2021 connaît une recrudescence des concentrations économiques au niveau mondial, comme cela avait été le cas à la suite de la crise financière de 2008. Une tendance amenée à se poursuivre durant toute la période post-covid, et à laquelle le Maroc n’échappe pas, comme le montrent les données recueillies par Le360 auprès du Conseil de la concurrence.
Ainsi, depuis le début de l’année, et jusqu’à fin septembre 2021, 88 décisions relatives aux projets de concentration économique ont déjà été rendues par l’instance constitutionnelle, contre 59 décisions sur l’ensemble de l’année 2020.
L’analyse de la répartition sectorielle des projets de concentration économique au Maroc durant les 9 premiers mois de 2021 montre que le secteur de l’industrie manufacturière est le plus dynamique en la matière, puisqu’il représente 27,7% des projets de concentration (24 dossiers) instruits par le Conseil de la concurrence. Le secteur «autres activités de service» est deuxième avec 14 dossiers (15,91% du total), devant celui de la «Santé et action sociale» avec 9 dossiers (10,23%) et celui des «activités financières et d’assurance» avec 7 dossiers (7,95%).
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Ces projets de concentration économiques consistent le plus souvent en des prises de contrôle exclusif. Il peut s’agir également de prise de contrôle conjoint, de création d’entreprise commune ou encore de fusion.
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Parmi les opérations instruites par les équipes du président Ahmed Rahhou depuis le début de l’année, on retrouve, entre autres, l’acquisition par le groupe Anouar invest de 100% du capital social de la société Silver Food et de ses filiales; la prise de contrôle exclusif direct par la société Ola Energy Maroc de la société MJ Energy; l’acquisition par Compass UK Topco Limited du contrôle exclusif de la société Creditinfo Holding Maroc SAS; ou encore l’acquisition par Elsan Maroc du contrôle exclusif de la société Clinique Les Oliviers.
Contrôle en amont Comme indiqué dans les premières lignes de cet article, la hausse des projets de concentration économique dans le monde et au Maroc durant les derniers mois est une conséquence directe de la crise engendrée par la pandémie de Covid-19.
En effet, la reprise économique amorcée dans plusieurs pays à partir de la fin du 2ème trimestre 2020 a généré une tendance à la hausse des concentrations, notamment en raison d’un processus de «sélection naturelle», vouant les entreprises les plus fragiles à la disparition ou à être absorbées par les entreprises les plus résilientes.
Pour accompagner cette dynamique soutenue des concentrations, le Conseil de la concurrence s’est adapté. Il a considérablement réduit les délais des traitements des dossiers, tout en veillant à mettre en place des procédures adéquates et strictes. Objectif: éviter que ces concentrations deviennent la source de pratiques anti-concurrentielles, d’abus de positions dominantes et de stratégies d’exploitation des consommateurs.
Le Conseil a dans ce sens enrichi les procédures existantes de contrôle des concentrations, avec par exemple la mise en place d'une procédure d’examen de «l’entreprise défaillante» en cas de concentrations de sauvetage.
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Le contrôle par le Conseil de la concurrence consiste également à agir en amont, en réalisant une analyse prospective des conséquences d’une opération de concentration sur le marché, d’un point de vue concurrentiel. Concrètement, en cas de risque d’atteinte au libre jeu du fonctionnement des marchés, le Conseil peut imposer aux entreprises concernées de prendre des engagements qui préserveraient la libre concurrence. Le Conseil peut aussi décider d’interdire l’opération.
Si l’opération ne présente pas de grandes difficultés pour la concurrence, la loi prévoit un délai de deux mois pour autoriser avec ou sans condition. Au cas où l’instruction de ce type d’opération aboutit à des doutes portant atteinte à la concurrence, le Conseil de la Concurrence peut entamer une procédure d’examen approfondi.
Dans tous les cas, le rapprochement des entreprises ne peut se concrétiser, avant la décision du Conseil de la concurrence. Si c’est le cas, les entreprises en question seront sanctionnées. Aussi les entreprises décidant de se rapprocher avant de notifier leur fusion auprès du régulateur, se verront également, sanctionnées.
Les parties concernées par ces opérations peuvent formuler un recours contre la décision du Conseil de la Concurrence devant la Chambre Administrative de la Cour de Cassation.
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Pour finir, il faut savoir que la loi marocaine spécifie les opérations de concentrations qui sont soumises au contrôle du Conseil de la Concurrence. Ainsi, l’obligation de notification des projets de concentration économique au Conseil de la concurrence s’applique lorsque l’une des trois conditions suivantes se réalise:
- un chiffre d’affaires hors taxes mondial de l’ensemble des entreprises concernées supérieur ou égal à 750 millions de dirhams;
- un chiffre d’affaires hors taxes au Maroc d’au moins deux des entreprises concernées supérieur ou égal à 250 millions de dirhams;
- une part de marché supérieure à 40% sur les volumes de ventes, d’achats ou autre transaction sur le marché national des biens, des produits ou des services de même nature ou substituables, durant l’année précédente.