Exclusivité-Le360. EP4. Les bonnes feuilles de «Cloud cowboys», nouveau roman d’Hicham Lasri

Hicham Lasri (Hamza Zidane).

Artiste conceptuel et écrivain reconnu, Hicham Lasri opère un retour fracassant avec un nouveau roman «Cloud cowboys» où il livre une vision incandescente et inoubliable d’un monde à l’agonie, où l’espoir est la dernière ressource. En exclusivité, Le360 en publie les bonnes feuilles au fil des épisodes.

Le 19/07/2025 à 16h30

«Cloud Cowboys», nouveau roman d’Hicham Lasri, est l’histoire d’un monde à l’agonie. Une fable arabo-futuriste à la croisée de «Mad Max» et du mythe. Un roman où l’espoir, plus encore que l’eau, devient la ressource la plus rare.

La famille Vallenari, derniers «Cloud Cowboys», dérive au-dessus des terres mortes à bord de la Beatle, machine colossale, conçue pour capturer la pluie. Leur quotidien déjà précaire, bascule lorsqu’un nuage contaminé, s’écrase à proximité, libérant une toxine mystérieuse et mortelle.

«Sécheresse

10 ans plus tard

Toute la poussière du monde a été déplacée dans tous les sens des millions de fois, le mélange de terre, de peaux mortes et de particules glisse sur la surface de la planète, rendant l’air irrespirable, le ciel opaque et les poumons dysfonctionnels. Un vent sec et teigneux souffle tout autour, un vent cinglant, un vent junkie en quête de poussière à soulever ou de visages à gifler. Le vent ne cesse de pousser des cris et des gémissements en érodant tout ce qui se trouve sur son chemin. Les gémissements finissent par ressembler à des rires d’hyènes… C’est le jour de l’anniversaire sinistre de la Mère Vallenari, fauchée par un câble, Nora Vallenari, adolescente en plein boom hormonal cherche toujours comment faire un bon couscous, et s’efforce d’oublier que ce jour patibulaire, elle la traverse comme elle doit le traverser: un désert qui s’ajoute au désert qui l’entoure. La coupure. Sami Vallenari a réussi à trouver un artefact vintage au marché noir, une balle 19 cloud cowboys de revolver qu’il met sur un filin pour l’enfiler autour de son cou. Fierté. Il se regarde dans le miroir, la balle est de taille moyenne, il la cache sous son vêtement. Sa sœur l’appelle d’en bas et le son est toujours aussi désagréable quand il roule dans les arcanes du Beatle immobilisé et poussiéreux depuis dix ans. SAMIsamiSAMIsamiSAMIIII. Écholalie. Il se hâte de sortir de sa tanière pour que sa sœur ne fasse pas rouler un autre cri dans les couloirs de leur Beatle maison. SAMI ! Trop tard. Il encaisse l’écho et le grondement de la voix de Nora Vallenari avec abnégation en dévalant les trois étages qui les séparent. Nora a dix-sept mois de moins que Sami, mais elle a choisi d’être la maîtresse de maison. Elle se donne ce rôle comme pour passer son temps à se plaindre qu’elle porte le Beatle, le Père Vallenari et son frère à bout de bras. Jeanne d’Arc. Sami la laisse faire, il n’est pas dérangé par cette imposture juvénile. Il aime sa sœur au-delà de ses défauts qui restent supportables et parfois mignons. SAMI.

— Je suis là!

Il regarde sa sœur; parfois elle le hérisse de la voir le front plissé, dans cette sorte de concentration qui essore son visage de toute la joliesse que la nature y a mise. Elle se prend au sérieux et le sérieux assèche sa peau de la fraîcheur de sa jeunesse. Anxiété.

— Des nouvelles de Papa?

— Rien… plus de signes depuis hier, il doit être encore en train de traverser la Région du Désastre…

— Tu fais quoi?

— Du couscous… Sami fait une grimace. Nora encaisse la grimace en fronçant encore plus les sourcils qui se touchent 20 cloud cowboys maintenant. Frida. Elle ne trouve pas ce frère, mou du genou et du bulbe, très encourageant dans son entreprise de retrouver la recette perdue du couscous… Elle ouvre la marmite pour laisser échapper une odeur forte qui attaque les narines de Sami. Il fait un pas en arrière, repoussé dans ses pénates par la violence des relents de moisi qui s’échappent allègre ment de la marmite. Écœurement.

— Il manque encore quelque chose…

— J’ai tout mis… tous les légumes… toutes les épices… tout ce qu’il faut… Un chevrotement dans sa voix trahit une envie de se délester de quelques larmes, mais ce n’est pas le genre de la maison d’ouvrir les vannes en ces temps de sécheresse. Résilience. Sami baisse la tête, laissant échapper la balle qui tangue autour de son cou.»

Par La Rédaction
Le 19/07/2025 à 16h30