1523, date de la fin de son édification, la défense de la ville contre les attaques venant de la mer. Bien que restauré, son édification sur un python rocheux l’expose dangereusement à l’assaut des vagues.

Sources bibliographiques: L’héritage portugais au Maroc de Romeo Carabelli

Par Zineb Ibnouzahir
Le 27/06/2020 à 12h29