Dans un récent rapport, la Banque mondiale s’est penchée sur les tendances mondiales en matière de migration et d’envois de fonds, à l’heure de la pandémie de Covid-19. Selon ce rapport, en 2021, les envois de fonds vers les pays à revenu faible et intermédiaire devraient atteindre 589 milliards de dollars, enregistrant une augmentation de 7,3% par rapport à l’année précédente.
D’après les auteurs du rapport, «la reprise en 2021 fait suite à la résilience des flux observés en 2020, lorsque les envois de fonds ont enregistré seulement une baisse modeste de 1,7% à 549 milliards de dollars, face à l'une des récessions mondiales les plus graves jamais enregistrées».
Dans le chapitre consacré à la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord), la Banque mondiale s’intéresse au cas du Maroc, qui figure parmi les pays dont les fonds reçus de la diaspora enregistrent des hausses significatives, bravant la crise. Selon le rapport, les MRE devraient ainsi transférer, en 2021, près de 9,3 milliards de dollars vers le royaume (soit près de 85,5 milliards de dirhams). C’est presque 18 milliards de dirhams de plus que le volume total des transferts de l’année 2020 (68 milliards de dirhams). C’est aussi un record absolu: jamais les MRE n’ont envoyé autant d’argent en devises, en un an, vers leur pays d’origine.
Il est à noter que la prévision de la Banque mondiale pour l’année 2021 est proche de celle réalisée par Bank Al-Maghrib en octobre dernier. La Banque centrale s’attend en effet à ce que les transferts des MRE affichent une progression importante de 27,7% en 2021 pour atteindre un record de 87 milliards de dirhams.
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Cette manne, que certains qualifient de providentielle, constitue une véritable bouffée d’air frais pour les réserves en devises du Royaume, d’autant que, dans le même temps, une autre importante ressource en devises, à savoir les recettes touristiques, peinent à retrouver leur niveau d’avant-crise, à cause des effets de la pandémie du Covid-19 et aux restrictions sur les voyages.
7,4% du PIBAu niveau régional, le Maroc figure, sans surprise dans le peloton de tête en termes de fonds transférés par la diaspora. Selon le rapport de la Banque mondiale, le Royaume se classe même au deuxième rang des pays bénéficiaire d'envois de fonds dans la région Mena. Il reste toutefois loin derrière l’Egypte, dont les transferts devraient atteindre le montant faramineux de 33,3 milliards de dollars, d’après les prévisions de l’institution multilatérale.
Derrière le Maroc, on retrouve le Liban avec 6,6 milliards de dollars de fonds reçus en 2021, la Jordanie (3,6 milliards de dollars), la Palestine (2,9 milliards de dollars), la Tunisie (2,2 milliards de dollars) et l’Algérie (1,8 milliard de dollars).
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Au total, les pays en développement de la région Mena devraient recevoir un montant de 62 milliards de dollars en 2021, en croissance de 9,7% par rapport à 2021. Ce montant, notent les auteurs du rapport, est boosté par «les flux étonnamment solides vers l’Egypte et le Maroc».
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En termes de pourcentage du PIB, le rapport souligne que les transferts d’argent des MRE vers le Maroc devraient représenter, en 2021, 7,4% du PIB, classant ainsi le Royaume au quatrième rang dans la région. Le Royaume arrive derrière le Liban dont les transferts de sa diaspora représenteraient 34,8% du PIB, la Palestine (16,7% du PIB), la Jordanie (8,4% du PIB) et l’Egypte (8% du PIB).
D’où viennent les fonds?Le rapport de la Banque mondiale renseigne également sur les pays de provenance des fonds. On apprend ainsi que, malgré la forte concentration de MRE en Europe, ce sont les Etats-Unis qui arrivent en tête des pays de provenance des fonds, avec une part de 14% du total. Derrière les Etats-Unis, on retrouve l'Arabie saoudite (12%) et la France (10%).
Les auteurs du rapport soulignent également que l'UE reste la destination dominante pour les travailleurs migrants du Maghreb, et le Maroc demeure «le plus grand pourvoyeur de migrants en termes absolus et relatifs».
«France et Espagne sont les destinations clés, puisqu’elles comptent respectivement 1,5 millions et 850.000 expatriés marocains», indique le rapport, qui rappelle que l’Europe a été durement touchée par la récession mondiale liée au Covid-19 en 2020, avec une chute du PIB de 6,3%.
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La Banque mondiale souligne en outre que le Maroc et la Tunisie sont des terres d’accueil pour les migrants d’Afrique de l’Ouest et du Sahel qui veulent se rendre en Europe. Une situation qui «contribue à stimuler les envois de fonds vers les économies d'accueil», explique le rapport.
Une hausse spectaculaire aux raisons encore flouesGlobalement, la hausse spectaculaire des transferts des MRE n’a pas encore trouvé d’explications convaincantes. Le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, l’a lui-même avoué, lors de son dernier point de presse, le 13 octobre dernier.
«Peut-être est-ce dû à la poursuite de l’élan de solidarité des MRE avec leurs proches au Maroc, affectés par la crise. Il s’agit peut-être d’une accumulation de l’épargne de l’autre côté et d’une crainte des MRE de la voir taxer dans leurs pays de résidence. Peut-être s’agit-il d’un effet de la convention OCDE, ou d’une reprise des investissements des MRE au Maroc, à cause d’une conjoncture atone en Europe. Peut-être que d’autres facteurs existent qu’il faudra déterminer», s’est interrogé Jouahri.
Le Wali de Bank Al-Maghrib a d'ailleurs annoncé l'instauration d’une commission, composée notamment de membres de BAM, du ministère des Finances, de la Direction générale des Impôts, du Groupement professionnel des banques du Maroc et de l’Office des Changes, pour mieux comprendre ce phénomène. Les conclusions de cette commission devraient être connues dans les prochains mois, a promis Abdellatif Jouahri.