Dans un communiqué diffusé hier, lundi 25 juillet 2022 tard dans la soirée, Maroc Telecom annonce avoir pris acte de la décision du Comité de gestion de l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) relative à la liquidation de l’astreinte qui lui a été imposée dans le cadre de la décision du 17 janvier 2020 portant sur le dégroupage.
«Le montant de l’astreinte est fixé à 2,45 milliards de dirhams et a été intégralement provisionné dans les comptes au 30 juin 2022», précise l'opérateur de télécoms.
Maroc Telecom, qui n’en est pas à sa première sanction, s’est déjà vu infliger, en janvier 2020, une amende record de 3,3 milliards de dirhams pour abus de position dominante sur le marché du fixe.
Suite à une saisine déposée par Inwi, le gendarme des télécoms avait conclu à l’existence de comportements cumulés imputés à IAM, ayant eu pour effet d’empêcher et de retarder l’accès des concurrents au dégroupage et au marché du fixe.
La décision de janvier 2020 a été assortie de plusieurs injonctions soumises à des astreintes journalières pouvant atteindre plusieurs millions de dirhams en cas de non-respect par IAM des stipulations de la décision.
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Pour le top management de Maroc Telecom, la nouvelle sanction de l’ANRT est loin d’être une surprise. Fin février dernier, en dévoilant les résultats de l’exercice 2021, IAM a fait état d’un rapport émanant du régulateur pointant le non-respect des injonctions de la décision liée à la sanction de 2020.
Une sorte de profit warning déguisé pour préparer les actionnaires à une nouvelle série de sanctions «prévisibles». Une lecture rapide de la décision de janvier 2020 indique que si IAM persiste à enfreindre les injonctions du régulateur, chaque jour de retard lui coûterait une amende pouvant atteindre les 4 millions de dirhams.
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Certains se demandent comment Abdeslam Ahizoune, l’indéboulonnable patron de IAM, bien que conscient du volume des astreintes à payer, qui pourraient se chiffrer en milliards de dirhams, persiste dans son comportement dommageable pour l’image et les finances de l’opérateur historique.
Dans un précédent article, citant un expert ès-télécoms, il a été établi que Maroc Telecom préférait opter pour un arbitrage malsain entre, d’une part, le risque encouru en termes d’amendes payées et, d’autre part, les gains engrangés grâce à sa situation de monopole.
«A titre d’exemple, le montant de l’amende payée par IAM en 2020, soit 3,3 milliards de dirhams, représente à peine 2,7% du montant total de dividendes distribués par l’opérateur historique en près de 20 ans à ses actionnaires (120 milliards de dirhams)», indique un expert, pour lequel le management d'IAM préfère de loin payer des amendes que d'accepter le jeu sain de la concurrence. Ce niveau de rendement, résultat d’un monopole de fait et du non-respect des lois et règlementations en vigueur, est quatre fois plus élevé que celui pratiqué par les opérateurs historiques européens, a-t-il ajouté.
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Mais ce dynamisme monopolistique, dont a fait preuve ces dernières années IAM, commence à s’essouffler. Preuve en sont les résultats de 2021 qui, faut-il le rappeler, ont marqué un tournant sans précédent: sur les 6 milliards de dirhams gagnés, seulement 4,2 milliards de dirhams ont été distribués sous forme de dividendes, alors que Maroc Telecom avait habitué ses actionnaires, pendant plus de 20 ans, à recevoir 100% de ses bénéfices.
La nouvelle sanction de 2,45 milliards de dirhams est la conséquence directe du management hasardeux d’Ahizoune, fondé sur des pratiques anticoncurrentielles par l’exercice d’un monopole préjudiciable au développement de l’ADSL et des services en ligne au Maroc. Selon nos informations, en cas de récidive, le régulateur pourrait infliger à Maroc Telecom une amende encore plus lourde que celle de 3,3 milliards de dirhams, prononcée en janvier 2020.