Dans un article sous le titre «Maroc: fuite de cerveaux dans l'informatique», paru dans l'édition de ce lundi, le quoditien français Le Figaro avance que «60 % des informaticiens marocains auraient déjà été approchés par des recruteurs à l'étranger. Pour les bac + 4, ce chiffre grimpe à 85 %».
«Environ 200 informaticiens sont embauchés toutes les deux semaines par des cabinets de recrutement au profit d'entreprises essentiellement françaises et canadiennes depuis bientôt deux ans», s'alarme Saloua Karkri-Belkeziz, présidente de l'Apebi, la Fédération marocaine des technologies de l'information, de la communication et de l'offshoring, citée par le journal.
Ce phénomène a suscité une vive polémique au Maroc après la réaction sur Twitter d'Attijariwafa Bank à la suite d'une campagne de recrutement du français Atos. «En cause, "le débauchage", "l'attitude prédatrice" de ces cabinets sur les ressources du secteur au Maroc», souligne le quotidien, affirmant que «face à une pénurie d'ingénieurs informatiques, les entreprises marocaines, dont les besoins augmentent également, peinent à embaucher».
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«Nous avons une dizaine de postes à pourvoir et nous avons bien du mal à recruter», confie au journal Hassan Amor, PDG de Microdata. «Nous demandons un peu moins d'agressivité de la part des entreprises issues de pays amis sur le recrutement des profils en tension. Il ne faut pas interdire l'émigration de travail, mais trouver la bonne mesure entre une émigration naturelle fondée sur le désir de chacun d'avoir une expérience à l'étranger et le fait de venir ramasser toutes les ressources disponibles. Le Maroc a besoin de ses ressources pour se développer», a-t-il dans des déclarations au journal français.
Si les effets de la Mission French Tech et du Visa French Tech sont pointés du doigt comme l'accélérateur de cette «prédation», seuls 150 visas auraient été délivrés depuis son lancement en 2017. «Certains intermédiaires bénéficient indûment du label French Tech, ce qui leur permet de recruter des ingénieurs informatique très rapidement grâce à la procédure accélérée», indique Saloua Karkri-Belkeziz. La simplification et l'élargissement de ce visa dédié aux «talents étrangers» depuis le 1er mars risquent d'accélérer le phénomène constaté au Maroc, selon Le Figaro.
Abdelmounaïm Madani, directeur de l'Agence nationale de promotion de l'emploi et des compétences (Anapec), se veut plus rassurant. «Nous ne sommes pas dans une situation de tension sans issue», affirme-t-il au journal français, ajoutant que «chaque année pendant trois ans, nous allons financer entièrement la formation de 4000 diplômés en mathématiques, physique, biologie, issus de nos facultés de sciences, aux métiers du digital, en partenariat avec la profession». Il s'agit de répondre à la demande de diplômés marocains dans le secteur, quelle que soit sa provenance. En attendant, souligne Le Figaro, «les opérateurs marocains développent leur propre stratégie comme le recrutement de profils pour des missions ponctuelles».
Pour ceux dont les besoins sont plus importants, ils envisagent la même politique que les recruteurs français, affirme le journal. «Nous sommes dans la mondialisation, c'est vrai, alors elle doit aller dans les deux sens: si les Marocains partent, alors les Subsahariens doivent pouvoir venir. Je reviens du Cameroun où nous avons effectué un appel à candidatures auprès de 200 jeunes», révèle au journal Saloua Karkri-Belkeziz, également DG de GFI Maroc.