Le consortium emmené par Certares a été invité à entamer des négociations exclusives avec l'Etat italien qui détient 100% de la compagnie, a indiqué le ministère de l'Économie sans dévoiler le montant de l'offre.
Cette annonce surprise constitue un sérieux revers pour l'armateur italo-suisse MSC et son allié allemand Lufthansa, qui étaient considérés jusqu'ici comme favoris.
Le fonds Certares, spécialisé dans le tourisme, a proposé le rachat de près de 56% d'ITA pour environ 600 millions d'euros, selon le quotidien Il Messaggero.
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L'Etat italien conserverait ainsi une part de 44% et disposerait de deux sièges sur les cinq que comptera le futur conseil d'administration de la compagnie.
Cette forte présence lui permettrait de continuer à peser sur les décisions stratégiques concernant ITA.
MSC et Lufthansa avaient proposé fin août de débourser 850 millions d'euros pour 80% d'ITA. Les deux compagnies visaient des parts de respectivement 60% et 20%.
Saluant la décision de Rome, Air France-KLM a indiqué jouer un simple rôle de «partenaire commercial», mais n'a pas exclu de prendre à moyen terme une «participation minoritaire» dans ITA.
Une telle entrée au capital ne pourrait pas dépasser 10%, car Air France-KLM a les mains liées par les conditions imposées par la Commission européenne en contrepartie de l'aide publique reçue pour surmonter la crise du Covid-19.
A l'inverse, Lufthansa n'a pas caché sa déception: «de notre point de vue, notre offre conjointe avec MSC était la meilleure solution pour ITA».
«Apparemment, un choix est en train d'être fait qui permet une plus grande influence de l'État et n'envisage pas la privatisation totale d’ITA», a commenté la compagnie.
Bouffée d'oxygène pour l'EtatRome avait donné en février son feu vert à la privatisation d'ITA Airways, qui avait pris son envol le 15 octobre 2021, après des années de recherches infructueuses d'un repreneur pour son ancêtre Alitalia.
Une cession d'ITA, si elle se concrétise, constituerait une bouffée d'oxygène pour l'État italien car, au fil des années, il a dû débourser plus de 13 milliards d'euros pour tenter de remettre à flot la compagnie nationale.
Air France-KLM avait déjà eu des visées sur Alitalia dans le passé.
Le groupe franco-néerlandais s'était vu contraint de retirer en avril 2008 une offre de rachat soutenue par le gouvernement sortant de Romano Prodi, face à l'hostilité des syndicats et de Silvio Berlusconi, candidat aux législatives, qui avait joué la carte populiste de l'identité nationale.
Le groupe s'est contenté dans la foulée d'une part de 25% dans Alitalia avant de s'en dégager progressivement à partir de 2013.
L'annonce du rachat d'ITA survient, elle aussi, en pleine campagne électorale pour les législatives de fin septembre. Le parti post-fasciste Fratelli Italia (FDI), dont la présidente Giorgia Meloni semble bien placée pour succéder au Premier ministre Mario Draghi, a aussitôt protesté.
Les décisions concernant l'avenir de la compagnie aérienne nationale «appartiennent au prochain exécutif qui sortira des urnes», a prévenu Marco Silvestroni, représentant de FDI dans la commission des transports du Parlement.
Seule façon de survivrePour l'héritière d'Alitalia, «un mariage est la seule façon de survivre, toute seule elle serait vouée à mourir définitivement», a expliqué à l'AFP Andrea Giuricin, économiste des transports à l'université Bicocca de Milan.
«Chaque jour qui passe, elle perd de l'argent et voit sa valeur réduite», relève-t-il.
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Mais le rachat d'ITA Airways «n'est pas une garantie pour sa survie» car, après un été de forte affluence dans les aéroports, «de nombreuses incertitudes planent sur le secteur aérien européen à l'automne, la visibilité est très réduite», estime Andrea Giuricin.
La publication des bans interviendra dans un contexte de turbulences pour le secteur aérien, marqué par l'envolée des prix du kérosène, la guerre en Ukraine et une pénurie de personnels.
ITA était à la recherche de partenaires afin de se renforcer surtout dans le long-courrier. Le réseau d'agences de voyages de Certares lui permettrait notamment de s'implanter davantage aux Etats-Unis.