La campagne agricole 2024/2025 s’annonce sous des perspectives contrastées, selon le magazine Challenge. Et pour cause. D’un côté, le gouvernement marocain affiche des prévisions optimistes, anticipant une production céréalière de 70 millions de quintaux, en cohérence avec une croissance économique estimée à 4,6% en 2025. Ces projections reposent sur l’hypothèse d’une amélioration des conditions climatiques, une variable incertaine au vu des tendances actuelles.
De l’autre côté, le magazine souligne que les experts de Bank Al-Maghrib tempèrent ces estimations, prévoyant une production céréalière ne dépassant pas 50 millions de quintaux, bien en deçà des objectifs gouvernementaux. Cette prévision s’appuie sur la moyenne des cinq dernières années, marquées par des périodes de sécheresse récurrentes. Le Haut-Commissariat au Plan (HCP) partage cette prudence, bien qu’il envisage une reprise du secteur primaire en 2025, après une contraction de 5% attendue pour 2024. Toutefois, ces prévisions restent tributaires de l’évolution des conditions climatiques.
Le début de la campagne 2024/2025 avait suscité un certain optimisme grâce aux premières précipitations hivernales et à un taux de remplissage des barrages atteignant 28,7% au 18 décembre 2024, contre 23,5% l’année précédente, écrit Challenge. Cette amélioration a favorisé une meilleure hydratation des sols et une régénération des nappes phréatiques. Selon la Direction des études et des prévisions financières (DEPF), la moyenne des précipitations entre le 1er septembre et le 6 décembre 2024 s’élevait à 50 mm, contre seulement 27 mm un an plus tôt.
Cependant, les pluies de janvier ont déçu les attentes des agriculteurs, ravivant les incertitudes pour la saison. En effet, les précipitations de décembre ont principalement bénéficié aux zones non productrices de céréales, laissant la plupart des exploitations céréalières sans ressources hydriques suffisantes. Des experts comme Adil Houmy, ingénieur agronome, confirment que l’absence de pluies en janvier affectera la production de blé, une culture automnale dépendante des précipitations. Boubker Menaam, un autre spécialiste, souligne que les fortes pluies de décembre ont épargné des régions clés de production, notamment Doukkala, Abda, Chaouia et le Gharb.
Face à ces conditions climatiques imprévisibles, l’agriculture marocaine doit s’adapter. Mohamed Taher Srairi, professeur à l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II de Rabat, appelle à une refonte des techniques agricoles. Il insiste sur la nécessité de développer des variétés végétales et animales résistantes à la sécheresse et prône un investissement accru dans la recherche agronomique, avec des programmes structurés et des financements adaptés.
Les agriculteurs marocains adoptent déjà des pratiques plus résilientes, comme le semis direct, qui permet de conserver l’humidité du sol et de réduire les coûts. Toutefois, cette méthode n’est efficace que si elle s’accompagne de politiques agricoles robustes favorisant l’adaptation aux changements climatiques. Face à la sécheresse persistante, certains agriculteurs réduisent l’usage de produits phytosanitaires ou renoncent aux cultures printanières pour préserver leurs terres et nourrir leur bétail, une décision stratégique motivée par la hausse des prix des aliments pour animaux.
Dans ce contexte difficile, rappelle Challenge, le gouvernement marocain a mis en place plusieurs mesures pour soutenir le secteur agricole. Le ministère de l’Agriculture promeut la conversion des cultures sensibles à la sécheresse vers des espèces plus résistantes, encourageant notamment le développement de variétés génétiquement adaptées aux nouvelles conditions climatiques. Le Fonds de développement agricole (FDA) a été réorienté pour soutenir cette transition, avec des aides destinées à l’introduction de cultures telles que l’olivier, le palmier dattier et l’amandier. Par ailleurs, le gouvernement renforce l’utilisation des techniques d’irrigation localisée et des technologies économes en eau, afin de maximiser l’utilisation des ressources hydriques disponibles.
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