Bien que favori, “Meursault, contre-enquête”, premier roman de l’Algérien Kamel Daoud, était reparti bredouille au prix Goncourt l’an passé. Traduit en plusieurs langues, récompensé par le Prix François Mauriac et le Prix littéraire des cinq Continents, le roman de Kamel Daoud a enfin obtenu le sacre qu’il méritait. En plus d’avoir rafflé le Goncourt 2015, l’œuvre sera bientôt adaptée au théâtre Liberté de Toulon et au cinéma. Parmi les autres titres en lice pour la pretigieuse récompense, “Le voyage d'Octavio” (Payot-Rivages) de Miguel Bonnefoy, “Sauve qui peut Madrid” de Kiko Herrero, “La Fleur du Capital” de Jean-Noël Orengo.
"Meursault, contre-enquête" est un remake aussi subtil que séditieux de “L’Etranger” d’Albert Camus (1942). Une aventure et un hommage littéraires en forme de contrepoint, de doubles et de faux-semblants où Kamel Daoud, animé d’une colère littéraire, tisse de percutantes analyses de la société, évoquant la question de l’identité et l’appliquant à l’Algérie contemporaine.
Visé par une fatwa pour ses articles polémiques, l’Algérien révolté n’en démord pas. Il s’arme de sa plume insoumise et de sa verve aussi acérée et rôdée qu’un sabre, avec un sens aigu de la critique, pour se révolter contre le régime et la société, contre les sbires sanguinaires et les islamistes. Il s'empare de l’Arabe assassiné par Meursault, le personnage de "l'Etranger" d’Albert Camus, pour lui redonner vie à travers un Algérien aujourd'hui, celle d'un opprimé doublement victime du régime et des barbus. Un arabe ignoré, sans nom, qui subit le courroux de ses esclavagistes, étouffé sous la pression de l’extrémisme.