Le cœur de Mohamed El Baz a cessé de battre dans la nuit du samedi au dimanche 26 mai, dans son domicile à Marrakech. Quatre mois après sa dernière exposition individuelle, intitulée «Ad Astra», à la galerie L’Atelier 21 à Casablanca, l’artiste-plasticien a rejoint les étoiles à l’âge de 57 ans, laissant ses proches et ses amis dans une inconsolable tristesse. Selon ses proches, l’artiste Mohamed El Baz a succombé à un malaise cardiaque.
Connu comme l’un des artistes contemporains les plus créatifs du continent, Mohamed El Baz a développé un langage plastique reconnaissable par tous et dont le dénominateur commun est un souci constant de concevoir des œuvres à l’esthétisme palpable, tout en entretenant une acuité avec l’actualité criante du monde où nous vivons. «Bricoler l’incurable», cette expression empruntée au philosophe Cioran, a été le phare et la boussole qui a guidé les différentes recherches de cet artiste inclassable qui a eu une influence considérable à la fois sur l’art contemporain au Maroc et les artistes marocains.
Originaire d’El Ksiba, où il est né en 1967, Mohamed El Baz a été formé à l’École régionale des beaux-arts de Dunkerque en France, où il a décroché son diplôme en arts plastiques. Travaillant entre Casablanca et Lille, l’artiste a développé plusieurs séries qui sortent des sentiers battus et surprennent par la cohérence d’une démarche à laquelle l’artiste est resté fidèle durant toute sa carrière. Ses œuvres, un mélange d’arts graphiques, de photographie, de sculptures et d’installations plastiques, traitaient du concept des frontières, des barrières, de l’insaisissable, des objets usuels et de l’intime. L’un des traits caractéristiques de l’artiste consistait à hausser au rang d’œuvre d’art des détails puisés dans la vie quotidienne.
Sa dernière exposition, «Ad Astra», à l’Atelier 21, en était la preuve. En hommage au film éponyme de James Gray, Mohamed El Baz a créé un univers à la fois intime et lointain. L’un des points forts de Mohamed El Baz était sa capacité de toujours produire un discours autour des œuvres plastiques et de la démarche d’un artiste. Beaucoup lui reconnaissent d’ailleurs cette lucidité de ne jamais laisser une œuvre d’art exempte d’un discours qui en détermine l’urgence. El Baz était toujours disposé à partager son avis, à faire don. C’est l’un des artistes les plus généreux -au sens noble de ce mot- de sa génération. Il était de tous les combats de toutes les œuvres pour faire sens.
Très sensible de nature, écorché vif, Mohamed El Baz prônait une façon de faire de l’art à la manière d’un manifeste pour transformer le monde. Son départ prématuré laisse abasourdis à la fois ses amis très nombreux et nombre d’amateurs d’arts plastiques au Maroc et dans toute l’Afrique.