C’est une révolution discrète, mais dont les effets pourraient redéfinir en profondeur le visage du secteur public marocain. «Moins de deux ans après sa création, l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de l’État (ANGSPE) se prépare à franchir un cap décisif: sa transformation en une holding publique, dotée du statut de société anonyme», indique le quotidien Les Inspirations Éco dans son édition du 15 juillet.
Ce projet, loin d’être une simple déclaration d’intention, s’appuie sur une feuille de route claire et des premiers résultats concrets. À travers cette évolution, le Maroc ambitionne de replacer l’État actionnaire au cœur d’une logique de performance, de transparence et de création de valeur durable.
L’enjeu est de taille. Le portefeuille confié à l’ANGSPE concentre une part considérable de l’économie nationale. Fin 2023, il représentait à lui seul 67% du chiffre d’affaires, 96% de la valeur ajoutée et 75% des investissements du secteur public. «Concrètement, ce sont 15 établissements publics, 35 sociétés à participation directe et 7 participations minoritaires, regroupant plus de 340 entités à piloter, restructurer et dynamiser», explique Les Inspirations Éco.
Derrière ces chiffres, une mission claire: «maximiser la valeur et la rentabilité du portefeuille, identifier les opportunités d’ouverture au capital, de privatisation, ou de renforcement des positions dans des secteurs jugés stratégiques pour la souveraineté nationale», précise le dernier rapport de l’Agence repris par le quotidien.
Le modèle vers lequel tend l’ANGSPE s’inspire des standards internationaux en matière de gouvernance des participations publiques. L’objectif est de passer d’une logique de gestion administrative à une logique d’investisseur stratégique, capable d’optimiser les dividendes, de mener des partenariats structurants et d’orchestrer des restructurations d’envergure.
«À terme, l’Agence sera transformée en société anonyme structurée en holding. Elle pilotera une gestion dynamique de ses participations pour maximiser création de valeur et emploi, tout en renforçant leur contribution au développement économique et social du Maroc», souligne le document stratégique.
Dès son entrée en fonction en décembre 2022, l’ANGSPE a mis sur orbite plusieurs réformes majeures. La professionnalisation de la gouvernance a constitué une étape clé, notamment avec la nomination d’administrateurs indépendants, la création de comités spécialisés et la mise en place de cycles de formation pour les représentants de l’État.
Autre chantier structurant: la consolidation des comptes selon les normes IFRS. Objectif? Fournir une photographie fidèle et transparente de la situation financière consolidée des établissements publics. Une avancée jugée indispensable pour renforcer leur attractivité auprès des investisseurs, faciliter la levée de fonds et asseoir la crédibilité de l’État actionnaire, lit-on encore.
En parallèle, un dispositif de pilotage de la performance est en cours de déploiement pour suivre, avec précision, les résultats et les trajectoires des entités sous tutelle.
«Au-delà de la gouvernance, l’ANGSPE défend une approche résolument ouverte au secteur privé», souligne Les Inspirations Éco. Les entreprises publiques sont désormais invitées à jouer un rôle de catalyseur, en multipliant les partenariats et co-investissements. Il s’agit de mutualiser les expertises, partager les risques et accélérer le déploiement de projets structurants, notamment dans l’énergie, la finance, la logistique ou encore l’audiovisuel.
Cette stratégie vise aussi à maintenir la neutralité concurrentielle. Les EEP doivent opérer selon les règles du marché, éviter toute distorsion de concurrence et renforcer leurs liens avec les PME et les startups, notamment via la commande publique.
Dans un contexte où le Royaume s’attèle à la mise en œuvre d’un nouveau modèle de développement, cette réforme de l’État actionnaire apparaît comme l’un des leviers majeurs pour relancer l’investissement et moderniser l’action publique. Un cap confirmé au plus haut niveau, lit-on. Dès octobre 2020, dans son discours au Parlement, le roi Mohammed VI rappelait que «le succès du plan de relance économique et la mise en place d’un nouveau contrat social nécessitent une évolution réelle des mentalités et une amélioration notable du niveau de performance des établissements publics».








