Si l'annonce mercredi soir de l'accord d'Alger a provoqué un rebond immédiat des cours, ainsi qu'une hausse des valeurs énergétiques aux Etats-Unis et en Asie, les prix du brut repartaient à la baisse jeudi dans l'après-midi en Asie.
Après six heures de réunion et des semaines de tractations, l'Opep a annoncé avoir décidé de ramener sa production à un niveau de 32,5 à 33 millions de barils par jour, contre 33,47 mbj en août selon l'Agence internationale de l'Energie (AIE). Il s'agit de la plus importante limitation depuis celle décidée durant la crise de 2008.
L'accord a été trouvé lorsque Ryad, rival régional de Téhéran et membre dominant de l'Opep, a accepté que toute limitation soit épargnée à Téhéran. L'Iran cherche à retrouver ses niveaux de production antérieurs aux sanctions internationales liées à son programme nucléaire.
Une précédente tentative du cartel pour stabiliser le marché avait tourné court en avril, Téhéran ayant refusé de participer aux efforts de réduction. "C'est clairement l'Arabie saoudite qui a baissé le regard la première, permettant à l'Iran, son principal rival, d'augmenter sa production", a déclaré à l'AFP Jeffrey Halley, analyste chez OANDA.
"Nous ne devons pas sous-estimer ce changement majeur de la part de l'Arabie. Ces deux là ne sont d'accord sur rien, c'est une concession majeure de l'Arabie destinée à “lubrifier” le processus".
L'Arabie saoudite sunnite et l'Iran chiite sont les poids lourds du Moyen-Orient et s'opposent sur toute une série de sujets, comme dans les guerres au Yémen et en Syrie.
Selon les analystes, c'est la chute des revenus du pétrole qui a motivé le cartel même si certains relèvent que celui-ci n'a pas toujours respecté les quotas dans le passé.
Les décisions concrètes sur les objectifs de production de chacun de ses membres doivent encore être déterminés lors du sommet semestriel de l'Opep, qui produit environ 40% du brut mondial, le 30 novembre à Vienne.
Jusqu'à présent, face au boom des hydrocarbures de schiste américains, les plus riches parmi les 14 membres du cartel avaient choisi de défendre ses parts de marché et ouvert à fond les robinets.
Ce refus de réguler le marché, en dépit de la surabondance de l'offre et de la morosité de la demande, a contribué à la baisse des cours, passés de plus de 100 dollars le baril en juin 2014 à moins de 30 dollars début 2016.
"L'Arabie saoudite a peut-être revu sa stratégie de dumping destinée à écarter le pétrole de schiste américain car la pression sur son budget approche clairement le point de non retour", a ajouté M. Halley.
Ryad, qui dépend à 73% des recettes pétrolières, a enregistré en 2015 un déficit budgétaire record, ce qui l'a conduit à des mesures d'austérité.
"De nombreux membres de l'Opep souffrent économiquement des prix bas. Leurs économies stagnent ou régressent et ils font face à des problèmes budgétaires", a souligné Greg McKenna, analyste chez AxiTrader.
"Il semble donc que l'impératif budgétaire l'ait emporté sur les impératifs politiques. Je crois que la hausse des cours et la réduction promise seront durables", dit-il à l'AFP.
D'autres analystes tablent sur la prudence dans l'attente du sommet de Vienne. Les investisseurs vont également regarder du côté des producteurs non membres de l'Opep comme la Russie, les Etats-Unis et le Canada. Les marchés qui avaient pris jusqu'à 6% après l'annonce de l'accord, ont ensuite reflué en Asie.
Vers 05H00 GMT, le WTI pour livraison en novembre perdait sept cents, à 46,98 dollars, dans les échanges électroniques en Asie. Le Brent, également pour livraison en novembre, cédait 18 cents à 48,51 dollars.
"Il n'y a pas eu d'accord ces huit dernières années alors il est compréhensible que certains restent sceptiques", a déclaré à l'AFP Alex Furber, analyste chez CMC Markets. "L'offre est toujours très abondante. Cela voudrait dire que les perspectives sont toujours baissières pour l'instant".