«Je ne me permets jamais de commenter le travail des autres en public», Jouahri dit ses quatre vérités à Lahlimi

Le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri et le Haut-Commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi.

La tension persiste entre le wali de Bank Al-Maghrib et le Haut-Commissaire au Plan, deux grands commis de l’Etat au style pour le moins opposé. À l’issue du dernier Conseil de la banque centrale, Abdellatif Jouahri n’a pas manqué de critiquer l’analyse d’Ahmed Ahlimi au sujet de la politique monétaire adoptée pour lutter contre l’inflation.

Le 21/06/2023 à 14h06

Lors de la traditionnelle rencontre avec la presse, tenue à l’issue du dernier Conseil de Bank Al-Maghrib, le mardi 20 juin, le wali de la banque centrale, Abdellatif Jouahri, n’a pas caché son mécontentement. Objet de son courroux: la dernière sortie médiatique du Haut-Commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi, au sujet de la pertinence du resserrement de la politique monétaire pour lutter contre l’inflation.

Une analyse infondée et un commentaire hâtif qui n’ont pas à être faits en public, a laissé entendre Abdellatif Jouahri qui regrette ne pas avoir été sollicité en privé pour discuter d’un sujet aussi compliqué et qui nécessite des études bien étayées avant de tirer une quelconque conclusion.

«Je ne me suis jamais permis de commenter en public le travail des autres. Quand j’ai quelque chose à dire, j’envoie directement un courrier sans que personne ne le sache. C’est-ce qu’il faut faire entre institutions de l’Etat», a-t-il souligné.

En effet, Ahmed Lahlimi n’était pas allé de main morte pour critiquer la politique monétaire de Bank Al-Maghrib qu’il juge trop restrictive. Dans une interview accordée à Médias24, en mars dernier, le Haut-Commissaire au Plan avait soutenu que l’inflation au Maroc était devenue structurelle et qu’il fallait apprendre à vivre avec.

Pour le patron du HCP, le resserrement de la politique monétaire de Bank Al-Maghrib ne résoudrait donc pas le problème, l’inflation étant le résultat d’une insuffisance de l’offre sur le marché national et non d’une augmentation de la demande qu’un taux directeur élevé pourrait freiner.

«Chacun peut analyser et dire ce qu’il veut, mais s’il y a des études qui démontrent ces conclusions. On se pose et on discute, je suis toujours prêt. L’inflation est structurelle, c’est bien, expliquez-moi pourquoi et si c’est fondé je vous promets de l’écrire et de l’adopter», a tout simplement proposé Abdellatif Jouahri à Lahlimi sans le nommer.

Un agacement général

Le Wali de Bank Al-Maghrib semble toutefois agacé par la multiplication, ces derniers temps, des analyses et commentaires faits en l’absence d’études approfondies sur le sujet, le minimum requis pour se forger une opinion.

«Je ne dis pas ça uniquement pour le HCP. Je vois qu’il y a beaucoup d’universitaires et d’économistes qui livrent des analyses à droite et à gauche mais aucun d’entre eux n’est venu nous voir un jour pour nous demander comment on travaille ou quels outils nous utilisons pour fonder nos analyses», a-t-il ajouté.

Pour rappel, le Conseil de Bank Al-Maghrib a décidé ce mardi, après trois hausses successives du taux directeur, pour un total de 150 points de base, de marquer une pause dans le cycle de resserrement de la politique monétaire, et de maintenir par conséquent le taux directeur inchangé à 3%.

Lors de ses prochaines réunions, selon un communiqué du Conseil de BAM, les décisions tiendront compte de l’évaluation approfondie et actualisée des effets cumulés des hausses du taux directeur et de l’impact des différentes mesures mises en place par le gouvernement pour soutenir certaines activités économiques et le pouvoir d’achat des ménages.

Par Safae Hadri
Le 21/06/2023 à 14h06